L’avenir de Telecom Italia suspendu aux modalités de scission de son réseau

En grande difficulté depuis plusieurs années, Telecom Italia espère se refaire une santé, et se relancer avec son projet de scission de son réseau Internet fixe. Mais les négociations concernant son rachat butent sur le prix. En parallèle, l’arrivée au pouvoir de Giorgia Meloni pourrait changer la donne. Son parti a évoqué la possibilité d’une OPA de la Caisse des dépôts italienne sur l’opérateur historique.
Pierre Manière
Pietro Labriola, le PDG de Telecom Italia.
Pietro Labriola, le PDG de Telecom Italia. (Crédits : Reuters)

Que va-t-il advenir de Telecom Italia ? De l'autre côté des Alpes, la question préoccupe tout l'écosystème des télécoms. L'opérateur historique italien, très endetté et soumis à une concurrence féroce, est en grande difficulté depuis des années. Pour s'en sortir, son PDG, Pietro Labriola, a un plan. Il souhaite organiser la scission de son réseau Internet fixe (NetCo) vis-à-vis de ses activités de services (ServiceCo).

Dans le schéma aujourd'hui à l'étude, c'est la Caisse des dépôts italienne (CDP), par ailleurs actionnaire à hauteur de 10% de Telecom Italia, qui rachèterait le réseau. Son ambition : le fusionner avec celui d'Open Fiber, dont elle est propriétaire à hauteur de 60%. La manœuvre permettrait de bâtir un géant des réseaux Internet fixe dans le pays, lequel louerait ses tuyaux à tous les opérateurs du pays.

Quelle est la valeur du réseau ?

Cette idée d'un grand réseau unique à l'échelle nationale a plusieurs avantages. D'un côté, elle constitue un levier pour éviter les doublons dans le coûteux déploiement de la fibre. Sur ce front, l'Italie reste très en retard par rapport à ses voisins, en particulier la France. Un grand réseau unique permettrait de déployer cette technologie plus vite, et de la rendre plus vite accessible aux particuliers et entreprises. D'un autre côté, ce projet rapporterait du cash à Telecom Italia, qui en a bien besoin pour réduire sa dette et se relancer.

Mais le projet est, pour le moment, dans l'impasse pour une affaire de gros sous. Concrètement, acheteur et vendeur ne sont toujours pas d'accord sur le prix. C'est ce qu'a rappelé, la semaine dernière, Pietro Labriola. « La chose fondamentale est de trouver un accord concernant une valeur qui satisfasse tout le monde », a-t-il lâché à des analystes financiers. Il faut dire que les estimations du réseau de Telecom Italia vont du simple au double... Certains analystes avancent le chiffre de 15 milliards d'euros. D'autres l'évaluent à 31 milliards d'euros. Ce dernier chiffre constitue, sans surprise, le montant souhaité par Telecom Italia, et le géant français des médias Vivendi, son premier actionnaire.

L'arrivée au pouvoir de Meloni change la donne

Pour mettre la pression sur la CDP et l'inciter à casser la tirelire, l'état-major de Telecom Italia a trouvé une solution. Le mois dernier, celui-ci a accordé à l'institution un mois supplémentaire pour lui soumettre une proposition chiffrée. Mais il a précisé que ces négociations ne seraient, désormais, plus « exclusives ». Bref, Telecom Italia ouvre la porte à une cession du réseau à un autre acteur. L'objectif est clair : mettre en concurrence la CDP pour faire monter les enchères, et tirer, in fine, le meilleur prix de son réseau. « Nous voulons avoir des possibilités de négociations parallèles », a sobrement déclaré Pietro Labriola. Pas question, à ses yeux et à ceux de Vivendi, de brader les bijoux de famille...

Mais ce dossier, qui ressemble à un serpent de mer, a connu un rebondissement avec l'arrivée au pouvoir de Giorgia Meloni, le 23 octobre dernier« Ces dernières semaines, le calendrier des projets a connu une évolution inattendue dans le contexte macroéconomique et politique », a pudiquement déclaré Pietro Labriola. En effet, le parti post-fasciste de Giorgia Meloni, Fratelli d'Italia, a évoqué l'hypothèse que la CDP lance une OPA sur Telecom Italia. Dans ce schéma, l'opérateur conserverait son réseau, mais abandonnerait ses activités de service. Interrogé à ce sujet, Pietro Labriola a botté en touche. Il a assuré que personne, au sein du gouvernement, ne lui avait demandé de revoir ses plans.

Une concurrence toujours aussi forte

Quoi qu'il en soit, Telecom Italia ne sera vraisemblablement pas fixé sur son sort à court terme. Pourtant, il y a urgence. L'opérateur historique boit la tasse à chaque présentation de ses résultats trimestriels. La semaine dernière, il a annoncé avoir essuyé une perte nette de plus de 2,2 milliards d'euros au titre du troisième trimestre, conséquence de dépréciations d'actifs fiscaux. Sur le marché italien, ses recettes ont fortement diminué de 5,3%, à 2,9 milliards d'euros. Il faut dire que la compétition est rude. L'arrivée d'Iliad Italia et de ses offres à prix cassé, au printemps 2018, continue, en particulier, de faire très mal à l'opérateur historique.

Pierre Manière

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 16/11/2022 à 18:09
Signaler
Le débit internet est hétéroclite sur le territoire, les dorsales entre pays européens sont eux aussi d'égalité toute relative. A quand une météo numérique européenne ?

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.