Pourquoi la France a raté Algolia, le "Google français des professionnels" au succès fulgurant

La startup basée à San Francisco mais créée et dirigée par deux Français, lève 110 millions de dollars pour poursuivre sa folle croissance. La clé de son succès : son déménagement, très tôt, aux États-Unis, pour s'imposer dans le secteur de la recherche en ligne pour les entreprises.
Sylvain Rolland
La pépite créée à Paris en 2012 par Nicolas Dessaigne et Julien Lemoine, deux anciens de Thales, explose depuis son arrivée aux États-Unis en 2015.
La pépite créée à Paris en 2012 par Nicolas Dessaigne et Julien Lemoine, deux anciens de Thales, explose depuis son arrivée aux États-Unis en 2015. (Crédits : Algolia)

Si Algolia était fondée aujourd'hui, resterait-elle française plutôt que de s'établir très vite aux États-Unis ? C'est l'ambition du gouvernement avec les mesures récentes pour mieux financer les startups et les encourager à grandir en France. Mais c'est trop tard pour Algolia, leader mondial du "search as a service", c'est-à-dire des API pour les entreprises leur permettant d'intégrer des fonctionnalités de recherche rapide sur leur site, leur application mobile ou leur CRM, comme un Google professionnel.

Lire aussi : French Tech : Macron annonce 5 milliards d'euros pour les startups en hyper-croissance

La pépite créée à Paris en 2012 par Nicolas Dessaigne et Julien Lemoine, deux anciens de Thales, explose depuis son arrivée aux États-Unis en 2015. Elle annonce ce mercredi 16 octobre le succès de sa troisième levée de fonds, d'un montant de 110 millions de dollars (presque 100 millions d'euros), auprès des fonds Accel et Salesforce Ventures, qui entre à son capital.

Algolia

Julien Lemoine (à gauche) et Nicolas Dessaigne, fondateurs d'Algolia

Croissance fulgurante aux États-Unis

Lorsque la startup voit le jour, en 2012, les deux fondateurs souhaitent imposer un moteur de recherche hors ligne pour les applications mobiles. Mais rapidement, ils se rendent compte que leur technologie pourrait conquérir un marché plus vaste. En 2013, ils participent au prestigieux programme d'incubation Y Combinator, qui leur permet de pivoter leur modèle économique, d'affiner leur proposition de valeur et de nouer des contacts pour pénétrer le marché américain, que les deux entrepreneurs identifient rapidement comme indispensable pour devenir leader mondial du search pour les entreprises.

"Pendant trop longtemps, les organisations ont dû choisir entre construire elles-mêmes leurs outils de recherche, ce qui est très coûteux et complexe, ou alors utiliser des solutions low-cost inflexibles car non adaptables à leurs particularités, explique le CEO, Nicolas Dessaigne. Algolia résout le problème en enlevant le coût et la complexité de construire un moteur, tout en permettant aux entreprises de se créer une expérience de recherche sur mesure, adaptée à tous leurs utilisateurs", explique-t-il.

Algolia propose ainsi l'infrastructure, le moteur et les outils nécessaires pour que ses clients puissent créer facilement une expérience de recherche intuitive pour leurs utilisateurs. Le modèle économique est celui du SaaS, un abonnement annuel. La série A de 18,3 millions de dollars, en 2015 (après deux tours d'amorçage pour un total de 2,8 millions de dollars en 2013 et 2014) marque la bascule, avec un déplacement du siège social à San Francisco, ce qui lui permet d'accrocher de nombreux grands comptes américains.

Ainsi, depuis sa création, la plateforme d'Algolia a effectué "plus d'un trillion de recherches et en réalise actuellement 70 milliards par mois", d'après Nicolas Dessaigne. La startup revendique 8.000 clients partout dans le monde, contre 3.000 il y a deux ans, au moment de la série B de 53 millions de dollars. (47 millions d'euros à l'époque).Parmi ses clients figurent LVMH, Twitter, Salesforce, Dior, Twitch ou encore Lacoste. Si le siège social est basé à San Francisco, la startup dispose aussi de bureaux à Paris, New York, Londres, Atlanta et même Tokyo depuis quelques mois. Elle emploie aujourd'hui 350 personnes, contre 115 en juin 2017, 70 fin 2016 et 30 fin 2015.

Recherche vocale, expansion en Asie et recrutements en vue

De manière assez classique, les 110 millions de dollars vont servir à mener de front deux grands objectifs : investir dans la technologie pour améliorer les solutions, et poursuivre l'expansion internationale sur tous les continents. Pour cela, la startup devra recruter, même si elle ne précise pas le nombre de nouveaux postes à pourvoir.

