La perspective de voir TF1 et M6 fusionner pour donner naissance à un mastodonte français de la télévision ne l'effraye pas. Au contraire. Ce lundi, Delphine Ernotte a même encouragé ses deux rivaux à se marier s'ils y voient le moyen de rester, dans les années à venir « puissants » et « en bonne santé ». Auditionnée par la commission d'enquête du Sénat sur la concentration dans les médias, la présidente de France Télévisions a jugé que la priorité, c'est que le secteur reste dynamique, dans un contexte de concurrence de plus en plus féroce des grandes plateformes américaines.
« Nous avons besoin d'avoir des concurrents privés en bonne santé, a-t-elle renchéri. Parce que si demain, les offres privées se délitaient - ce qui n'est pas le cas aujourd'hui -, eh bien c'est tout le média télé qui tomberait, et nous avec. Nous devons défendre le média télévision dans un monde où l'offre de médias ne cesse de s'élargir. »
« L'Autorité de la concurrence mettra des garde-fous »
Delphine Ernotte souhaite en revanche, et logiquement, que le deal TF1-M6 soit encadré. Pas question, par exemple, qu'il entrave la capacité de France Télévisions à conserver certains droits sportifs, comme les Jeux olympiques ou Roland Garros. « Nous nous en remettons ici à la sagesse de l'Autorité de la concurrence qui mettra des garde-fous », affirme la dirigeante. Idem sur le front de la publicité, qui représente 15% du chiffre d'affaires de France Télévisions. « Le simple fait de regrouper le marché publicitaire des deux mastodontes que sont TF1 et M6 fait baisser très spontanément le chiffre d'affaires publicitaire de France Télévisions, précise Delphine Ernotte. Il y a une prime au leader, on le sait. Et cela a des conséquences. »
Sa sortie fera toutefois grincer des dents les opposants à la concentration dans les médias, qui considèrent ce mariage comme une surenchère dans la course à la taille. A commencer par l'économiste Julia Cagé. Le week-end dernier, cette spécialiste des médias a tiré à boulet rouge sur cette fusion dans l'émission « C politique », sur France 5.
« Si cette fusion devait se faire, on aurait un groupe représentant 3,4 milliards d'euros de chiffre d'affaires, 70% du marché publicitaire télévisé, sept chaînes, 30% de l'audience, et sur les tranches d'information, ce serait un groupe qui toucherait 75% des téléspectateurs, a-t-elle égrené. Jamais un tel niveau de concentration n'a été atteint, notamment dans l'audiovisuel, qui continue à façonner le débat politique et le débat public. »
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