La lutte contre le cancer à l’aube de la révolution de l’IA

Du dépistage précoce aux nouvelles thérapies, l’intelligence artificielle porte la promesse de meilleures chances de guérison face au cancer. Mais ces technologies ne sont pas sans risques face aux attaques cyber. Un thème vivement débattu lors de la première édition du forum « Impacts Santé » organisé par La Tribune.
La table ronde « IA : pour le meilleur et pour le pire ? » lors de l'événement Impacts Santé du 25 avril, organisé par La Tribune.
La table ronde « IA : pour le meilleur et pour le pire ? » lors de l'événement Impacts Santé du 25 avril, organisé par La Tribune. (Crédits : Georges Vignal/La Tribune)

C'est l'un des champs qui ouvrent grand les bras à l'intelligence artificielle (IA). La santé, en général, et la lutte contre le cancer en particulier, pourraient en effet bénéficier de son vaste potentiel, de diverses manières. « Si l'on peut augmenter le médecin, on va pouvoir garantir à chaque patient la meilleure chance [de guérison] », assure Emmanuel Bilbault, cofondateur et directeur général de Posos, une start-up à l'origine d'un outil de gestion de la prescription assistée par l'IA et destinée aux soignants qui prescrivent, délivrent et administrent les médicaments. Comment, concrètement ?

« Nous arrivons à consolider énormément de connaissances scientifiques à partir d'un grand nombre de sources différentes et les croiser avec les données du patient », explique le dirigeant de cette jeune pousse de la medtech qui a récemment obtenu pour sa solution l'agrément de la Haute autorité de santé. Une solution qui permet de formuler une recommandation personnalisée sur les médicaments à prescrire et les dosages à adapter.

Retrouvez en vidéo l'entretien « Lutte contre le cancer : à l'aube d'une révolution ? » lors de l'événement Impacts Santé du 25 avril.

L'acuité de l'IA

Plus largement, et en oncologie notamment, l'IA promet bien des avancées. Dans le diagnostic, d'abord, à travers l'imagerie médicale qui permet de détecter des lésions précoces, de même qu'en biologie. Puis, « à l'étape de la réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP), où les soignants doivent recouper beaucoup d'informations biologiques, histopathologiques, sur les antécédents... pour prendre une décision de stratégie thérapeutique, l'IA peut permettre de croiser de plus en plus d'informations, de retrouver des patients similaires et de voir quels effets les médicaments ont eu sur eux, pour ensuite guider les médecins », avance Emmanuel Bilbault.

« Dans une radio, l'IA va pouvoir détecter des signaux faibles que l'humain ne voit pas à l'oeil nu, des amalgames de pixels répétés dans un grand nombre de données », explique par ailleurs Laurence Devillers, professeure à la Sorbonne et chercheuse au CNRS. « Elle a une acuité que nous n'avons pas. C'est cela son intérêt premier », dit-elle.

Les pièges : des biais au risque cyber

Reste qu'elle pose de réels problèmes. « Vais-je suivre les décisions de la machine ou celles de l'humain ? Il y a des prises de position dangereuses disant que la machine est meilleure que l'humain », estime Laurence Devillers. Autre piège, « les systèmes qui arrivent dans les mains de personnes qui ne sont pas expertes, ne sont en fait que des black box. C'est donc un danger parce qu'on peut les utiliser de façon non optimale et ils peuvent comporter intrinsèquement des biais », prévient la chercheuse. Et de s'alarmer, par ailleurs, du risque cyber. « Pourquoi les hôpitaux se font hacker ? Il y a des problèmes de cybersécurité évidents sur les données. Pourquoi le gouvernement ne prend-il pas la mesure de ce danger ? », assène-t-elle.

Retrouvez en vidéo et en podcast la table ronde « IA : pour le meilleur et pour le pire ? » lors de l'événement Impacts Santé du 25 avril.

« Cela fait vingt ans qu'on a déployé massivement des logiciels à l'hôpital sur des infrastructures numériques qui petit à petit deviennent sensibles du fait de l'accumulation de projets. Nous sommes face à une situation où l'on a accumulé une dette technologique dans un environnement géopolitique international où la menace est devenue croissante », rétorque Hela Ghariani, coresponsable du numérique en santé à la Délégation du numérique en santé (DNS). Un plan de financement a ainsi été lancé l'an dernier pour armer les établissements face à ce danger. « Plus de 1 200 établissements vont bénéficier de financements pour renforcer ce pilier technologique », affirme-t-elle.

Faire émerger un écosystème français

Autre écueil pointé par Laurence Devillers, le caractère énergivore de l'intelligence artificielle. Enfin, l'auteure de l'ouvrage « Les robots émotionnels » déplore ce qu'elle considère comme un manque de vision politique. « Quel est le grand plan en France sur ce que nous voulons faire en santé ? Le scandale premier est que cela ne paraît pas être un sujet prioritaire », fustige-t-elle. Sa recette : inclure des scientifiques et « déployer nos propres outils » face aux géants américains qui dominent l'intelligence artificielle. Justement, « nous essayons de faire émerger un écosystème industriel français et nous faisons en sorte de mettre à disposition des données massives pour que nos acteurs français puissent développer des algorithmes », riposte Hela Ghariani.

De son côté, Emmanuel Bilbault a des idées sur les freins à lever. « Aujourd'hui, la commande publique n'est pas orientée vers l'innovation dans les soins », observe-t-il. Or « pour créer des champions en France, nous avons précisément besoin d'une commande publique forte. Et des hôpitaux qui, plutôt que de faire des économies, orientent les investissements vers la qualité ».

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Commentaires 4
à écrit le 30/04/2024 à 9:53
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La lutte contre le cancer devrait commencer par un diagnostic général sur les raisons de ces "épidémies" qui nous agressent en ce début de siècle? L'IA peut-elle y aider? Le nombre de cancers ne baisse pas. On nous a fait croire que ce nombre était l...

le 30/04/2024 à 12:47
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Si le nombre ne baisse pas les diagnostics sont plus affinés , tout comme les traitements qui de ce fait sont moins longs et agressifs et le rétablissement plus rapide avec moins de séquelles et pour finir un meilleurs suivi pour éviter les récidi...

à écrit le 30/04/2024 à 8:02
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En effet la robotique associée à la puissance de calcul du deep learning devrait enfin faire progresser une médecine que les laboratoires pharmaceutiques ont fait régresser. Pourquoi ? Parc eque l'on ne pardonnera jamai à un robot de faire une seul e...

à écrit le 30/04/2024 à 7:55
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L'IA nous donne t elle ncore le droit d'être sceptiques?

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