Bernard Plossu, photographe aux semelles de vent

Le Musée d'art moderne et contemporain de Strasbourg rend hommage au photographe Bernard Plossu à travers une superbe rétrospective

Il a pris la route à 20 ans, en 1965, pour le Mexique, hanté par la Nouvelle Vague, des rêves de cinéma plein la tête. Henri Cartier-Bresson, Tina Modotti, Edward Weston l'y avaient précédés. Mais Bernard Plossu n'en savait rien. "Mes seules références étaient cinématographiques", précise-t-il. Cela ne l'a pas empêché de dynamiter les règles de la photographie de voyage une fois sur place. Et de faire basculer le genre dans le journal intime en chroniquant ses rencontres, ses virées enfumées ou ses amitiés avec une bande de beatniks, venus eux aussi se chercher au Mexique. Témoignage exceptionnel, aux accents surréalistes, d'une génération en quête de sens.

De cette échappée est né un livre désormais mythique, malheureusement épuisé, "Le voyage mexicain" (éditions Contrejour), dont quelques images sont aujourd'hui présentées au Musée d'art moderne et contemporain de Strasbourg, parmi 200 autres clichés réalisés aux Etats-Unis, en Europe ou en Afrique. Une enivrante rétrospective concoctée par Sylvain Morand, d'autant plus passionnante qu'elle permet d'approcher au plus près l'essence même du travail de Plossu.

Le photographe n'a pas son pareil pour saisir des sentiments ou une ambiance, à travers des photos en noir et blanc parfois bougées, décadrées, mais néanmoins remarquablement composées. Toutes se jouent de la technique pour restituer l'état d'esprit de l'instant présent avec une rare liberté, "héritée du cinéma de la Nouvelle Vague" assure le photographe.

Paysages, portraits, photographies d'architecture... Plossu n'a que faire des genres. La seule chose qui l'intéresse, c'est de dire le monde tel qu'il le ressent, le plus simplement possible. C'est d'ailleurs probablement là que se cache le secret de son travail. Dans cette façon de photographier en refusant les effets de style. Comme pour cette feuille, cueillie à fleur de bitume à la villa Noailles de Hyères. Une feuille minuscule, qui raconte à elle seule la solitude et le temps qui passe. D'une poésie à couper le souffle.

"Bernard Plossu, rétrospective 1958-2006". Musée d'art moderne et contemporain de Strasbourg, 1 place Jean Arp, 67 000 Strasbourg. Tel : 03 88 23 31 31. Jusqu'au 27 mai.
A lire : "Bernard Plossu, des mots de lumière dans les musées de Strasbourg", éditions des Musées de Strasbourg, 80 p., 18€.
A lire également, "Bernard Plossu, Rétrospective 1963-2006", sous la direction de Gilles Mora, édition des Deux Terres, 302 p., 69€.

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