Le gros chantier pour Algolia est indéniablement technologique. La startup compte ainsi investir dans l'apprentissage machine, une technique d'intelligence artificielle, afin de mieux personnaliser les résultats de recherche. Nicolas Dessaigne compte aussi développer la recherche vocale, de plus en plus utilisée par les internautes, et financer l'agrandissement de ses capacités de stockage dans ses 16 data centers, afin de pouvoir adresser "les millions" d'entreprises dans le monde susceptibles de devenir, un jour, des clients d'Algolia... Qui rêve de s'imposer comme l'un des plus grands succès de la tech française... hors de France.

Sylvain Rolland

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Commentaires 15
à écrit le 17/10/2019 à 9:38
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Dans une interview récente, conseils de Nicolas Dessaigne d’Algolia aux entrepreneurs: > Pour attirer des étrangers, les dirigeants peuvent s’assurer de ne pas insuffler dans la société une culture franco française. De même, faire de l’anglais la la...

à écrit le 16/10/2019 à 19:57
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Ce qui est bizarre pour un journal de cette qualité c'est que la moyenne des commentaires est inférieure à celle d'un journal comme 20 minutes...

à écrit le 16/10/2019 à 16:15
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J'ai du mal à comprendre la partie "La France a raté Algolia". Le plus gros bureau d'Algolia est en France, il s'agit de tous les développeurs du produit. Le produit est fait en France, avec des employés payés en euros et des impots payés en Franc...

le 16/10/2019 à 21:00
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Donc il y a un problème de com? et le plus difficile est que dans les deux sens, c'est raté! faut croire. C'est pourquoi je suis plus global, qui le tout vérifiable en temps réel, l'idée est aussi dans le sujet. Et puis il ne faut pas être naïf su...

à écrit le 16/10/2019 à 15:35
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Pourquoi à nx faire du frenchbashing sur cette future multinationale de la High Tech créée en France par 2 Français qui ont grandi et étudié en France. Le tord d'avoir très vite compris qu'avec une telle innovation pour devenir rapidement une multina...

le 16/10/2019 à 20:56
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Non, les us viennent vers vous ! la différence est dans le fait de l'investissement. Et pour le coup, les 20 dernières années et cette situation confirme l'évidence. J'ai eu l'occasion de le faire deux, le monde depuis la France. Après c'est une q...

à écrit le 16/10/2019 à 15:09
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Le granit français ne vaut pas le bon terreau américain pour créer et développer des affaires de taille mondiale. Nos strates de décisions, la technostructure qui préfère les monopoles à la française, notre taux de redistribution, sont des handicaps ...

à écrit le 16/10/2019 à 14:16
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Je ne trouve pas vos commentaires très intéressants, qui font des amalgames grossiers et peu constructifs. Déjà, la France n'estr pas comparable aux US, par la taille, la population et l'état d'esprit qui les caractérisent, ainsi qu'une langue unique...

à écrit le 16/10/2019 à 12:55
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Comme avec dayly motion, le téléphone portable et bien d'autres choses!!!! Pourquoi? par le système est fait qu'il n'y a que des hauts fonctionnaires aux commandes, des gens protégés qui sont incapable d'avoir la vision. Alors faire des consta...

le 16/10/2019 à 14:36
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Je ne suis pas en désaccord avec tout. Mais concernant la formation, ces deux visionnaires sont le pur produit des écoles d'ingénieurs de France : ESIEA et EPITA. Ils ont donc le 'titre scolaire' que vous reprochez, et ils sortent des écoles francai...

le 17/10/2019 à 13:45
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Le problème n'est pas la formation mais la culture française d'aversion au risque. Le capital risque national, c'est la capital (donc le contrôle) sans la moindre prise de risque. On ne mise que sur des chevaux qui ont déjà gagné. L'Etat intervient ...

à écrit le 16/10/2019 à 11:52
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Et voila, c'est cela la France. Creer quelque chose est souvent vain voire complexe, couteux et tres sinueux. Ces deux la, on choisi les USA. Ce n'est pas un hasard. De la, ils vont essaimer l'Asie. Pellerin, cette opportuniste n'a rien developpe de...

à écrit le 16/10/2019 à 10:50
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pourquoi ce genre de boite ne peut pas emerger en france? euh, ben demandez a hollande et a fleur pellerin! ils ont fait de dailymotion le leader mondial du streaming en refusant de l'adosser a yahoo..... quand on a des lois dailymotion, florange,...

le 16/10/2019 à 12:20
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pfff …. la pépite a été créée en 2012 …. par des gars de Thales , une belle entreprise française -> ça c'est dommage pour Thales et nous par ailleurs … rien à voir les politiques … mais non vous avez certainement raison c'est quand les fondat...

le 16/10/2019 à 15:56
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Sarko, Hollande , Macron ou Merkel n'auraient rien changé au pb... En comparant ce qui est comparable, l'UE n'a pas actuellement les mêmes moyens d'unifier le marché de l'Union que les US leur propre marché et tt particulièrement le marché de l'info...

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