Le cœur artificiel de Carmat sera enfin commercialisé en Europe en 2021

Lancé en 2008, Carmat s'apprête à commercialiser son cœur artificiel total en Europe à compter du deuxième trimestre 2021. Dans un premier temps, la startup française dit vouloir cibler spécifiquement l'Allemagne et la France. Elle mène également des essais cliniques aux Etats-Unis pour pouvoir attaquer le marché outre-Atlantique à terme.
Anaïs Cherif
Aeson, le coeur artificiel total de Carmat, va être commercialisé.
"Aeson", le coeur artificiel total de Carmat, va être commercialisé. (Crédits : DR)

[Publié le 06/01/2021, mis à jour le 07/01/2021 à 17h30]

Plus de sept ans après la première implantation de son cœur artificiel total sur un patient français, Carmat s'apprête à commercialiser son dispositif à compter du deuxième trimestre 2021. Pour l'occasion, le cœur artificiel a été baptisé Aeson, en référence au héros "de la mythologie grecque, tué et revenu à la vie rajeuni", a précisé Stéphane Piat, directeur général de Carmat, lors d'une visioconférence donnée ce mercredi.

Lancée en 2008, la startup française a obtenu la certification européenne pour son innovation en décembre dernier, lui ouvrant ainsi la voie à une commercialisation dans toute l'Union européenne.

"2020 a été une année charnière pour nous, estime Stéphane Piat. Avec l'obtention de la certification européenne, c'est un nouveau chapitre qui s'ouvre pour la société, nous qui avons souvent été accusés de faire beaucoup de promesses et d'avoir peu de résultats."

En 2016, la startup avait été contrainte de suspendre son essai clinique, après la mort d'un cinquième patient greffé, et à la demande de l'agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). En octobre 2018, rebelote. La société avait suspendu son essai clinique en cours en Europe en raison de données laissant apparaître des risques de dysfonctionnement des prothèses. Après des modifications dans la production des cœurs artificiels, l'ANSM lui a donné le feu vert en octobre dernier afin de pouvoir reprendre les implantations en France.

Lire aussi : Carmat : combien de morts pour un coeur parfait?

Un marché potentiel de 2.000 patients par an en Europe

Conçu comme une bioprothèse autonome, "notre cœur artificiel est celui qui s'approche le plus possible du fonctionnement physiologique d'un véritable cœur humain", affirme le directeur général. "Le dispositif est auto-régulé pour s'adapter à l'activité du patient."

Le marché potentiel s'élève à 2.000 patients par an rien qu'en Europe selon Carmat, qui se fie aux listes d'attente pour une transplantation cardiaque dans les cinq principaux pays européens (France, Allemagne, Italie, Espagne et le Royaume-Uni).

"Selon les pays, la liste d'attente est en moyenne deux à trois fois plus élevée que le nombre de cœurs disponibles à la greffe", chiffre Stéphane Piat.

Et de poursuivre : "Cela veut dire qu'énormément de patients ne peuvent pas être traités, et il n'existe pas d'alternative satisfaisante. C'est pourquoi nous voulons combler ce vide thérapeutique." La prothèse de l'entreprise vise à prolonger la vie de certains patients en phase terminale ou de lui permettre d'attendre une possible greffe humaine.

Dans un premier temps, Carmat dit vouloir cibler l'Allemagne et la France, qui représentent à elles seules "55% du marché européen des dispositifs d'assistance circulatoire mécanique", assure la startup. Fin 2019, la France et l'Allemagne dénombraient respectivement 900 et 700 patients sur liste d'attente.

Lire aussi : Carmat en quête de fonds pour atteindre le marché avec son cœur artificiel

Augmenter la cadence de production

La jeune pousse de 200 salariés, basée dans les Yvelines, est donc en train d'augmenter sa cadence de production pour produire "dans les prochains mois" dix prothèses par mois, contre quatre au mois de juin.

"Le plus gros challenge pour une startup de la medtech est de passer du prototype à la production d'échelle. Notre objectif à terme est d'abaisser les coûts de production pour générer plus rapidement des profits", car la startup ne génère toujours pas de bénéfices, précise Stéphane Piat.

L'entreprise, qui dit avoir suffisamment de cash pour tenir jusqu'au troisième trimestre 2021, a obtenu en octobre dernier un financement de 13 millions d'euros du ministère des Solidarités et de la Santé. Il va permettre à la jeune pousse d'initier en parallèle de la commercialisation une nouvelle étude clinique, dite "EFICAS", dont le coût total est de 20 millions d'euros.

Depuis la première opération à l'hôpital européen Georges-Pompidou à Paris en 2013, seuls 19 patients ont profité de ce dispositif. Cette nouvelle étude clinique doit permettre de greffer 52 patients, de profils différents, pour démontrer que le cœur artificiel "fait épargner de l'argent par rapport à traitement long ou à un greffon humain", souligne le directeur général. Si la question du coût "n'était pas un problème" dans la première phase de recherche selon Carmat, celle-ci se pose désormais pour l'étape cruciale de la commercialisation.

Négocier la prise en charge par l'Assurance-maladie

Avec cette étude clinique, la startup souhaite pouvoir initier les discussions pour la prise en charge des implantations par l'Assurance-maladie en France et à l'étranger. Carmat, qui ne communique pas le prix précis, estime que son cœur artificiel sera "vraisemblablement plus élevé que 150.000 euros". Un prix unique sera défini pour toute l'Europe.

Prochain cap : les Etats-Unis. La société espère pouvoir y commercialiser son cœur artificiel à horizon 2024. Elle a déjà obtenu l'année dernière l'autorisation de l'autorité de santé américaine, la Food & Drug Administration (FDA), pour initier de nouveaux essais cliniques préliminaires. Trois centres américains ont été formés courant 2020 pour pouvoir débuter les implantations au cours du premier trimestre cette année.

Lire aussi : La HealthTech, la mine d'or méconnue de la French Tech

Anaïs Cherif

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Commentaires 2
à écrit le 06/01/2021 à 19:21
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La certification et l'homologation ont quand même pris plus de temps que pour Pfizer et Moderna 😁. Marrant, non ?

à écrit le 06/01/2021 à 17:13
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Plus besoin de vaccin contre le boomericide avec un coeur artificiel increvable...

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