« L'ordinateur est mort, vive l'ordinateur » (Emmanuel Freund, Blade)

La rédaction de La Tribune remet tous les ans à l'occasion de sa soirée nationale de remise des prix des jeunes entrepreneurs "10 000 startups pour changer le monde" un prix spécial "entrepreneur de l'année". Pour l'édition 2018, nous avons choisi de distinguer Blade, qui est en train de révolutionner l'informatique personnelle avec son Shadow, le premier PC dématérialisé dans le cloud. Entretien avec l'un des trois cofondateurs, Emmanuel Freund.
Emmanuel Freund, cofondateur et président de Blade.
Emmanuel Freund, cofondateur et président de Blade. (Crédits : DR)

« Votre dernier PC ». C'est avec ce slogan que Blade, startup parisienne créée en 2015 par les ingénieurs Emmanuel Freund, Stéphane Héliot et Asher Criou, compte conquérir le monde. Son Shadow, le premier PC dématérialisé dans le cloud, prend la forme d'un simple boîtier, que l'on branche à n'importe quel écran (PC, smartphone, console...). Une application permet de retrouver son PC et tous ses programmes partout, sur n'importe quel support, à condition - pour l'instant - de pouvoir se connecter à Internet. Car le Shadow est dématérialisé : tous les composants, fruits de partenariats avec des géants comme AMD, Nvidia et Microsoft, sont hébergés dans des data centers et accessibles via le cloud. Autrement dit, avec le Shadow, même un smartphone ou un ordinateur portable d'entrée de gamme peut devenir le meilleur PC du monde.

C'est pour récompenser une ambition hors du commun et la croissance exceptionnelle de leur société que La Tribune a décidé de primer les trois cofondateurs visionnaires de Blade en tant qu' Entrepreneurs de l'année. Une distinction entièrement méritée : en 2017, Blade a levé 51 millions d'euros (pour un total de 64 millions en seulement 24 mois), s'est déployé en France et a lancé sa conquête du monde, notamment des États-Unis. Pour Emmanuel Freund, 40 ans, le champ des possibles de Blade est « exponentiel », car la startup incarne un véritable "shift technologique". En effet, Blade transforme l'usage du PC, qui devient un service sur abonnement "à la Netflix", toujours à la pointe de la technologie, et qui consacre la fin de l'obsolescence. Bien sûr, Blade est encore loin d'avoir tué le PC, comme le rêverait Emmanuel Freund. Les défis et les périls sont encore nombreux. Mais la jeune pousse affiche son ambition de devenir un géant, peut-être celui que l'Europe du numérique attend désespérément depuis plus d'une décennie. Interview exclusive d'une future licorne.

LA TRIBUNE - Blade est né en 2015 avec l'ambition d'inventer, avec le Shadow, le PC du futur. Moins de trois ans plus tard, vous avez attaqué le marché mondial et vous avez levé 64 millions d'euros. Comment est née l'idée d'un PC dématérialisé dans le cloud ?

EMMANUEL FREUND - Blade est mon deuxième projet en dix ans. Le premier était une startup, Isidor, qui concevait des ordinateurs simples pour seniors. Mon cousin Asher Criou et moi l'avons vendue en 2013 à la société suédoise Doro, pour concevoir leur smartphone pour seniors, dont ils ont vendu plus de 200.000 exemplaires en deux ans grâce à des partenariats avec des opérateurs télécoms. Blade est né d'une frustration. Quand on développait notre smartphone pour Doro, on allait voir les constructeurs dans les usines asiatiques avec plein de rêves : une batterie qui dure vraiment longtemps, une caméra de très bonne qualité... Mais la réalité est qu'il est très difficile de mettre beaucoup de composants dans un objet si petit qu'on veut vendre à bon prix. C'est aussi valable pour les PC : les meilleurs PC sont plus volumineux et très chers.

Alors on s'est dit : pourquoi ne pas utiliser les meilleurs composants du marché et les connecter par Internet à n'importe quel appareil, même le plus basique ? Ainsi, tout le monde pourrait avoir accès à un smartphone beaucoup plus puissant, plus fin, qui coûterait moins cher que les meilleurs téléphones du marché. L'idée de Blade était née : dématérialiser les composants pour qu'ils ne deviennent pas un frein à l'expérience. Les composants du Shadow sont hébergés dans le cloud et l'utilisateur a accès à son ordinateur dématérialisé depuis n'importe quel support.

