Pourquoi Sonos s'offre les assistants vocaux de la pépite française Snips

Pour 33,8 millions d'euros, Sonos vient d'acquérir la startup française Snips. Le constructeur d'enceinte pourrait intégrer à ses produits l'assistant connecté, qui offre plus de garanties du respect de la vie privée que ses concurrents.
François Manens
Sonos s'est récemment lancé sur le marché de la maison connectée avec un partenaire de choix, le géant Ikea.
Sonos s'est récemment lancé sur le marché de la maison connectée avec un partenaire de choix, le géant Ikea. (Crédits : Ikea)

Snips faisait partie des pépites françaises de l'intelligence artificielle au discours anti-Gafa aiguisé. Elle attirait les projecteurs grâce à ses 22 millions d'euros levés depuis sa création en 2013 et au charisme de son cofondateur, Rand Hindi. Mais l'an dernier, la startup a échoué à boucler une levée de 30 millions d'euros en série B, et elle a aujourd'hui pris une autre direction dans son évolution. Depuis le 14 novembre, la jeune pousse et sa technologie d'assistant vocal ont rejoint le giron de Sonos. Le géant américain, qui projette de réaliser plus d'1,3 milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2019, a déboursé 37,5 millions de dollars (33,8 millions d'euros) pour acheter Snips.

D'après les déclarations des différents acteurs, les 50 employés de Snips devraient rester à Paris. En revanche, le CEO et cofondateur Rand Hindi quitte la structure pour lancer un autre projet, et c'est Joseph Dureau, ancien directeur technique de Snips, qui prend la casquette de "vice-président de l'expérience vocale" chez Sonos.

Pour Sonos, une alternative à Alexa et Google

Spécialiste des enceintes haute qualité, Sonos a déjà noué des partenariat avec Amazon et Google pour proposer Alexa et Google Assistant sur ses produits. Avec ce rachat, l'entreprise américaine dispose désormais de sa propre technologie (ainsi que d'une équipe de R&D) en interne. Elle pourra donc proposer à ses clients des assistants connectés qui fonctionnent en local (sans connexion internet). Cette propriété permet notamment d'offrir plus de garanties en terme de sécurité : sans connexion, les enceintes ne peuvent pas être piratées depuis l'extérieur. Et ce n'est pas tout : les géants américains (Alexa, Google Assistant, Siri) ont tous concédé un à un avoir enregistré et conservé, sans consentement clair, des propos de leurs utilisateurs. Snips voulait donc capitaliser sur la question du respect de la vie privée, de plus en plus présente, et Sonos semble convaincu qu'il trouvera une clientèle grâce à elle.

En revanche,les assistants locaux de Snips sont moins puissants que leurs homologues issus des Gafa, et ne peuvent pas accomplir autant de tâches. En local, impossible de faire appel à Spotify, de commander un produit sur Amazon, de demander la météo, ou de chercher une recette de cuisine en ligne. En revanche, ce type d'assistant requiert moins de puissance de calcul (ce qui pourrait réduire le coût du produit), et peut être très performant pour des tâches précises,dans le cadre professionnel par exemple.

Quel marché pour l'assistant connecté de Sonos ?

Snips visait le marché professionnel (BtoB) avec sa technologie : elle créait des assistants sur-mesure, capables de répondre à des demandes en lien avec l'activité de l'entreprise. Difficile d'imaginer Sonos, présent quasi-exclusivement sur le marché grand public (BtoC) reprendre cette stratégie. Cependant, la technologie de Snips suffit pour faire appel à des commandes de gestion de l'enceinte (réglage du son, choix des morceaux) et à contrôler des objets connectés, comme par exemple des ampoules. Justement, Sonos s'est récemment lancé dans le secteur de la maison connectée, aux côtés d'un partenaire de choix, Ikea, avec deux produits, dont une enceinte-lampe baptisée "Symfonisk". Cette dernière, 50 euros moins chère que l'entrée de gamme Sonos, a reçu un bon accueil à la fois critique et en terme de vente, avec 30.000 exemplaires vendus en 24 heures. Dans l'objectif de développement sur ce nouveau marché, l'investissement dans un assistant connecté fait donc sens.

Spécialisé dans l'audio par Wi-Fi, connecté à des dizaines de services de streaming musical, Sonos a récemment lancé Move, une enceinte par Bluetooth. Si certains modèles d'enceintes par Wi-Fi se connectent logiquement aux assistants de Google et Alexa, ceux-ci ne fonctionnent pas hors ligne. En revanche, la technologie de Snips pourrait équiper une gamme de produits plus légère, comme Move.

Cette fusion-acquisition fait échos aux difficultés de la French Tech à réussir les exit de ses têtes d'affiches. Pour rappel, les fusions-acquisitions françaises ne représentent que 10% du total annuel européen. Et pour cause : elles dépassent rarement la barre des 50 millions d'euros.

François Manens

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Commentaire 1
à écrit le 22/11/2019 à 5:29
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Excellent article!

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