Fibre optique : une proposition de loi visant à éradiquer les malfaçons arrive au Sénat

Patrick Chaize, le sénateur de l’Ain (LR) et président de l’Avicca, qui regroupe les collectivités impliquées dans le numérique, a déposé un texte « à visée coercitive » pour inciter les opérateurs télécoms à se mobiliser contre les dégradations sur les réseaux de fibre. Celui-ci prévoit notamment qu’un abonné pourra, en cas de coupure, suspendre le paiement de son abonnement, voire le résilier.
Pierre Manière
Un raccordement à la fibre sur cinq se solde aujourd'hui par un échec.
Un raccordement à la fibre sur cinq se solde aujourd'hui par un échec. (Crédits : ALESSANDRO BIANCHI)

Alors que les critiques pleuvent sur le grand chantier du déploiement de la fibre, où les dégradations et malfaçons se sont multipliées ces dernières années, les collectivités sonnent la révolte. Après s'être longtemps plaint auprès du gouvernement, de l'Arcep, le régulateur des télécoms, et bien sûr des opérateurs, l'Avicca, qui regroupe les collectivités impliquées dans le numérique, passe à l'offensive. Ce mercredi, son président, le sénateur de l'Ain (LR) Patrick Chaize, a déposé une proposition de loi au Parlement. Son objectif : « Assurer la qualité et la pérennité des réseaux de communication électronique en fibre optique. »

Dans son propos liminaire, Patrick Chaize ne mâche pas ses mots. S'il salue l'avance de la France en matière de déploiement de la fibre, il souligne que « cette réussite se transforme progressivement en échec essentiellement du fait du mode de raccordement des abonnés », source de tous les maux. « Les derniers mètres, qui sont les premiers mètres vus de l'abonné, ruinent l'image du plan fibre et sapent la résilience de ce réseau essentiel », canarde le sénateur.

« Jusqu'à 100% des armoires dégradées »

Celui-ci dresse ensuite une « liste non exhaustive » des problèmes rencontrés. Il évoque les « abonnés régulièrement débranchés au profit d'autres abonnés », la « dégradation des habitations des clients et des équipements de réseaux (armoires de rue, points de branchement optique...) », les « déchets de travaux laissés sur place », les « conflits entre clients et raccordeurs »... Bref, « les dégradations se rencontrent partout, y compris sur des réseaux que les opérateurs considèrent comme étant 'peu accidentogènes' », enchaîne-t-il. Sachant que « certains problèmes graves ne se verront qu'à terme (mauvaises soudures, câbles endommagés ou soumis aux intempéries, pose instable, documentation erronée...) ».

L'ampleur des dégradations et malfaçons fait froid dans le dos. Surtout quand on sait que ce réseau de fibre est censé devenir l'infrastructure de référence pour plusieurs dizaines d'années... « Certains opérateurs d'infrastructures optiques signalent jusqu'à 100% des armoires dégradées, 75% des prises optiques mal posées », égrène encore Patrick Chaize. Le sénateur juge que les opérateurs n'en font pas assez pour résoudre ces problèmes :

« Les médias locaux et nationaux, ainsi que les réseaux sociaux, affirme-t-il, regorgent d'exemples plus aberrants les uns que les autres de raccordements défiant toute logique, avec des câbles qui traversent des routes, courent sur l'herbe, sont accrochés à des branches ou des gouttières... sans que cela n'émeuve les opérateurs responsables de ces aberrations, puisque malgré tout, 'ça fonctionne' ! »

Doter l'Arcep d'un pouvoir de sanction

Pour en finir avec ces mauvaises pratiques et leurs conséquences sur les abonnés, la proposition loi entend jouer sur plusieurs tableaux. L'idée est d'abord de redonner le pouvoir à l'opérateur d'infrastructure, qui a construit le réseau. « Il pourra contrôler avec rigueur les travaux de raccordement réalisés par les Fournisseurs d'accès Internet (FAI) et sanctionner ces derniers en cas de malfaçons constatées », précise l'Avicca. L'entreprise qui a effectué le raccordement devra aussi, propose le texte, remettre un certificat de conformité à l'abonné. Celui-ci pourra, en cas de manquements concernant la qualité du raccordement, lui demander réparation.

La proposition de loi prévoit que dans les campagnes, où les opérateurs déploient les réseaux en bénéficiant d'aides de l'Etat, le paiement de l'entreprise qui a effectué le raccordement sera soumis à une vérification par la collectivité territoriale. En outre, le texte précise qu'en cas de coupure, le client pourra suspendre le paiement de son abonnement. Si le problème se répète, l'abonné pourra bénéficier d'indemnisation, et au bout du bout résilier son contrat. Un article prévoit, enfin, de renforcer les pouvoirs de contrôle et de sanction de l'Arcep sur tous les opérateurs qui interviennent sur le réseau.

Pierre Manière

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Commentaires 2
à écrit le 22/07/2022 à 17:37
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En théorie tout ceci semble sensé. Mais comment veut procéder en détails? Comment est-ce que le consommateur devra apporter la preuve? Il y a de logiciels qui marche sur PC type Microsoft, mais qui bloque sur d'autres systèmes, parce qu'on a fait l'é...

à écrit le 22/07/2022 à 1:25
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Un texte inutile puisque la non fourniture de service numérique représente une rupture de contrat que peut dénoncer l'abonné... Le contrôle de l'Arcep ne sert qu'à politiser une relation commerciale dont la sanction la plus efficace est la résil...

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