Si l'idée vient de la volonté de créer des smartphones plus puissants, pourquoi avoir choisi le marché du PC ?

L'idée de Blade est de prouver que n'importe quel objet connecté à Internet peut bénéficier d'une puissance incroyable : les PC, les smartphones, les montres connectées, jusqu'aux écrans sur les fenêtres et les frigidaires intelligents. À terme, nous voulons que chacun puisse bénéficier de tout son environnement numérique sur toutes les interfaces, via une simple application. Avec le Shadow, un gamer peut par exemple jouer à un jeu sur un PC puis reprendre sa partie sur smartphone en bénéficiant de la même qualité. Pour nous, un écran est simplement un écran, et le contenu doit pouvoir passer d'un écran à un autre de manière fluide.

Notre vocation est donc de créer de nombreux objets dématérialisés, mais pour commencer, le PC nous paraissait le meilleur moyen de démontrer la puissance de notre technologie en répondant à une demande du marché. En 2015, après deux ans chez Doro, mon cousin et moi avions envie de changer le monde avec un nouveau challenge. Donc nous sommes allés voir les meilleurs experts du cloud pour évaluer la faisabilité de notre projet. Tous nous ont expliqué que cela ne marcherait jamais. « Il n'y a pas de marché », « ça fait trente ans qu'on en parle », « c'est trop compliqué technologiquement », tout le monde nous dissuadait.

Comment vous-êtes-vous lancés ?

Malgré le consensus contre nous, nous étions persuadés que l'idée était bonne et réalisable. Mi-2015, nous avons donc quitté Doro pour travailler sur un prototype. Le but était de démontrer qu'un PC d'entrée de gamme pouvait se transformer en ordinateur ultra-puissant. Nous avons acheté deux petits PC à 300 euros, l'un était connecté à notre système, l'autre non. Puis on invitait des amis dans mon appartement du XIVe arrondissement de Paris pour tester. On leur montrait les deux petits PC et on leur disait: « L'un d'entre eux est l'ordinateur le plus puissant du monde ». Celui qui était connecté à notre système, basé à Neuilly, chez mon cousin, était rapide et puissant, il pouvait lancer des jeux très lourds, tandis que l'autre ramait beaucoup. Tout le monde était impressionné. On disait : « Imaginez maintenant qu'on mette cette puissance dans un data center et que chacun puisse se connecter à la demande. »

C'est comme ça que vous avez levé 3 millions d'euros en décembre 2015 auprès de business angels ?

Oui. Le Shadow est une véritable expérience qui demande, pour l'instant, de faire un pas de côté par rapport à notre conception du PC. Son adoption passe donc surtout par le test. Une vingtaine d'investisseurs, que des business angels comme Pierre Kosciusko-Morizet, le cofondateur de Vente-privee.com Michaël Benabou et l'entrepreneur thaïlandais Nopporn Suppipat, qui a fait fortune dans les énergies vertes, ont investi 3 millions d'euros pour nous permettre d'acheter les composants et de recruter.

Pour réussir ce pari, il nous fallait une équipe de développeurs de choc. Nous avons réussi à convaincre en décembre 2015 les deux meilleurs qu'on connaissait. On bossait dans le garage d'un de nos petits actionnaires, à six dans 15 m² rue Pascal, dans le XIIIe arrondissement de Paris, tout en recrutant. En six mois, nous sommes passés de six à douze personnes, certains finissaient par travailler chez eux ou par terre tellement il manquait de place ! Notre fonctionnement était vraiment artisanal.

Vous lancez la version Alpha en juin 2016 mais vous ne ciblez que le public des gamers. Pourquoi ?

Comme je le disais, le Shadow est une expérience. Il faut vaincre les a priori et les réticences liés au cloud, qui est encore associé à une mauvaise qualité d'image, à des problèmes de sécurité et à de la latence pour les joueurs. Notre stratégie s'inspire de Tesla : avant qu'Elon Musk transforme une voiture électrique en voiture de course, tout le monde pensait que les voitures vertes n'étaient pas assez puissantes.

