Formation : 360Learning lève 36 millions d'euros pour conquérir les Etats-Unis

Déjà leader du marché de la formation BtoB en France avec plus de 1300 clients, la scale-up parisienne part à l'assaut du marché américain et britannique. Pour se distinguer de la concurrence, le "Instagram de la formation" mise sur une approche collaborative. L'objectif : créer une émulation autour de la formation en mobilisant les "sachants" de l'entreprise pour les transformer en vecteurs de sa transformation digitale.
Sylvain Rolland
Le succès de 360Learning s'explique par une approche originale, basée sur l'apprentissage en collaboration, ou collaborative learning.
Le succès de 360Learning s'explique par une approche originale, basée sur l'apprentissage en collaboration, ou "collaborative learning". (Crédits : DR)

Quel est le potentiel de l'intelligence artificielle et son impact sur mon secteur d'activité ? Que change cette nouvelle réglementation bancaire dans mon approche métier ? Comment fonctionne ce nouveau logiciel développé en interne ? Prises dans la spirale de la révolution numérique et des innovations technologiques, les ETI et les grands groupes changent à grande vitesse et doivent sans cesse former leurs salariés aux nouveaux enjeux. Ce marché, le "e-learning professionnel", est en plein essor depuis quelques années. Ses nombreux acteurs, qu'ils soient startups ou grands groupes, l'abordent principalement de deux façons : soit en privilégiant la technologie -curation des meilleurs contenus d'apprentissage comme SAP ou Salesforce- soit en misant tout sur le contenu, en fournissant aux grands groupes des modules de formation adaptés à leurs besoins.

Un peu à l'écart de cette jungle se tient la startup parisienne 360Learning. Créée en 2009 par Nicolas Hernandez et Guillaume Alary, la pépite de 149 salariés annonce mercredi 17 avril le succès de sa deuxième levée de fonds, d'un montant de 41 millions de dollars (36 millions d'euros environ). Pour cette Série B, la startup a fait appel au fonds Large Ventures de Bpifrance, ainsi qu'aux fonds français Hi Inov, XAnge, Educapital et Isai.

Un "Instagram de la formation"

Son premier tour de table, de seulement 1,2 million d'euros, date de 2013. Depuis, la startup s'est taillée en toute discrétion la part du lion en France. Leader hexagonal de la formation BtoB, 360Learning revendique aujourd'hui 1300 clients et organismes de formation, dont près de la moitié du CAC40. Du côté des entreprises, la pépite parisienne cible uniquement des grands groupes et des ETI de plus de 1000 salariés. Son modèle est celui du SaaS (software as a service), un abonnement annuel ou pluriannuel de plusieurs dizaines de milliers d'euros en moyenne.

Son secret ? Une approche originale basée sur l'apprentissage en collaboration, ou "collaborative learning". "Les gens ne veulent pas apprendre seuls avec une machine. Quant aux serious games et à la surenchère graphique des vidéos animées ou de la réalité virtuelle, ça ne marche pas", tranche Nicolas Hernandez, le CEO de 36 ans. Partie du constat que la formation en entreprise est restée archaïque, la startup propose une plateforme technologique qui permet à chaque collaborateur de créer facilement du contenu pédagogique -quelques fiches, un quizz, des visuels simples- que les autres employés lisent en quelques minutes maximum. Pas besoin d'acheter des contenus : ils sont fabriqués en interne, par les employés et pour les employés:

"La collaboration avec les pairs est le meilleur moyen d'apprendre. L'idée est de repérer les 2% à 5% d'employés qui détiennent des connaissances et sont capables de les transmettre, pour les transformer en leaders capables de partager leur savoir pour faire progresser l'ensemble de l'entreprise", précise Nicolas Hernandez.

Sur la plateforme, chaque employé peut réagir aux contenus. Un forum de discussions, lieu d'échanges et de questions/réponses, permet en outre de repérer les futurs apprenants en valorisant les meilleures contributions. La plateforme peut ainsi servir à partager la connaissance produit, à informer les collaborateurs sur la concurrence et l'évolution du secteur, à expliquer les innovations technologiques de l'entreprise comme par exemple une nouvelle IA dans la relation client, à partager l'expertise métier et les nouveaux process.

Nicolas Hernandez estime que l'aspect collaboratif est le principal avantage comparatif de l'entreprise. Pour Antoine Izsak, directeur d'investissement du fonds Large Venture, 360Learning est à la formation ce que le réseau social Instagram est à la photo.

"Les partages de photos se sont démultipliés sur Instagram car la technologie s'est effacée derrière l'usage. Les utilisateurs disposent d'un outil d'édition de photos très simple et il y a aussi un aspect collaboratif, d'échange et de partage. 360Learning fait la même chose avec la formation : il devient très simple de produire ses propres contenus alors que c'était cher et long auparavant, et d'impliquer une communauté autour d'eux. C'est cette vision humaine de la formation qui nous a convaincu d'investir", explique-t-il.

Doubler le nombre de clients, conquérir les Etats-Unis et le Royaume-Uni

Grâce à cette levée de fonds, 360Learning va pouvoir encore accélérer. Depuis le début de l'année 2018, la scale-up [startup en hyper-croissance, NDLR] est passée de 60 à presque 149 employés, avec des recrutements toutes les semaines dans ses locaux, bientôt trop exigus, du XVIè arrondissement de Paris. "Nous serons 240 à la fin 2019, dont 180 à Paris, 35 à New York et 25 à Londres", anticipe Nicolas Hernandez.

Depuis huit mois, la pépite tricolore a ouvert un bureau aux Etats-Unis. "Dans le secteur du logiciel BtoB, pour devenir un géant et le rester, il faut obligatoirement aller aux Etats-Unis", estime l'investisseur Antoine Izsak. Effectivement, 360Learning peut se targuer d'être une belle scale-up leader de son marché en France, mais elle reste une petite startup à peine sortie du nid aux Etats-Unis, où elle ne pèse pas grand-chose et ne compte qu'une quinzaine de clients. "Il était donc un peu tôt pour choisir des fonds américains, mais ce sera sûrement à l'ordre du jour de la prochaine levée", ajoute Nicolas Hernandez.

L'entrepreneur compte recruter des pointures du marketing et du commerce pour conquérir les marchés américain et anglais, tout en évitant la concurrence frontale avec les "Gafa du BtoB", c'est-à-dire les Salesforce et autre SAP, devenus des partenaires en raison d'un positionnement différent. Quant à la France, la phase de conquête est loin d'être terminée. Nicolas Hernandez estime que sa plateforme de e-learning peut intéresser 8.000 entreprises. Il reste donc une grande marge de progression.

Sylvain Rolland

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