Pourquoi Numericable peut séduire les investisseurs

Le câblo-opérateur, qui a renoué avec la croissance grâce à sa Box et à la fibre, profite d’un climat boursier favorable au secteur en Europe pour lancer son processus d’introduction. Entre attrait spéculatif sur fond de concentration et visibilité des résultats, les analystes financiers sont confiants dans le succès de l’opération.
Delphine Cuny
Eric Denoyer, le PDG de Numericable, assure que la dette n'est plus un sujet.

Oubliés, les souvenirs cuisants du désastreux plan Câble, les couacs du service client de Noos, l'image un peu vieillotte de l'Internet des HLM... C'est un Numericable nouveau qui va se présenter aux investisseurs dans les semaines qui viennent. Dès ce jeudi, comme l'a révélé le site BFM Business, les dirigeants du câblo-opérateur français vont entamer leur opération séduction auprès des analystes financiers. « On aura deux semaines pour envoyer notre rapport d'évaluation de l'entreprise » confie l'un d'eux, sous couvert d'anonymat, du fait de l'engagement de confidentialité qu'il a dû signer.

L'introduction en Bourse, à Paris, serait prévue sous un mois, courant octobre. On évoque une valorisation de 3 milliards d'euros (hors dette, après fusion avec la société sœur de services aux entreprises Completel) et d'un placement d'environ 30% du capital. Le prix proposé sera clé comme dans toute introduction mais « on peut d'ores et déjà prédire que ce sera un succès » avance un expert des télécoms. Car la demande est là.

Un business moins risqué que le mobile

« Les câblos plaisent aux investisseurs car c'est un business un peu plus sécurisé que le mobile », observe cet analyste londonien. Un profil apprécié en particulier en France où la rentabilité de Bouygues Telecom, SFR et Orange a sérieusement chuté depuis l'arrivée de Free Mobile. « Le marché aime la visibilité des investissements et des cash-flows des câblo-opérateurs, ainsi que la hausse prévisible du taux de pénétration, des parts de marché » fait valoir un autre expert. Les comptes de Numericable, contraint par les clauses de ses emprunts (covenants) sont du coup réglés comme une horloge : 101 millions d'euros d'investissement au premier semestre 2013, pile comme au premier semestre, et 230 millions d'excédent brut d'exploitation (Ebitda) sur le semestre, comme en 2012. Soit une marge brute opérationnelle de 50,7% à faire pâlir d'envie d'autres opérateurs télécoms.

 

« Les investissements sont pour l'essentiel derrière nous, le commerce est devant nous. Numericable n'est plus un LBO [leverage buy-out, rachat par endettement NDLR], la dette n'est plus un sujet » avait fait valoir le PDG, Eric Denoyer, en mars dernier.

 

Aspect spéculatif d'une possible fusion avec SFR… ou un autre

Au-delà de la régularité des résultats, il y a bien sûr le mouvement général de concentration du secteur en Europe, qui a pour l'instant épargné la France : rachat en cours de Kabel Deutschland par Vodafone pour 7,7 milliards d'euros, du britannique Virgin Media par l'américain Liberty Global pour 23 milliards de dollars, montée de Liberty au capital du néerlandais Ziggo. « Il y a un parfum de M&A (merger & acquisition) qui plaît », reconnaît un analyste. « Tout le monde va jouer la consolidation avec SFR », parie un autre. « Avec SFR ou un autre opérateur » (Bouygues ou Free) ajoute un de ses confrères qui souligne « le mouvement de convergence technologique du fixe et du mobile » dans lequel s'inscrit cette dynamique de concentration. « Le marché redécouvre les charmes du fixe, des beaux actifs de réseau », autrefois boudés par les investisseurs.

Rattraper le train de l'Internet haut débit et de l'explosion des usages

Un engouement dont les homologues européens de Numericable ont déjà bénéficié. Mais « l'histoire commerciale des câblo-opérateurs en Europe n'a pas été toute rose. Ils ont tous plus ou moins loupé le coche de l'Internet haut débit, parce qu'ils étaient surendettés, et sont restés cantonnés à la télévision. Ils ont construit des autoroutes qui sont restées presque vides » observe un expert. Désendettés, les câblos accélèrent sur le plan commercial et profitent de l'appétit pour le haut débit, de l'explosion des usages pour rattraper le train du « broadband. » L'equity story, l'histoire qu'une entreprise doit « raconter » aux investisseurs pour les séduire, est donc déjà quasi écrite pour Numericable, en quelque sorte. Aux yeux des investisseurs, il y a « un pari à jouer sur la conquête de part de marché. » Une histoire de come-back.

 

Retour de la croissance, mais petit parc d'abonnés

Quid de la mauvaise image dont a pu souffrir Numericable, héritée des déboires de Noos après des bugs en série du service client en 2006 ? « Le chiffre d'affaires progresse, le parc de clients aussi, ce qui montre que tout ceci est oublié » considère un analyste. Numericable a en effet renoué avec la croissance depuis l'an dernier, certes encore modestement (+1,1% en 2012 et +3,8% à fin juin 2013). Sa base d'abonnés s'accroît, surtout grâce aux clients sous marque blanche, c'est-à-dire à la BBox de Bouygues Telecom qui loue le réseau de Numericable (pour une partie du territoire).