Pour imposer le Shadow auprès de tous, il faut donc d'abord aller convaincre le public le plus exigeant et le plus pointilleux sur les performances des PC : les gamers. S'ils ne voient pas la différence entre le Shadow et un ordinateur à 2.000 euros, alors c'est que ça marche. Le gaming est un milieu très fermé et très conservateur donc très difficile, mais c'est un milieu prescripteur et c'est grâce aux gamers qu'on imposera une nouvelle manière de consommer l'électronique grand public.

Mi-2016, on tente alors un coup de poker. On demande à des joueurs professionnels d'utiliser le Shadow. C'est un succès : ils ne voient pas la différence. On appelle alors une dizaine de journalistes tech, qui font d'excellents articles. À ce moment-là, on se voit pousser des ailes et on pense déjà qu'on est le prochain Google (rires). Alors que les difficultés ne font que commencer...

Vous faites référence aux critiques sévères de certains utilisateurs sur Internet ?

Oui. Nous nous heurtons aux conservatismes car le Shadow incarne un vrai "shift" technologique. Donc soit on adore, soit on déteste. Certains nous reprochent de vouloir tuer le marché du PC et ne croient pas au cloud. Une vidéo circule sur Internet, fondée sur le test pendant à peine quelques jours de la première version. Mais l'immense majorité de nos utilisateurs nous plébiscitent, notre taux de satisfaction est de 85%. 70% des ventes viennent du bouche-à-oreille, c'est énorme et c'est pour cela qu'on va conquérir le monde.

Notre stratégie marketing est d'ailleurs construite autour de la communauté. Les meilleurs ambassadeurs du Shadow, ce sont nos utilisateurs. Nous nous sommes rendu compte qu'acheter de la pub sur Internet ou dans le métro ne nous aide pas à recruter. Notre croissance est très forte, mais elle est essentiellement organique : les gens achètent un Shadow quand un ami leur dit que c'est génial. Et ça marche. En octobre 2016, on a réalisé une deuxième levée de fonds, de 10 millions d'euros, puis on a lancé les 500 premières précommandes, qui sont parties en dix heures. En juin 2017, nous avions vendu 5.000 unités, soit le maximum de notre capacité de stockage d'alors. À chaque fois qu'on ouvrait des ventes, les gens se jetaient dessus. Il nous fallait donc accélérer. En juin 2017, nous avons levé 51 millions d'euros pour créer de nouveaux data centers en Europe et attaquer le marché américain. Aujourd'hui, le produit est disponible en Europe et aux États-Unis et notre croissance est très forte. Nous avons 20.000 utilisateurs, contre 5.000 il y a un an.

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Gamers

Blade s'est d'abord attaché à convaincre le public "le plus exigeant et le plus pointilleux sur les performances des PC" : les gamers.

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Votre croissance dépend de votre capacité de stockage, d'où la nécessité de lever beaucoup d'argent pour créer des data centers...

Exactement. Nous avons un gros data center près de Roissy, qui adresse la France, le Benelux, le sud de l'Angleterre et l'Ouest de l'Allemagne. 250 mètres carrés remplis de serveurs. Nous avons ouvert à l'été 2017 un bureau à Palo Alto, en Californie, et un data center va bientôt ouvrir pour le marché américain. Un autre est prévu en Europe, probablement à Amsterdam, pour permettre notre expansion. Notre capacité actuelle est de 100.000 utilisateurs. Nous avons signé un partenariat mondial avec Equinix, le plus grand fabricant de data centers au monde. Le principe est qu'on met des options sur des data centers, qu'on remplit au fur et à mesure des ventes. Nous mutualisons les composants, qui sont toujours à la pointe de la technologie grâce à nos partenariats avec tous les géants, comme AMD, Nvidia ou encore Microsoft.

Quelle est votre stratégie pour l'année à venir ?

