De quoi la pollution urbaine est-elle le nom (3) ? Les maires haussent le ton

A l'heure des défis majeurs du changement climatique avec la construction urbaine à grande échelle, la pollution urbaine massive est devenue quasi permanente, et ses effets systémiques mettent en danger notre santé. Alors qu'à Paris s'enchaînent les pics de pollution, notamment celui de la semaine dernière, ce texte fait suite aux deux précédents articles écrits lors des pics massifs de mars 2014 et mars 2015.
Malgré le récent scandale de Volkswagen, l'Union européenne a décidé de donner encore un délai aux constructeurs pour limiter l'émission de polluants sur leurs moteurs diesel.

Le 14 mars 2014, un important épisode de pollution à Paris, donnait lieu à mon texte « De quoi la pollution est-elle le nom ? ». Même causes, mêmes effets, un grave pic de pollution un an après m'a conduit à écrire une mise à jour, parue le 19 mars 2015, « De quoi la pollution est-elle le nom (2)». Nous voilà maintenant le 21 mars 2016, avec cette problématique encore plus que jamais à l'ordre du jour.

A l'heure des défis majeurs du changement climatique avec la construction urbaine à grande échelle, la pollution urbaine massive est devenue quasi permanente, et ses effets systémiques mettent en danger notre santé.

Dans notre hémisphère nord, c'est l'équinoxe du printemps, le moment où le jour et la nuit partagent notre temps à parts égales. Par ses racines latines « Primus Tempus », c'est le temps nouveau, celui du beau temps à venir. Dans toutes les civilisations où le printemps arrive, c'est la fête du réveil de la terre, de sa fertilité, du renouveau après l'hiver.

Malgré le scandale Volkswagen, les constructeurs obtiennent un délai

Mais, en cette année 2016, c'est un mauvais temps qui s'annonce en Europe pour les citadins soucieux de la qualité de vie urbaine. Oui, car malgré le récent scandale de Volkswagen, l'Union européenne a décidé de donner encore un délai aux constructeurs pour limiter l'émission de polluants sur leurs moteurs diesel. Nous sommes à une marge de tolérance pour les constructeurs automobiles de 110% sur l'émission de particules fines, le NOx !

Non seulement le niveau autorisé est devenu deux fois plus important que celui préconisé par la norme Euro6, mais l'échéance d'application a été également repoussée de deux ans, à 2019 contre 2017 initialement.

Lien étroit entre pollution de l'air et espérance de vie

Faut-il encore rappeler le lien étroit entre la pollution de l'air et l'espérance de vie ? En France, l'ADEME avait émis en juin 2014 un avis sur l'émission de particules et de NOx par les véhicules routiers, rappelant qu'ils sont à l'origine de la réduction de l'espérance de vie de 8,2 mois et  de 42.000 morts prématurées chaque année.

Dans un monde urbanisé, les polluants atmosphériques, en particulier les particules, représentent un enjeu sanitaire majeur. En 2013, les conclusions d'une évaluation menée par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ont montré que la pollution de l'air extérieur était cancérigène. Le trafic routier, en particulier les véhicules diesel, est la principale source de particules PM10 et PM2,5 NOx dans les villes européennes et en général dans toutes les zones urbaines.

Pourquoi l'Europe a-t-elle pris des mesures irresponsables?

En 2013, l'étude de la qualité de l'air en Europe, publiée par l'Agence européenne pour l'environnement (AEE) a montré qu'environ 90 % des citadins de l'Union européenne sont exposés à l'un des polluants atmosphériques les plus nocifs et à des niveaux jugés dangereux pour la santé.

L'OMS avait  déjà estimé en 2011 que, chaque année, plus de 3,7 millions de personnes meurent du fait de l'inhalation de particules fines présentes dans l'air intérieur et extérieur. Les particules PM10, d'une taille égale ou inférieure à 10 micromètres, peuvent pénétrer dans les poumons, entrer dans la circulation sanguine et provoquer des cardiopathies, des cancers du poumon, des cas d'asthme et des infections des voies respiratoires inférieures.

De quoi l'Union Européenne est-elle le nom, en prenant ces mesures, irresponsables et dangereuses pour la santé de citoyens, des urbains ?

Des pigeons connectés en sentinelles de la qualité de l'air

Au même moment, la presse internationale salue l'ingéniosité d'une start-up française, pionnière dans l'alerte à la pollution urbaine, Plume Labs, qui à Londres vient de lancer la « Pigeon Air Patrol », de pigeons connectés pour collecter en temps réel de l'information sur la qualité de l'air.

La question se pose à tous, de quel droit l'Union européenne décide de nous prendre pour des pigeons, mais de ceux qui allons subir les conséquences sur notre santé, et celle des générations à venir, pour satisfaire un lobby, qui s'accroche à un monde moribond mais qui résiste ?

Faudra-t-il apprendre à lire à nos responsables, pour prendre connaissance de l'étude financée par l'Union Européenne « Aphekom » et ses drastiques conclusions Improving Knowledge and Communication for Decision Making on Air Pollution and Health in Europe ?

