2019 a marqué le passage de l'informatique quantique dans une nouvelle ère. En octobre dernier, des chercheurs de Google ont officiellement annoncé avoir effectué, sur un ordinateur quantique de 53 qubits, un calcul irréalisable par un ordinateur classique. Ils ont ainsi exposé le premier exemple de suprématie quantique, la preuve concrète que cette nouvelle branche de l'informatique peut aller sur des terrains aujourd'hui inexplorés.
De premières applications dès 2020 ?
Ce premier pas ne dépasse qu'à peine l'ordre purement mathématique. Mais d'ici une dizaine d'années, la technologie permettrait de découvrir de nouveaux médicaments, de nouveaux matériaux, de nouveaux procédés chimiques... Avant d'atteindre ce brillant futur, de premières applications pourraient émerger dès 2020, portées sur des questions très précises d'optimisation. D'autant plus que des chercheurs de l'université de Chicago ont découvert en décembre que les bits quantiques peuvent parfaitement fonctionner sur des ordinateurs classiques.
Les spécialistes ont un nom pour l'état actuel de la technologie : le NISQ ou Noisy Intermediate-Scale Quantum (quantum bruyant à l'échelle intermédiaire). Autrement dit, les ordinateurs sont imparfaits, encore trop imprécis dans leurs calculs, mais aptes à faire tourner certains algorithmes spécifiques. Reste à savoir lesquels et pour quels types d'applications. Car, pour l'instant, l'informatique quantique n'a pas prouvé qu'elle pouvait résoudre des problèmes concrets toujours irrésolus.
Mais Google, Rigetti ou encore IBM sont parvenus à construire des machines de plus de 50 qubits, capables théoriquement de résoudre de nouveaux problèmes dès maintenant. L'entreprise D-Wave, qui fait course à part avec son ordinateur spécialisé dans les problèmes d'optimisation, pourrait elle aussi ouvrir la voie. À l'heure actuelle, elle revendique plus de 150 applications qui font appel à son ordinateur, même si, des propres mots de son CEO, il ne dépasse pas encore les performances des ordinateurs classiques. Mais il espère que ce sera le cas dès l'été 2020, avec la sortie annoncée du nouveau modèle de D-Wave, doté de deux fois plus de qubits et de plusieurs paramètres grandement améliorés.
Synergie entre constructeurs, États et leaders sectoriels
Pour accompagner ces progrès des constructeurs, les États financent des programmes de développement, tandis que les leaders sectoriels (comme Total, Airbus ou EDF) se positionnent déjà, notamment sur la partie algorithmique, c'est-à-dire sur les formules mathématiques qui vont nourrir la machine. Sur l'année passée, plusieurs ordinateurs sont devenus accessibles à distance, sur le cloud, pour des coûts forcément moins importants que l'achat d'une machine. Cette innovation devrait permettre à davantage de chercheurs, privés comme publics, de tester leurs algorithmes, avec à la clé une accélération de la recherche et la mise au point, potentiellement dès 2020, de plusieurs applications concrètes.
Et ce n'est pas tout : en plus de résoudre des problèmes irrésolus, l'informatique quantique pourrait aussi prouver son utilité par rapport au calcul de haute performance.
« L'informatique quantique pourrait permettre une accélération des calculs classiques, ce qui permettrait d'accélérer les cycles d'innovation. Des calculs aujourd'hui réalisés par le calcul de haute performance (HPC) en deux jours pourraient l'être en deux heures », se projette Antoine Gourévitch, directeur mondial de la R&D chez BCG.
Même si 2020 paraît bien proche pour un secteur dont l'horizon se situe au-delà de 2030, la publication de Google et la progression des financements des startups dans le domaine pourrait faire de 2020 une année charnière.
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