Notre stratégie est de renforcer notre notoriété et notre domination du marché en France, en Europe et aux États-Unis, pour arriver à 100.000 utilisateurs contre 20.000 actuellement. Nous devons aller vite, mais ne pas brûler les étapes non plus. Pour l'instant, nous restons principalement sur le public des gamers car nous devons encore évangéliser le marché. Notre chance est que notre technologie est la plus avancée au monde, nous avons entre six mois et un an d'avance sur nos concurrents, sans compter notre notoriété qui est déjà forte en France. La niche du marché des gamers est énorme et notre potentiel de croissance au-delà de cette niche est exponentiel.

Vous avez levé 64 millions d'euros en deux ans d'existence, une levée tous les huit mois (3, 10 et 51 millions d'euros), ce qui est très rare pour une startup française. Comptez-vous bientôt refaire un tour de table ?

Oui, probablement d'ici à la fin de l'année. L'argent sert à nous donner les moyens de croître très vite et d'améliorer sans cesse la technologie pour conserver notre avance. Dès que nous nous approcherons de notre capacité maximale d'utilisateurs ou que nous voudrons adresser vraiment un marché plus large que celui les gamers, nous devrons relever.

Autre rareté, vous avez levé beaucoup d'argent sans aucun fonds d'investissement, seulement avec des business angels...

Nos investisseurs sont les mêmes depuis le début car on apprécie énormément notre indépendance et ils ont pour l'instant les moyens de soutenir notre croissance. Nous nous sommes entourés d'entrepreneurs qui croient en nous à 1.000 %. Mais nous ferons probablement appel à un grand fonds international pour notre prochaine levée.

Quels sont vos arguments pour convaincre le grand public de se convertir au Shadow ?

Nous recevons de plus en plus d'intérêt de la part du grand public. Même si nous ne voulons pas tuer le marché du PC mais plutôt être un complément, le Shadow peut être votre dernier PC, car il ne sera jamais obsolète. Vous achetez un Shadow, et tout d'un coup vous n'avez plus à vous inquiéter de l'obsolescence -programmée ou pas- des composants. Vous êtes assuré de bénéficier sur tous vos écrans d'un PC performant et sécurisé. Ce sont des arguments puissants pour ceux qui en ont marre de changer leur PC tous les deux ans. Le Shadow serait aussi très pratique pour les personnes âgées, les familles et les réticents à la technologie, car son utilisation est très simple. Le Shadow, c'est l'informatique à la portée de tous car nous transformons le PC en un service.

Pourquoi ne mettez-vous pas davantage en avant l'argument de la fin de l'obsolescence pour recruter de nouveaux clients ?

Parce que nous préférons d'abord évangéliser le marché et être la référence pour les personnes qui ont besoin d'un ordinateur puissant. Nous construisons notre légitimité. Nous allons communiquer sur la fin de l'obsolescence, mais progressivement. Les clients choisissent le Shadow d'abord pour le modèle par abonnement à 30 euros par mois, qui leur permet de lisser le coût d'un super ordinateur, puis ils voient les avantages et ils deviennent les ambassadeurs de la fin de l'obsolescence. Le Shadow, c'est aussi un ordinateur vert car vous ne le jetterez plus, il n'y pas de déchets.

Il faut bénéficier d'une connexion à Internet pour utiliser le Shadow. N'est-ce pas sa principale faiblesse ? Un mode hors-ligne, comme le fait Netflix, est-il possible ?

C'est une faiblesse, mais plus pour longtemps. Le mode hors-ligne va arriver. Plus le temps passe, plus nous réussissons à abaisser le volume de bande-passante nécessaire pour pouvoir faire tout ce qu'on veut avec le Shadow. Mais il est vrai que les utilisateurs, surtout ceux avec un usage mobile, n'ont pas accès à une connexion Internet en permanence. Le mode hors-ligne permettra de télécharger ce que l'on veut et d'y accéder même sans réseau sur tous ses écrans.

Que répondez-vous à ceux qui craignent pour la sécurité et la confidentialité de leurs données personnelles à cause du cloud ?

