Athlétisme : embouteillage sur le marathon féminin

Motivées par la perspective des JO à domicile, les meilleures fondeuses françaises ont investi la légendaire distance. Cinq ont validé les minima, trois se disputent le dernier ticket.
À gauche : Mekdes Woldu lors du marathon de Valence, début décembre. À droite : Méline Rollin lors de celui de Séville, mi-février.
À gauche : Mekdes Woldu lors du marathon de Valence, début décembre. À droite : Méline Rollin lors de celui de Séville, mi-février. (Crédits : © LTD / STADION ACTU/MAXPPP)

Il fallait de l'imagination, il y a trois ans, pour envisager un finish aussi serré. À trois semaines de la fin de période de qualification pour le marathon des JO de Paris 2024, cinq coureuses tricolores ont déjà validé les minima - 2 h 26' 50" - pour trois tickets à saisir, alors que la France n'a jamais compté plus d'une représentante lors des quatre derniers Jeux olympiques. La Fédération française d'athlétisme (FFA) ayant choisi de favoriser les deux meilleures au 31 janvier, Mekdes Woldu et Mélody Julien sont déjà présélectionnées : elles ont réalisé respectivement 2 h 24' 44" et 2h 25' 01" à Valence (Espagne) en décembre.

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Record de France

Mais derrière, la concurrence pousse. Méline Rollin, 25 ans, a frappé fort le 18 février à Séville (Espagne) en battant le record de France de Christelle Daunay, vieux de quatorze ans, en 2 h 24' 12". Minima en poche depuis décembre, Manon Trapp et Fadouwa Ledhem se voient contraintes de courir de nouveau et de viser le record national pour espérer décrocher le dernier billet. La première a prévu de s'aligner à Rotterdam (Pays-Bas) dans une semaine, la seconde à Hambourg (Allemagne) le 28 avril. « La perspective de participer à des Jeux à domicile les a motivées, avance Christelle Daunay, championne d'Europe en 2014. Le marathon est une discipline légendaire, avec des minima plus abordables que ceux du 10 000 mètres. »

Titillée par le rêve des anneaux, la triple championne de France de cross Manon Trapp s'est décidée à l'été 2023. « Le cross n'est pas une distance olympique et, comme j'ai toujours aimé le long mais pas la piste, j'ai pensé au marathon, explique la Savoyarde de 23 ans. Je n'imaginais pas m'y mettre si tôt, mais quand j'ai vu des filles qui étaient à peu près de mon âge s'y essayer, j'ai décidé de ne pas attendre. On a toutes envie d'aller aux Jeux, donc on s'est toutes imposé une rigueur qui paie aujourd'hui. Sans cette émulation, je n'aurais jamais visé le record de France si tôt. » Ce à quoi l'Ardennaise Méline Rollin, consciente que plus la distance s'allonge, plus ses qualités s'expriment, répond en écho : « S'il n'y avait pas eu les filles, je n'aurais pas battu le record de France. »

S'il n'y avait pas eu les filles, je n'aurais pas battu le record de France

Méline Rollin

Mélody Julien a été précurseur. En 2021, à seulement 22 ans, elle a été la première des cinq à monter sur 42,195 kilomètres. Un an plus tard, elle termine 14e des championnats d'Europe et commence à percevoir Paris 2024 comme un horizon atteignable : « Mon entraîneur a été pas mal critiqué, car j'étais vue comme trop jeune pour passer sur marathon, mais il était convaincu dès le début que je pouvais viser les JO. Et moi, ça me plaisait. » Sans le savoir, elle ouvre la voie et tord le cou à l'idée communément répandue selon laquelle le marathon est uniquement un prolongement de la carrière sur piste.

Pic physiologique atteint de 25 à 30 ans

« Aujourd'hui, c'est une épreuve vraiment respectée, souligne Lahcen Salhi, responsable du suivi des marathoniens à la FFA. Pendant longtemps, les coureurs passaient leurs meilleures années sur des épreuves courtes et arrivaient sur marathon au moment où ils ne progressaient plus. » Avec un pic physiologique atteint de 25 à 30 ans, une bascule plus précoce qu'autrefois laisse espérer une optimisation des performances, selon l'entraîneur. Il y a l'approche, et il y a la technologie. L'arrivée des chaussures à plaque carbone, qui amortissent davantage, facilite également le passage aux longues distances sur route. « L'entraînement cause moins de dégâts, on part plus facilement sur sa séance le lendemain », apprécie Christelle Daunay.

« On ne pensait pas que les jeunes seraient aussi motivées et engagées »

Quoi qu'il en soit, la densité des résultats a surpris du côté de la FFA, qui a pourtant fait « en sorte que le feu prenne » il y a trois ans. « On est partis de loin, admet Lahcen Salhi. En 2021, on n'avait aucune fille capable de courir les minima. » Pour créer un collectif et susciter des vocations, des rassemblements en Vendée ont alors été mis sur pied. La Fédération y invite les meilleurs marathoniens tricolores et des coureuses présentant un potentiel intéressant sur des distances inférieures. « On savait qu'il était possible de qualifier une ou deux filles pour Paris 2024, mais on ne pensait pas que les jeunes seraient aussi motivées et engagées », indique avec satisfaction le référent de la FFA. Qui, revers de la médaille, est désormais ennuyé de devoir laisser à la porte des JO des « athlètes méritantes ».

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