Mon testament économique

OPINION. L'économie devrait être au service du citoyen qui, de son côté, devrait en saisir les notions pour pouvoir prendre en main son destin économique et financier. Il est temps de pallier ce manque et ce testament est une manière d'apporter ma pierre à l'édifice. Par Michel Santi, économiste qui publie également un nouvel ouvrage : « Le testament d'un économiste désabusé » (*).
Michel Santi, économiste.
Michel Santi, économiste. (Crédits : DR)

« Le testament d'un économiste désabusé » est en fait un dictionnaire de l'économie en crise. Vous ne trouverez pas sous la lettre C le terme de "Coronavirus", ni les conséquences économiques et sociales de cette crise sanitaire ou de sa gestion par nos autorités. Si ce « testament » passe le Covid-19 sous silence, c'est pour la simple raison qu'il fut bouclé quelques mois avant cet événement planétaire. Et vous constaterez donc comment les mesures prises par l'Europe - en général frileuse et velléitaire - abondent largement dans le sens de ce que j'ai inlassablement recommandé au fil de ces années écoulées, depuis 2008.

Virage à 180 degrés

J'eus en effet la berlue et je me frottais les yeux à mesure des stimuli et des dépenses pharaoniques décrétés pendant cette crise par la France et par l'Allemagne. Avaient-ils enfin lu mes innombrables analyses, un stagiaire avait-il ressorti et compilé mes exhortations à la dépense et à la dette que je n'ai cessées de défendre comme seules voies vers le rétablissement en période de crise ? Et pourtant, à l'heure d'écrire ces quelques lignes et alors que le « testament » s'apprête à être publié, le soufflet retombe, l'enthousiasme de nos dirigeants pour la relance se refroidit, l'on reparle de rigueur, des comptes publics et autres réformes des retraites.

Lire aussi : L'austérité n'est pas une fatalité !

Bref, on s'apprête à revenir sur le chacun pour soi qui menace notre démocratie de mort par asphyxie. Avoir raison avant les autres n'a aucune importance si l'on échoue à infléchir le cours des événements.

Pour une économie proche du citoyen

Comme le lecteur le constatera au fil de ses lectures, l'économie est - en tout cas pour moi - souvent politique, et ne devrait pas se complaire dans trop d'équations dont l'objectif principal est en réalité de l'éloigner du public et du citoyen alors qu'elle devrait être entièrement à leur service.

Lire aussi : Économie: le pouvoir enchanteur des mathématiques ?

Il est crucial d'informer et de former nos citoyens à cette économie qui n'est assurément pas une science. Ce n'est que quand l'énorme masse de nos compatriotes comprendra ces notions qu'elles pourra enfin intervenir, infléchir, refuser et proposer, bref qu'elle pourra prendre en mains son destin économique et financier. Il est donc temps de réagir, de s'informer, d'apprendre, car les instruments sont là : il suffit de se pencher pour les utiliser. Non pour casser le néolibéralisme, ni forcément pour résorber les inégalités, qui ne sont l'un comme l'autre que les reflets de l'incurie de nos responsables, mais pour laisser à nos enfants un avenir meilleur et pour que l'on puisse enfin vivre sereinement de notre travail.

Un testament est par nature un don

Ceci est donc mon testament car je ne souhaite pas être présent pour ce qui sera l'épisode final. Et car j'ai trop le sentiment - non de prêcher dans le désert car je ne prétend aucunement détenir la science infuse - mais j'ai la quasi certitude de l'absence totale de motivation d'une immense majorité d'entre vous de bouger, ne serait-ce que d'un iota de ce que vous croyez être une formule qui marche, qui a certes parfois des ratés mais qui, pour solde, remplit sa part du marché. Un testament est par nature un don: vous en ferez ce que vous voudrez, lecteur, mais vous ne direz pas que l'on ne vous a pas prévenu.

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(*) Michel Santi est macro-économiste, spécialiste des marchés financiers et des banques centrales. Il est fondateur et directeur général d'Art Trading & Finance.
Il vient de publier «Fauteuil 37» préfacé par Edgar Morin.
Sa page Facebook et son fil Twitter.

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Commentaires 7
à écrit le 11/11/2020 à 10:15
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équilibre de la balance des paiements. C’est de cela que nous prive l’euro trop fort. Faisons un euro faible. Ca arrangera tout le monde in fine.

à écrit le 11/11/2020 à 9:29
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Ce que je lis ici me semble être un sacré 180 par rapports à d'autres écrits que j'ai pu lire du même auteur (dont je n'ai qu'une connaissance très parcellaire...) Mais oui, c'est tellement évident, tout ce qui est conçu doit l'être pour le bien de ...

à écrit le 10/11/2020 à 11:50
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La dépense publique en soi n'est ni bonne ni mauvaise: tout dépend de ce que l'on fait de l'argent; prépare-t-on un meilleur avenir, ou dépensons-nous "quoi qu'il en coute" très bêtement sans que cela ait peu d'impact sur ce de quoi demain sera fait?...

à écrit le 10/11/2020 à 11:09
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L'économie est au service de la finance, alors qu'elle devrait être au service du bien collectif. Ce qui sous entend que ce sont les citoyens qui devraient être les maîtres de l'économie et la définir en termes de besoin. Las, nous en sommes très loi...

à écrit le 10/11/2020 à 10:41
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"L'Economie" est une chose simple que "le Droit" a complexifier et complexifiera encore!

à écrit le 10/11/2020 à 8:59
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M. Santi, J'ai souvent lu vos articles avec attention. Cependant je ne crois pas que la solution aux problèmes auquel est confronté notre société, soit dans une dépense massive, une dette colossale, ou dans l'injection massive de capitaux dans ...

à écrit le 10/11/2020 à 8:52
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"Partout où va l'Allemagne, elle corrompt la civilisation" Nietzsche "Ecce Homo" S'il ne fallait qu'une seule raison, non ? Au final si on y regarde bien ben...

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