Le Shadow est une vraie révolution technologique, donc cela peut faire peur. Pour répondre à la crainte sur la confidentialité, nous précisions que ne sommes pas Google ou Dropbox : les données appartiennent exclusivement à l'utilisateur. Elles sont chiffrées, donc illisibles, et nous n'avons pas accès aux clés de déchiffrement, ce qui serait d'ailleurs illégal.

Sur la sécurité, je vous assure que vos données seront plus à l'abri dans nos data centers ultra-sécurisés que chez vous. Il est extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, à un hacker d'aller attaquer vos données sur notre système, car le hacker devrait d'abord casser les protections du data center puis chercher votre ordinateur dans le lot, alors qu'il est beaucoup plus simple d'attaquer votre PC personnel avec un cheval de Troie. De manière générale, le cloud est plus sécurisé que l'ordinateur personnel, mais ce message a encore du mal à être compris car les usages sont émergents.

Pour l'instant, vous proposez peu d'offres. Une diversification est-elle au programme ?

Oui. Nous proposons des offres uniques avec des configurations haut de gamme, mais on va aussi lancer des configurations moins puissantes pour les gamers dits "casuals" [qui jouent occasionnellement à quelques jeux et n'ont pas besoin d'une grande puissance, ndlr]. Nous nous rendons aussi compte que le Shadow attire naturellement des publics auxquels nous n'avions pas pensé, comme les graphistes, les designers, les professionnels de l'image, les grandes écoles et les universités... Le marché de la location d'ordinateur est aussi très intéressant. Plusieurs types d'abonnements vont être possibles, car le but ultime c'est de toucher tous les publics, des plus pointus aux plus novices, comme ma mère, et il leur faudra à chacun une offre sur-mesure.

L'idéal serait de lancer des offres grand public d'ici à la fin 2018, en ciblant les familles et les seniors peu technophiles. Pour les familles, on peut imaginer un PC avec contrôle parental : l'enfant ne peut plus l'allumer après 21 heures par exemple. Les possibilités sont infinies, donc il nous faut être très clairs dans notre plan de développement tout en étant très agressifs.

Quelles erreurs avez-vous commises jusqu'à présent ?

Même si on grossit très vite, il y a plein de choses qu'on fait mal, c'est la nature de l'entrepreneuriat. Pendant longtemps, on voulait lancer le "BtoB" . Mais réussir à lancer une entité "BtoB" consomme du temps et des ressources qui nous détournent de notre but, qui est d'abord de conquérir les gamers du monde entier, puis le grand public. Nous avons fini par comprendre qu'il faudra créer des marques différentes selon les publics ciblés, car le Shadow est très connoté gamers dans son design et il ne conviendra pas aux seniors ou aux familles par exemple.

Comment gérez-vous l'hyper-croissance ?

Nous sommes passés de 50 à 100 personnes en quatre mois. C'est sportif. On recrute actuellement entre quatre et six personnes par semaine, pratiquement une par jour. Il faut une machine de guerre pour faire cela, réussir les intégrations des nouveaux collaborateurs, conserver la culture d'entreprise. Nous avons encore une trentaine de postes ouverts. Nous sommes conseillés par nos investisseurs pour éviter des erreurs, mais nous apprenons aussi en marchant.

Craignez-vous la concurrence ? Le marché du cloud gaming est en plein boom et des géants pourraient aussi créer leur propre PC dans le cloud...

Oui, on sent bien que les grands comme Google et Microsoft regardent sérieusement ce que l'on fait et ils vont sans doute sortir leur propre produit de cloud gaming d'ici à la fin de l'année. C'est pour cela qu'il faut conserver notre avance technologique et être agressifs dans notre conquête du marché. Dans tous les cas, nous serons toujours plus rapides qu'eux, car nous ne faisons que ça, nous avons les moyens de dépenser des millions en marketing et nous sommes les premiers.

Nous ne voulons pas nous faire racheter. Nous voulons devenir le Netflix, le Spotify ou le Facebook du PC : nous créons un nouveau marché qui va devenir un standard et nous voulons le dominer. Il y a 270 millions d'ordinateurs à remplacer dans le monde, sans compter, dans un second temps, tous les smartphones et les appareils connectés... Le marché est incroyable et c'est juste le début. Notre situation dans l'électronique est comparable à celle de la voiture électrique dans l'automobile : la pénétration du marché est lente mais, à terme, il n'y aura que ça. L'ordinateur est mort, vive l'ordinateur !

