Le réemploi du plastique confronté à des défis culturels et logistiques

Les consommateurs délaissent les emballages jetables. Mais les industriels peinent à s’adapter.
Giulietta Gamberini
(Crédits : iStock)

C'est le maître-mot des ONG. Et à leurs yeux la seule véritable voie de sortie du plastique. Le « réemploi » implique d'abandonner l'économie de l'usage unique, y compris pour les emballages. Un énorme chantier dont la principale promesse en France est la montée en puissance de l'achat en vrac. 53% des Français y ont eu recours en 2019, selon l'association Réseau Vrac. Le secteur compte désormais près de 360 points de vente spécialisés et il est présent dans 70% des hypermarchés et des supermarchés. En 2019, les ventes ont atteint 1,2 milliard d'euros, contre 100 millions d'euros en 2013.

L'offre de solutions alternatives aux emballages jetables se développe aussi, grâce à un foisonnement de start-up. Reconcil, par exemple, propose des emballages consignés et réutilisables pour la restauration à emporter, l'un des secteurs où l'utilisation d'articles à usage unique croît le plus fortement. SolZero fournit des contenants alimentaires réutilisables à Franprix, dans le cadre de sa première offre de « repas zéro déchet », actuellement testée à Paris.

MyGreenGo gère un système de consigne pour les cafétérias d'entreprises telles que celles de SAP et d'Engie. Loop a supprimé les emballages à usage unique de plus d'une centaine de produits de grandes marques, aujourd'hui livrés à domicile mais prochainement disponibles aussi dans certains magasins Carrefour. Pandobac s'adresse aux professionnels, auxquels il propose des bacs réutilisables pour le transport de leurs marchandises alimentaires...

Plusieurs obstacles devront toutefois être levés avant que le réemploi puisse s'imposer à grande échelle. Le premier est culturel: les habitudes des commerçants et industriels, mais aussi leurs doutes quant à la conformité réglementaire des contenants réutilisables, à leur capacité d'assurer le même niveau de sécurité sanitaire, à leur adaptabilité à tous les types de contenus, sont autant de freins au réemploi des emballages. Sans compter que pour les entreprises de l'alimentaire, dont un grand nombre sont des PME ou TPE, changer d'emballages signifie investir dans de nouveaux outils de production. « L'accompagnement est donc essentiel », témoigne Shu Zhang, cofondatrice de Pandobac, qui propose à ses clients une période de test.

Coup de pouce

Mais les problèmes logistiques pèsent aussi. Pour être vraiment positif du point de vue environnemental, le transport des emballages réutilisés doit être optimisé. Déployer le réemploi en France demande ainsi de repenser les circuits de livraison, mais aussi de mailler le territoire de centres de lavage industriels. Chacun coûterait environ 1 million d'euros, estime Emmanuel Auberger, fondateur de SolZero, qui ajoute: « L'enjeu est donc de récupérer assez de contenants pour que l'investissement soit rentable».

Plus les quantités seront importantes, plus attrayant sera d'ailleurs le prix du service, aujourd'hui encore souvent supérieur au coût des emballages jetables. Les acteurs du réemploi restent toutefois optimistes. Comme pour le vrac, la demande des consommateurs d'emballages réutilisables croît. Pour optimiser les flux, passer à l'échelle et construire une alternative industrielle solide et unique au jetable, une solution se dessine : la mutualisation des outils et des marchés.

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire adoptée fin janvier devrait leur donner un coup de pouce, grâce à l'interdiction progressive de plusieurs objets en plastique à usage unique, avec l'objectif final d'en cesser la commercialisation en 2040. Elle fixe un objectif de réemploi des emballages de 5% en 2023 et de 10% en 2027, et réserve au gouvernement la possibilité de créer une consigne pour le réemploi en 2023. À cette date, la loi interdira aussi aux restaurants de servir les repas et les boissons consommés sur place dans des contenants jetables. Elle encourage aussi le vrac, en prévoyant que le consommateur « peut demander à être servi dans un contenant apporté par ses soins ».

Giulietta Gamberini

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Commentaires 3
à écrit le 14/02/2020 à 22:21
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l'achat en vrac ça ne marche pas car c'est bien plus cher que préemballé. vu cet aprem un 8 a 8; riz basmati 4 € le kilo, ben du riz à 4 euro le kg, qui part de la-bas à 20 cmes la belle culbute, chez Leclerc c'est 1,50€ le kg."emballé" Et tout est...

à écrit le 14/02/2020 à 9:46
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Notre économie financiarisée s'est parallèlement appauvrie en idées. Le lobby c'est l’ennemi du dynamisme économique.

à écrit le 14/02/2020 à 8:54
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Ce serait bien, déjà, que les supermarchés arrêtent cette habitude de mettre le fromage sous plastique dénaturant complètement le goût de cet aliment.

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