Raffarin, la croissance et la décentralisation

Pour être attendue, la nouvelle n'en est pas moins fâcheuse. Car, sur le plan budgétaire, le gouvernement se trouve déjà dans une posture très délicate. Il est pris entre des engagements européens de plus en plus difficiles à tenir et des promesses de réforme (retraites, santé) et de soutien à l'activité économique (pas de politique de rigueur en période de ralentissement, a répété Francis Mer à l'occasion d'une réunion du G7, ce week-end) qu'il ne peut renier, sauf à opter pour une issue électoralement suicidaire à plus ou moins brève échéance.Or, moins de croissance, ce sont moins de recettes fiscales, donc moins de "grain à moudre" pour un gouvernement sollicité sur de multiples fronts à la fois. Le voici désormais à l'heure des choix. Maintenir le programme de dépenses publiques alors que la croissance flanche aura un coût. Boucher le trou de plus en plus béant de la Sécu tout en s'attelant à une réforme douloureuse de l'assurance maladie ne sera pas gratuit. Réformer les retraites nécessitera également des mesures transitoires qu'il faudra financer: comment envisager autrement de donner davantage à ceux qui cotisent plus de 40 ans, ont commencé à travailler plus tôt ou effectué des tâches particulièrement pénibles, ainsi que le gouvernement s'y est engagé ?Jean-Pierre Raffarin a beaucoup promis. Il lui reste à démontrer qu'il est capable de trancher. Dans quelle mesure est-il prêt à s'affranchir de la discipline du pacte de stabilité, en laissant filer le déficit public au delà de 3% du PIB, et pour combien de temps ? Sur quoi devront porter en priorité les économies auxquelles l'Etat devra bien se contraindre ? Et, en particulier, dans quelles proportions faudra-t-il réduire les effectifs de la fonction publique ? A l'inverse, quelles dépenses seront jugées prioritaires, voire incompressibles ?A toutes ces questions, le Premier va devoir rapidement apporter des réponses claires et précises. Evoquer l'imminence d'un conflit en Irak pour y surseoir est légitime. A condition de ne pas transformer l'incertitude géopolitique en une justification de l'immobilisme.Jean-Pierre Raffarin prononce aujourd'hui un discours sur l'économie et les risques internationaux devant la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris. Souhaitons qu'il puisse amorcer à cette occasion cette indispensable clarification.Une autre occasion lui sera offerte, à la fin de la semaine, avec la clôture des assises des libertés locales. On attend qu'il y précise l'étendue et les modalités des transferts de compétence, notamment en matière fiscale. Et, là encore, il sera question de croissance. Lors de sa visite chahutée à la Réunion, la semaine dernière, le Premier ministre a en effet affirmé que la décentralisation devait permettre de "libérer un point de croissance chaque année pour notre pays". Un point, qui, dans le contexte actuel, offrirait une bouffée d'oxygène inestimable. Il reste à expliquer comment l'obtenir.
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