Pensez-vous que les ambitions de Blade dénotent dans le paysage français ?

Oui, car je n'ai pas trouvé une boîte dans mon écosystème qui a vécu une telle croissance. Les startups qui lèvent chaque huit mois et qui accélèrent aussi vite, ça existe plus aux États-Unis qu'en France. Mais cela arrive. Depuis cinq ans, les entrepreneurs français sont dans un état d'esprit de liberté créatrice. C'est enrichissant de discuter avec l'écosystème de la French Tech, avec tous ces entrepreneurs qui apprennent en même temps que moi. Mais pour les problèmes qui peuvent se poser et la manière de les résoudre, il est plus pertinent pour nous de nous inspirer de la Silicon Valley car les problématiques y sont plus proches des nôtres.

Vous voulez devenir le Mark Zuckerberg ou le Elon Musk français ?

La raison pour laquelle j'ai fait tout ça est d'abord pour simplifier l'usage de la technologie pour les personnes comme ma mère. Nous réalisons un "shift" technologique et cela s'accompagne de responsabilités. Je trouve que Blade fait sens car le Shadow détruit l'obsolescence et c'est important au niveau environnemental. De plus, nous construisons un nouvel usage qui va bénéficier à tout le monde en rendant la technologie plus simple et plus accessible.

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Commentaires 9
à écrit le 11/04/2018 à 12:19
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Le Net-PC ! Une excellente idée, il y a plus de 20 ans ! Proposée par Sun et IBM-Micro. Je faisais des démos de ce joujou, avec un Power-PC-750 monté dans un coffret au CeBit en 1998 ! Microsoft et Apple étaient contre !

à écrit le 10/04/2018 à 18:52
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C'est vraiment bizarre, voire, même ... étrange : je préfère garder mes données, mes programmes, et tout sauvegarder régulièrement. Et quel PLAISIR de ne subir aucune pub, aucune entrave, installer ce que je veux. Le PIED !!!

à écrit le 10/04/2018 à 15:57
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Le coût énergétique de ce bidule dans le cloud quel est-il ? Et quid d'un gros bug comme celui qui vient d'avoir lieu à la Poste. Nous sommes pas à l'abri d'une grosse panne électrique généralisée, qui sera involontaire ou volontaire, il est inutil...

à écrit le 10/04/2018 à 13:50
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Je viens d’avoir un gros flashback :-) Le Network Computer. SUN nous avait montré cela il y a longtemps. Il n’y avait plus que des écrans et une carte d’authentification. On se connectait à son bureau depuis n’importe où dans le monde. C’était un p...

à écrit le 10/04/2018 à 12:37
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C'est un business plan habile. Mais c'est encore un abonnement... perso pas fan, notamment sur l'impossibilité d'utiliser mon pc hors ligne...

à écrit le 10/04/2018 à 9:17
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J'en ai déjà entendu parlé et c'est une très bonne idée puisqu'il faut le dire s'équiper en ordinateur gaming, vu que j'ai des ados qui pratiquent je m'y suis mis, ça fini par couter très cher en cartes graphiques et processeurs alors qu'au final seu...

le 10/04/2018 à 9:33
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"Symphony lève 67 millions de dollars auprès de Bpifrance et Barclays" https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/vaut-il-mieux-accumuler-du-capital-ou-du-savoir-et-des-pratiques-774639.html Voilà c'est ça que l'UE elle veut et rien d'autre !

à écrit le 10/04/2018 à 8:47
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un pc dematerialise dans le cloud!!!! bref, un pc chez vous avec rien dessus, sauf un acces a un serveur! ca existait deja dans les annees 70, ca s'appelait un terminal!

le 10/04/2018 à 16:03
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Hé oui ! Et même avant '70. Le problème c'est que c'était avant que... leurs parents (?) naissent. Et qu'ils ont zappé les cours d'histoire de l'informatique au collège. Avant de lancer des "shifts technologiques", il pourrait être bon de consulter u...

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