Orange, Bouygues Telecom et SFR avaient déjà tous levé le voile sur leurs engagements visant à réduire leur empreinte carbone. Ce jeudi, c'était au tour d'Iliad, la maison-mère de Free, de présenter sa propre « stratégie climat ». L'initiative intervient alors que la 5G arrive dans l'Hexagone, et suscite de vifs débats liés à sa consommation d'énergie et à celle des usages numériques. La promesse d'Iliad ? Atteindre la neutralité carbone en 2035, avec 15 ans d'avance sur l'accord de Paris. Mais aussi avec cinq ans d'avance sur Orange, l'opérateur historique et leader du turbulent marché des télécoms françaises. Iliad compte sur différents engagements pour atteindre son objectif. Il affirme vouloir investir 1 milliard d'euros sur 15 ans, améliorer l'efficacité énergétique des réseaux fixes et mobiles, celle des data centers, ou encore doper la performance environnementale des box... Ces engagements concernent la France, l'Italie... mais pas la Pologne où Iliad vient de racheter l'opérateur mobile Play. Le DG d'Iliad, Thomas Reynaud, précise que si la Pologne n'est pas incluse, c'est parce qu'il est encore trop. « Notre plan climat n'est pas un exercice de com', argue-t-il. Nous ne sommes propriétaire de Play que depuis un mois et demi. Mais nous allons lancer un chantier. »
La stratégie environnementale d'Iliad concerne, en premier lieu, ses réseaux. Dans l'Internet fixe, le groupe veut accélérer la migration des abonnés ADSL, sur le vieux réseau cuire, vers la fibre. « Cette dernière est trois fois moins énergivore que l'ADSL », affirme un cadre de l'opérateur. Iliad plaide aussi pour une fermeture accélérée du réseau cuivre, arguant que c'est un « non-sens environnemental » de maintenir deux réseaux. Manière, aussi, de mêler les préoccupations environnementales au business : le groupe de Xavier Niel milite depuis longtemps pour qu'on en finisse le plus vite possible avec le réseau historique en cuivre, qu'il loue à Orange, son propriétaire.
Moins de transport aérien
Dans le mobile, Thomas Reynaud est formel : la 5G est une « technologie écolo ». il est vrai que les antennes 5G consomment moins d'énergie que les antennes 4G. Mais beaucoup se demandent si la nouvelle génération de communication mobile ne va pas, en parallèle, favoriser davantage d'usages énergivores. A ce sujet, l'état-major de Free souligne que la 5G permettra aussi, notamment via sa capacité à connecter des milliards d'objets, aux industriels de mieux maîtriser leur consommation d'énergie. Dernier argument de l'opérateur : si l'on reste avec la 4G, qui arrive à saturation au regard de l'essor continue de la consommation de données, il faudra déployer davantage d'antennes, ce qui plombera l'empreinte carbone.
Iliad, qui est le seul opérateur à concevoir intégralement ses box, veut en améliorer la consommation électrique, la durée de vie, et utiliser plus de matériaux recyclables. L'opérateur souligne qu'il limite déjà largement le recours au transport aérien pour se faire livrer ses boîtiers, en privilégiant le transport maritime. Il souligne qu'il fera davantage d'efforts à ce sujet, en améliorant la gestion des stocks dans les pays où il est présent.
Fronde contre le renouvellement des terminaux
Sur le front du cloud, Iliad veut généraliser, dans ses data centers, un procédé dit de « refroidissement adiabatique ». Cela lui permettra de se passer des climatiseurs, extrêmement énergivores. L'opérateur souhaite également inciter ses clients à recycler leurs mobiles, et encourager la vente de smartphones reconditionnés. Le groupe veut aussi lutter contre le renouvellement anticipé des terminaux. Ce point est, depuis de nombreuses années, dans le viseur de Free. Son état-major peste notamment contre le subventionnement des smartphones par ses rivaux pour garder leurs abonnés dans leur giron.
Le sujet énerve toujours autant Xavier Niel. « La chose qui pollue le plus dans notre environnement, dans nos activités, c'est le renouvellement successif des terminaux, a-t-il canardé ce jeudi. On a un pouvoir politique, on a des décisions de la Cour de cassation, on a tous les éléments nécessaires [pour en finir avec cette pratique, NDLR]. Mais on a un pouvoir politique qui n'a pas le courage d'avancer pour mettre fin à une pratique qui est illégale. » D'après Xavier Niel, ce dossier illustre le fait, selon lui, que « le pouvoir politique ne fait rien » pour avancer sur les problématiques environnementales. Et dans ces conditions, « eh bien c'est à la société privée de s'en charger, c'est ce que nous avons décidé de faire ». L'exécutif appréciera.
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