Quelle place pour l'Italian Tech en Europe ?

OPINION. En 2012, grâce à la normative « Start up Act » voulue par le gouvernement de Mario Monti, les premières startups italiennes voient le jour. Dix ans plus tard, le pays compte plus de 14.000 startups et quelques champions internationaux. Quelle est donc la place de l'Italie en Europe en termes d'attractivité et de quels moyens dispose l'Italian Tech pour rivaliser avec des champions comme la France ou l'Angleterre ? Par Edoardo Secchi, Président fondateur d'Italy-France Group et fondateur du Club Italie-France.
(Crédits : Stefano Rellandini)

Depuis la naissance en 2012, l'Italian Tech essaye de trouver une propre identité et de se tailler une place parmi les écosystèmes les plus innovants en Europe. Ce parcours n'est guère facile. La compétition est forte. Elle se joue sur le plan de l'innovation certes, mais aussi sur les investissements et sur la capacité du pouvoir public de concerter, attirer et unir tous les acteurs du changement.

En Italie, le début de l'Italian Tech a été plus compliqué et lente que dans d'autres pays. Ceci est dû au manque initial d'intérêt de la part des investisseurs qui a fortement pénalisé la croissance de l'écosystème. Il faut attendre 2018 pour voir une réelle progression qui culmine en 2021 avec des investissements record. Pour la première fois,  les startups tricolores ont levé 1,4 milliard d'euros, une valeur qui a plus que doublé (+118 %) par rapport au 2020 (669 millions d'euros). Un chiffre qui représente une transition historique pour l'écosystème, qui « franchit » enfin le seuil du milliard d'euros d'investissements.

Les investisseurs formels, c'est-à-dire des fonds de capital-risque (VC) indépendants, des fonds de capital-risque d'entreprise (CVC) et des sociétés de capital-risque gouvernementales (GVC) ou des sociétés financières régionales, confirment leur rôle de leadership avec 576 millions d'euros investis en 2021, contre 294 millions en 2020.

Les investisseurs informels qui incluent Venture Incubator, Family Office, Club Deal, Angel Network, Independent Business Angel, Equity Crowdfunding plateformes et entreprises sans fonds structuré CVC, se positionnent à la deuxième place des investisseurs avec 449 millions d'euros en 2021 contre 245 millions en 2020.

Les investisseurs internationaux se placent à la troisième place avec 435 millions d'euros investis par rapport aux 130 millions investis en 2020. Les acteurs étrangers montrent un intérêt croissant pour l'écosystème italien des startups. Les premiers investisseurs sont les États-Unis (74%), suivis de l'Europe (25%) et, dans une moindre mesure, de l'Asie (0,43%).

L'Italian tech en chiffres

L'Italian Tech est constitué par 14.362 startups, 230 incubateurs et accélérateurs certifiés, 32 investisseurs institutionnels (6 publics et 26 privés), 1.024 business angels, 40 parcs scientifiques et technologiques (37 publics et 3 privés), 65 espaces de coworking et 33 compétitions dédiées. 75 % des startups appartient au secteur des services, avec une forte tendance dans la production de logiciels et dans les services informatiques (37,4 %), dans la R&S (14,7 %) et dans le support en informatisation et portail web (8,7 %). À suivre le secteur manufacturier (16,6 %), en particulier la fabrication des machines et d'appareils (3 %), la fabrication d'ordinateurs et appareils électroniques et optiques (2,5 %), et dans le commerce (3 %). Les startups féminines représentent 12,9 % tandis que les jeunes startups de moins de 35 ans représentent 18,5 %

2012-2022 : bilan de dix ans d'activité

En 2022, l'Italian Tech fête ses 10 ans d'existence. Le bilan de ces dix ans d'activité peut certainement être considéré comme un bon départ, mais c'est n'est pas suffisant pour être compétitifs sur la scène européenne. Les grands pays qui innovent sont ceux où l'État est capable d'investir et d'apporter toutes les solutions nécessaires aux startups et aux investisseurs de se développer. La FrenchTech représente un parfait exemple de cette réussite collective.

En Italie, malgré la présence des excellents centres de recherche et d'innovation et que le pays fasse partie des dix premiers au monde par nombre de brevets déposés, la « vague startup » n'a vraiment pas été comprise et soutenue.

Cette singularité du marché est due à trois principaux facteurs :

Primo
: La plupart des entreprises italiennes ont peu utilisé et investi dans les startups comme levier innovant pour régénérer leurs business models, leurs gammes de produits ou leurs processus de production et de commercialisation.

Secundo: le manque d'une vision et d'une politique nationale capable de faciliter et de soutenir le développement de l'écosystème. Dans d'autres pays européens, les jeunes entreprises innovantes jouent un rôle central dans le débat politique. Ce n'est pas le cas en Italie. C'est le paradoxe d'un pays qui malgré son grand nombre d'entreprises, préfère soutenir son industrie, plutôt que diversifier et améliorer sa compétitivité internationale à travers ses startups.

Tertio: Le très faible nombre d'acteurs du Venture Capital ou les Business Angels et leur choix d'investir sur des entreprises déjà affirmées, avec une rentabilité sûre. Les startups qui offrent des biens et des services innovants ont peu de débouchés, car la demande intérieure est encore faible et il n'existe pas encore des commandes publiques dédiées. Les investisseurs ont donc du mal à voir des perspectives solides pour les startups.

Un clivage avec les autres pays

Toutefois, si on regarde de près le marché, on constate un certain dynamisme qui a produit des résultats intéressants. S'il est vrai qu'au niveau de l'organisation publique - comme souvent en Italie -, il y a un clivage avec les autres pays, sa classe entrepreneuriale est très compétitive. Pour compenser les inefficacités de l'État, et les entrepreneurs italiens ont développé un dynamisme et une capacité d'adaptation uniques. Et pour preuve, nombreuses sont les startups italiennes qui se sont affirmées à l'étranger telles que Hyperloop (Los Angeles), Arduino (New York), Authorea (Brooklyn), Timbuktu (Los Angeles), Tok.tv (Palo Alto), Eight (San Francisco),Funambol (Foster City), Jolla (Helsinki), Yoox (Londres) ION Trading (Londres), Mogees (Londres), Primo.io (Londres).

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