Les clients traditionnels à la TV seule, l'activité historique du câblo, diminuent (ils sont encore 328.000, soit plus que le nombre de clients BBox sur son réseau 320.000), dans le même temps ceux au service « multiplay » (TV+ internet et/ou téléphonie fixe) augmentent, notamment grâce à sa Box dans le haut des standards technologiques du marché, et viennent de franchir le cap symbolique du million. Ce qui reste peu sur un marché du haut et très haut débit de plus de 24 millions d'abonnés en France : Bouygues Telecom, parti tard sur le fixe, a déjà près du double de clients que son partenaire (1,9 million à fin juin) et Free cinq fois plus. Mais Numericable peut se prévaloir d'être le leader français du très haut débit (fibre jusqu'en pied d'immeuble puis du câble coaxial) avec 1,3 million d'abonnés (y compris sous marque blanche), soit les trois quarts du marché selon les derniers chiffres du gendarme français des télécoms

Delphine Cuny

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Commentaires 18
à écrit le 18/09/2013 à 11:12
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l'aberration est que numéricble bénéficie d'un monopole, il a 4 millions de prises FTTLA (fibre + coax jusqu'à l'appartement), en situation de monopole puisque le client final est prisonnier, il ne peut pas accéder aux autres FAI. et étrangement, le ...

le 18/09/2013 à 12:11
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tout à fait excat, il y a des bulles assises sur des avantages particuliers, et qui vont exploser, sans parler des géants des télécom, ZTE, ATT et d'autres, qui s'intéressent de prés aux leaders investisseurs affaiblis par ces avantages qu'ils doiven...

le 18/09/2013 à 12:27
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Il ne faut pas dire n'importe quoi. Numericable est en monopole parce que Noos, Orange etc ont vendu leurs réseaux cablés à Numéricable. Le régulateur ne s'est pas opposé à ses fusions. Le dégroupage du cable existe .. cela s'appelle Bouygues, la fib...

le 18/09/2013 à 17:13
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@Scooter Le dégroupage n'a aucun sens pour Numericable car ses partenaires commerciaux ne disposent d'aucun réseau. Ce ne sont que des opérateurs virtuels!

le 18/09/2013 à 17:49
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??? je suis d'accord avec vous pour Auchan et Darty mais pas du tout pour Bouygues Telecom. vous pensez que Bouygues Telecom n'a pas de réseau fixe et qu'il ne se connecte pas aux NRA de France Telecom (pardon Orange) ?? vous pensez qu'ils n'ont p...

à écrit le 17/09/2013 à 17:37
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Numericable c'est has been! Le VDSL2 n'en fera qu'une bouchée.

le 18/09/2013 à 8:08
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Je doute que le VDSL2 soit un gros succès en France .. il n'est pas encore déployé et quel intérêt ? puisque le déploiement de la fibre avance et que Numéricable a 5M de prises qui font du 100 M...

le 18/09/2013 à 11:06
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le VSL utilise les paires de cuivre existantes alors que la fibre demande de très gros investissements, et c'est bien la logique similaire de numéricâble que d'utiliser le coax existant dans les appartements. quand aux tarifs, pour le moment ils sont...

le 18/09/2013 à 12:20
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le VDSL ne porte que sur 1000 1500 mètres le réseau cable de numéricable a déjà 10 M de prises dont 5M en Doscis 3.0 une fois le réseau harmonisé (cela a été fait en 2007/2009) l'upgrade en Docsis 3.0 ne coute pas plus cher que le VDSL Et puis en ca...

le 18/09/2013 à 17:08
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@Scooter Avoir 200 Mb/s sur le papier c'est bien, en pratique c'est mieux. Hélas la plupart des serveurs sur la toile n'est guère accessible à plus de 100 Mb/s si vous êtes le seul connecté. Même si vous n'avez pas 100 Mb/s en VDSL2 vous y gagnez se...

à écrit le 17/09/2013 à 12:24
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Attendre et voir// Les clients qui ont besoin d'une ligne de très haut débit ne sont pas ceux des hlm, mais ceux qui vivent dans des lotissements. En effet, d'abord ils n'hésitent pas à payer plus cher (50/60 euro est acceptable voire plus) d'abord c...

à écrit le 17/09/2013 à 8:46
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En tant que client je suis inquiet, car la pression pour augmenter le cash et les marges va encore augmenter, ils ont une énorme rentabilité car ils ont viré presque tout leur personnel qualifié et embauché le reste à la com. Une situation qui handic...

à écrit le 17/09/2013 à 6:59
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je ne suis pas sur que les clients de Numericable se ruent sur le "papier" surtout s'il ont ete confronte a l'inertie de leur SAV et de leur call center basé au Maroc ...

à écrit le 17/09/2013 à 6:59
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je ne suis pas sur que les clients de Numericable se ruent sur le "papier" surtout s'il ont ete confronte a l'inertie de leur SAV et de leur call center basé au Maroc ...

à écrit le 17/09/2013 à 1:46
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Ca sent la colle à plain nez. Les fonds de private equity cherchent par tous les moyens à sortir de leur investissement et n'ont rien trouvé d'autre que de refiler le bebe aux gogos de la bourse. Numericable nous a habitué aux annonces qui font Flop ...

le 17/09/2013 à 6:43
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Vous êtes sévère. Le Numericable d'aujourd'hui n'a rien à voir avec celui des années 2005/2007. Par ailleurs, si vous parleez de bourse, regardez les parcours boursiers des auters cablo en Europe (entre +25 et +60% depuis le 1er janvier). Cdt, Sco...

le 18/09/2013 à 2:12
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precisement! les gesticulations de NC (fu¥usion sfr, rachat de free, etc... sont regulieres depuis " a # ans. La seule vrai raison est que leurs fonds actionnaires veulent realiser leur investissement et profiter de la hausse recente du secteur. ca n...

le 18/09/2013 à 8:05
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Peut-on reprocher à des actionnaires qui ont porté le fardeau de Numericable/Noos pendant 6 ans de chercher à vendre une partie de leurs participations .. les actionnaires (petits et grands) ne seront pas forcés d'acheter !!

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