Lauréat  de « European Health Award 2013 » et amplement commenté, il a été mené dans 12 pays européens par plus de 60 scientifiques de juillet 2008 à mars 2011 et les études ont été prolongées depuis. L'évaluation de l'impact sanitaire dans 25 grandes villes européennes montre que l'espérance de vie pourrait augmenter jusqu'à 22 mois pour les personnes âgées de 30 ans et plus (en fonction de la ville et du niveau moyen de pollution), si les niveaux moyens annuels de particules fines PM2,5 étaient ramenés au seuil de 10 microgrammes par mètre-cube, valeur guide préconisée par l'OMS.

Plus de 31 milliards d'euros d'économies en dépenses de santé à la clé...

Cette étude montre que diminuer davantage les niveaux de particules fines dans l'air des villes européennes entraînerait un bénéfice non négligeable aussi en termes de réduction des coûts pour la santé avec 31,5 milliards d'euros (diminution des dépenses de santé, de l'absentéisme, et des coûts associés à la perte de bien-être, de qualité et d'espérance de vie).

Elle démontre également qu'habiter à proximité du trafic routier augmente sensiblement la morbidité attribuable à la pollution atmosphérique.

20 maires de villes européennes, à l'initiative de la Maire de Paris Anne Hidalgo, se sont insurgés contre cette décision : Paris, Madrid, Bruxelles, Vienne, Stockholm, Milan, Barcelone, Copenhague, Budapest, Athènes.. Au travers d'une tribune commune, ils ont pris leurs responsabilités en tant qu'autorités de grandes métropoles, pour s'opposer à ce moratoire. Ils ont lancé également un appel à la mobilisation citoyenne, via une pétition internationale, transculturelle, multi langue, à signer pour exprimer  un non ferme à une telle décision :

« Comment protéger notre santé si l'Union européenne valide un permis de polluer au détriment de la santé publique ? Que doivent comprendre les parents dont les enfants souffrent de problèmes respiratoires aigus, les personnes âgées et les plus fragiles? Doivent-ils comprendre que leur gouvernement a préféré la santé de l'industrie automobile à la leur ?

Nous demandons donc aux gouvernements européens, d'user de tous les moyens juridiques et politiques en leur pouvoir, afin de garantir que les normes de pollution de l'air en Europe soient appliquées dans toutes les industries. Notre santé en dépend».

Change.org, la plateforme de la mobilisation citoyenne

C'est un fait  nouveau, à l'ère de l'ubiquité, que des Maires s'engagent dans une démarche de mobilisation citoyenne par le biais d'une plateforme, telle change.org. C'est aussi un signe du temps qui change, du siècle des villes, des maires en réseau, des actions communes et concertées impliquant aussi les citoyens.

Après le succès de la mobilisation des Maires, à l'occasion de la COP21, de l'action décidée des organisations des villes telles C40 Cities, pour faire pression afin que les accords de la COP21 deviennent une réalité, nous pouvons nous réjouir de cet engagement.

Du nord au sud et de l'est à l'ouest de la planète, la pollution urbaine, la mauvaise qualité de l'air, l'ambiance de plus en plus irrespirable de nos villes, sont devenus des problèmes majeurs qui menacent très sérieusement, non seulement notre qualité de vie citadine, mais surtout notre vie tout court.

Ce n'est plus un appel au réveil de la conscience sociale urbaine ! Il s'agit de mener une bataille citoyenne, transnationale pour changer le cours des choses, face à l'aggravation de la situation et à l'incurie des décideurs qui se complaisent à préserver l'ordre urbain d'un vieux monde dépassé, au service de la toute puissance de l'énergie fossile, de véhicules à essence, de la ville livrée aux voitures, qui occupent l'essentiel de l'espace public.

La ville est un organisme vivant, qui, par définition, ne l'est que si elle possède sa respiration... une respiration propre, dans tous les sens du terme !

A nous tous de nous mobiliser !

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Commentaires 4
à écrit le 26/03/2016 à 10:14
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Bien sur on ne parle pas de la pollution des freins qui déversent 24 000 tonnes de polluant par an dans Paris. Depuis decembre 2015 il existe une solution 100% française récupératrice des poussières. MAIS il faut pas remettre en cause les industries ...

à écrit le 24/03/2016 à 10:25
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AUTREFOIS DANS NOS VILLAGES ET LE LONG DES ROUTES IL Y AVAIS DES ARBRES SURTOUS DES PLATANES ? AUJOURDHUI NOS VILLES NE SONT QUE DU BETONS ET DES VEHICULES A MOTEURS? LE BON SENS VOUDRAIS QUE L ON REPLANTES DES ARBRES EN VILLES POUR ASORBE LE GAZ CAR...

le 27/03/2016 à 9:37
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Vous avez peut être raison, mais si vous écriviez normalement (pas tout en majuscules) vous seriez plus lisible !

à écrit le 23/03/2016 à 7:53
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Quid de la pollution agricole. Auto moto annonçait qu'il y aurait des pics de pollutions liés à l'épandage d'engrais en mars avril surtout si les vents sont à l'est ? cela se vérifie et comme toujours le seul coupable c'est l'automobiliste et surtout...

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