Hausse des prix de l'alimentaire sur fond de négociation entre distributeurs et fournisseurs

Alors que l'inflation dans l'agroalimentaire amène les industriels du secteur, tels que Danone et Lactalis, à augmenter fortement le prix de leur produit, les négociations entre distributeurs et fournisseurs s'engagent sur fonds de réforme de la loi Galland, qui régit depuis 1996 les discussions entre les deux camps. Le gouvernement veut pousser les distributeurs à baisser leurs prix pour favoriser le pouvoir d'achat des Français.

Il va être de plus en plus douloureux de passer à la caisse des supermarchés. A la suite de la hausse effrénée des prix des matières premières, les industriels ne cessent d'annoncer les uns après les autres de fortes augmentations de leur tarif. Ce jeudi, c'est le groupe agroalimentaire Danone France qui prévient contre une hausse de ses prix de 10% à compter du 21 novembre, après avoir déjà augmenté ses tarifs en juillet.

En cause selon le groupe: "la hausse brutale et sans précédent des prix des matières premières laitières (lait de collecte et ingrédients laitiers) en Europe et en France". Danone table en effet sur une hausse de 20% en octobre du prix du lait et se prépare à une hausse supplémentaire de 30% en janvier 2008. "Les ingrédients laitiers ont connu une augmentation de 100% sur la même période. D'autres ingrédients tels que les fruits notamment ont également fait l'objet de fortes augmentations.", précise-t-il.

Comme l'explique Danone, l'inflation dans l'agroalimentaire est dû "un déséquilibre de l'offre et de la demande mondiales : la baisse conjoncturelle de la production de lait en Australie et en Nouvelle Zélande, due à la sécheresse, l'accroissement structurel de la demande mondiale de lait (notamment en Chine), la baisse structurelle de la collecte en Europe et en particulier en France."

Outre Danone, le fabricant français de lait Lactalis a également annoncé ce jeudi une augmentation de ses tarifs de l'ordre de 15% à 17% début décembre, après une première hausse cet été de 2,5%. Son président, Michel Léonard, dans une interview publiée par Les Echos, affirme que ces augmentations "ne font que couvrir la hausse de notre matière première en 2007. Pas celle prévue au début de 2008". "En résumé, la fin de l'année risque d'être tendue et le début de 2008 promet d'être sportif", ironise-t-il.

Lactalis assure pouvoir maintenir ses marges si ces hausses de prix sont acceptées par la distribution. Même son de cloches pour Bonduelle, qui a également annoncé mardi une hausse de ses tarifs. "La distribution devra accepter un minimum de hausse de 10% sur nos prix", déclare le groupe. C'est là que tout devient compliqué.

Alors que les traditionnelles négociations entre fournisseurs et distributeurs pour 2008 vont débuter, le gouvernement a lancé dans le même temps la réforme de la loi Galland, qui régit depuis 1996 les relations entre les deux partis en interdisant la revente à perte. Car entre le bras de fer fournisseurs-distributeurs, vient s'ajouter la question essentielle pour Nicolas Sarkozy du pouvoir d'achat des Français. Le président de la République veut en effet relancer la consommation grâce à une baisse des prix dans les grandes surfaces.

L'arbitrage du gouvernement devra donc se faire dans une équation complexe, et avec un calendrier serré. D'autant plus que distributeurs et industriels campent sur leurs positions sur la liberté de négocier les tarifs. Alors qu'une dépénalisation partielle du seuil de revente à perte - qui autoriserait les distributeurs à déduire sur le prix de vente les marges arrières, ces commissions versées par leurs fournisseurs et liées à des prestations réelles...ou non - est envisagée, ces derniers veulent aussi pouvoir négocier les tarifs, actuellement fixés par le producteur ou l'industriel. Inacceptable pour les fournisseurs.

Ainsi, Bonduelle répétait-il lundi son refus de laisser la possibilité dans le nouveau texte aux distributeurs de négocier les prix. "Nous ne voulons pas retomber dans les chaos qu'on a connus dans les années 1990, avant la mise en place de la loi Galland", a affirmé Christophe Bonduelle au cours d'une conférence de presse de présentation des résultats annuels du groupe.

Ce jeudi, ce sont la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME), l'Union professionnelle artisanale (UPA), la Confédération générale de l'alimention en détail (CGAD) et la FNSEA, principal syndicat agricole, qui ont plaidé pour que "la qualité et la liberté de choix" ne soient pas "sacrifiées au profit de la seule grande distribution".

Le gouvernement pourrait donc s'orienter vers la solution du compromis, ou "triple net": les distributeurs pourront effectivement déduire du prix de vente les marges arrières, mais ne pourront négocier les tarifs. Avec en ligne de mire la défense du consommateur, qui pourrait ainsi voir les prix à la consommation augmenter en moindre proportion.

Mais les distributeurs peuvent se consoler avec le dernier avis rendu ce jeudi par le Conseil de la concurrence. Celui-ci s'est prononcé en faveur d'une réforme en profondeur des lois Royer et Raffarin sur l'ouverture ou l'extension des réseaux de distribution. En clair, les groupes de grande distribution pourront obtenir plus facilement l'autorisation d'ouvrir ou d'étendre la surface de leurs supermarchés quand la législation française actuelle est une des plus contraignantes d'Europe.

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