Réindustrialisation : « Le Grand Est garantit aux entreprises une énergie bas carbone » (Franck Leroy)

ENTRETIEN - Franck Leroy, ancien maire d'Epernay, a succédé il y a un an à Jean Rottner, président démissionnaire du Conseil régional du Grand Est. L'élu (ex-Horizons) dresse le premier bilan de son action à la tête de cette collectivité, dotée d'un budget de 4,5 milliards d'euros.
Franck Leroy a succédé en janvier 2023 à Jean Rottner, démissionnaire de la présidence du Conseil régional du Grand Est.
Franck Leroy a succédé en janvier 2023 à Jean Rottner, démissionnaire de la présidence du Conseil régional du Grand Est. (Crédits : DR)

LA TRIBUNE - Le Grand Est apparaît bien placé dans les statistiques annuelles de Choose France, qui classent votre région parmi les territoires les plus attractifs pour de nouvelles implantations. La réindustrialisation est-elle votre projet ?

FRANCK LEROY - 20% des projets annoncés en 2023 par Choose France se sont positionnés dans le Grand Est, alors que notre région ne représente que 11% de la population nationale. Nous sommes une région de tradition industrielle et il sera toujours plus facile de ramener de l'industrie dans ce contexte.

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Le Grand Est apparaît attractif par son positionnement international, sa capacité exportatrice très forte et son solde commercial positif. Le potentiel de production énergétique sous forme renouvelable et nucléaire fait de nous l'une des premières régions à garantir aux entreprises une énergie bas carbone.

Le Grand Est apparaît aussi comme la première région productrice de biogaz dans le panorama des gaz renouvelables de GRDF. Cette montée en puissance a-t-elle été calibrée pour compenser la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, survenue en 2020 ?

Pas vraiment. La montée de la méthanisation avait commencé avant l'arrêt de Fessenheim. La biomasse mérite davantage de valorisation qu'elle n'en a eu au cours des trente dernières années, quand le faible prix du gaz ne favorisait pas son essor. On a énormément de biomasse, d'effluents et de co-produits agricoles à valoriser. Aujourd'hui, dans tous les territoires, on fait du biogaz, de la géothermie, du solaire, de l'éolien. On a une batterie de solutions devant nous.

La région comporte entre 18.000 et 20.000 hectares de friches industrielles. Ces friches vont-elles devenir un atout, avec les obligations induites par la loi ZAN ?

Nos friches ont été qualifiées de territoires perdus et dans une majorité des cas, condamnées. Les limitations imposées d'artificialisation des sols nous obligent à y retourner. Le potentiel d'accueil pour les entreprises est considérable dans les anciens bassins industriels des Ardennes, dans l'Aube, la Haute-Marne. Les friches les plus spectaculaires se situent en Moselle, où l'activité sidérurgique et minière a laissé des traces. L'implantation de Loop à Carling-Saint-Avold, dans le recyclage des plastiques PET, correspond à cette logique.

Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, a inauguré à Metz sa tournée des COP territoriales. Quelle trajectoire avez-vous établie pour atteindre la neutralité carbone ?

Nous étions déjà lancés lorsque Christophe Béchu a initié ses consultations. L'exercice a démarré chez nous dès juillet 2023, sous le nom de planification écologique. On a devancé l'exercice, parce que notre territoire est particulièrement exposé au changement climatique. On vient de connaître la problématique de l'étiage du Rhin. Les incendies de forêts dans les Vosges n'étaient jamais survenus auparavant. Les rivières ont débordé en Moselle et dans la Meuse. Ce sont des motivations très fortes pour qu'on agisse. Si dans un avenir proche nous devions subir des canicules à 50 degrés, comme le GIEC l'a prévu, notre système ferroviaire ne fonctionnerait plus, du fait de la dilatation des caténaires et des rails.

C'est potentiellement toute la société qui risque de s'arrêter. On se doit d'être précurseur, plutôt qu'à la remorque des autres. Dans la COP territoriale, l'idée est de construire des parcours tendant vers la neutralité carbone de chacun des acteurs. Les industriels nous le demandent. Les grandes entreprises ont les yeux rivés sur leur scope d'émission carbone, qui va devenir un sujet essentiel de compétitivité.

Le prochain contrat de plan Etat-Région (CPER) promet une forte augmentation des crédits alloués au transport et 50% de projets supplémentaires. Comment allez-vous financer cet effort ?

Le volet mobilité du CPER prévoit un financement à parts égales de la région et de l'Etat, à raison de 708 millions d'euros chacun. C'est historiquement le montant le plus élevé par rapport aux contrats de plan précédents. Les financements d'infrastructures de transport comporteront aussi des contributions du Luxembourg (220 millions d'euros), de l'Allemagne et de la Suisse sur nos infrastructures transfrontalières.

Le réseau express métropolitain (Reme) de Strasbourg, dont vous êtes le principal financeur, a connu un démarrage difficile en décembre 2022. La SNCF a reconnu certaines faiblesses dans l'organisation. Où en êtes-vous dans son déploiement ?

Christophe Fanichet, président de SNCF Voyageurs, est venu dans mon bureau pour s'excuser des ratés à Strasbourg. La SNCF avait sous-estimé la complexité d'une telle montée brutale en intensité. La moindre imperfection est de nature à rejaillir sur l'ensemble. Le Reme propose actuellement entre 640 et 650 trains supplémentaires par semaine dans un rayon d'une quarantaine de kilomètres autour de Strasbourg.

On envisageait 1.000 trains supplémentaires. Les deux tiers de l'effort sont donc acquis. Il faudra aller chercher le dernier tiers, le plus compliqué. C'est difficile d'acheter les trains supplémentaires dont nous avons besoin. Le marché de l'occasion est extrêmement rare. On va acheter seize rames à la région Normandie, qui sont à mi-vie, et on va les reconditionner. Tout se jouera à quelques jours ou à quelques semaines.

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