Avignon, détails

Trois semaines de théâtre, de danse, d'expositions, de débats, de lectures- Le plus grand festival de spectacles vivants fête son 60ème anniversaire à partir de ce vendredi.

Dans la Chapelle Saint-Charles d'Avignon, d'un côté "un Gérard Philipe de cinq mètres de haut, fragmenté en quinze cadres, dressé dans la beauté de la légende, en Prince de Hombourg, tout en blanc sur fond de feuillage [...]. De l'autre côté, un Jean Vilar de six mètres de large, en vingt-trois morceaux. Il est dans sa loge, au Palais des Papes, sous une misérable ampoule, avec sa vieille chemise [...]. Il y a là toute la solitude du comédien". Agnès Varda raconte. Un "je me souviens" pour dire l'époque de ses 20 ans quand elle captait les premiers pas du festival d'Avignon comme photographe officielle de ce qui n'était pas encore l'événement international que l'on connaît.

Pour marquer les 20 ans du festival, il est bien de retrouver son exposition déjà présentée il y a 15 ans, "Je me souviens de Vilar en Avignon", pendant tout le temps du festival. Varda est un des éléments clé de cette aventure. On la retrouvera aussi à la Miroiterie pour (re)voir son travail déjà exposé au Panthéon à Paris en janvier dernier, "Hommage aux justes de France".

Il faut rappeler que ce festival est aussi né au lendemain de la guerre de plusieurs rencontres, de plusieurs désirs entre différents personnages: le galeriste Christian Zervos et sa femme Yvonne, le metteur en scène Jean Vilar et le poète René Char, l'homme de l'Isle-sur-la-Sorgue près d'Avignon né il y a 100 ans. Et René Char fut aussi combattant, résistant pendant l'Occupation. Et cette dimension historique imprègne Avignon 2007 de plusieurs manières. Notamment par la mise en chair et en voix des "Feuillets d'Hypnos" de René Char par l'artiste associé, cette année, au festival Frédéric Fisbach. De tous ces fragments du poète où il n'évoque pas que la guerre, l'histoire mais aussi la création, l'art, Fisbach en fait "237 actions pour la scène" avec plus de 100 acteurs, majoritairement des amateurs, sur le vaste plateau de la cour d'honneur.

Frédéric Fisbach ouvre ce festival dès cet après-midi de vendredi 6 juillet avec une reprise de son travail passionnant sur "Les Paravents" de Jean Genet au Théâtre Municipal. Un poète là aussi et la guerre, celle d'Algérie, en toile de fond. Fisbach est suivi ce vendredi en soirée par d'autres bruits de bottes, ceux de la débâcle nazie vue par Céline et traduit de façon dantesque dans son roman "Nord" (Gallimard). C'est une adaptation théâtrale et en version allemande du livre qui est proposée par le metteur en scène Frank Castorf, le patron de la Volksbühne de Berlin. Créée à Vienne (Autriche) lors du dernier Wiener Festwochen, la pièce a surpris le public. Et pas seulement par le foutoir qui règne sur la scène (le style de Céline n'est ni vraiment linéaire ni simple).

On tire beaucoup à la mitraillette (des bouchons d'oreilles sont distribués à l'entrée du spectacle), les personnages principaux (le docteur Destouches - Céline - et sa femmes Lili, le chat Bébert, l'acteur Le Vigan) sont interprétés par différents acteurs comme les autres personnages, ceux des châteaux ou des sous-sol berlinois. Le train (un wagon de marchandise en permanence sur la scène) est manipulé comme une girouette, désossé aussi. Dans ce voyage au bout de la folie entre Baden-Baden et le nord de Berlin, on ne comprend pas trop les paroles (ça hurle beaucoup). Reste le sens que veut donner Castorf à ce propos, utilisant aussi des images d'un film où l'acteur Le Vigan joue le rôle de Jésus. A savoir qu'aujourd'hui encore, l'individu peut être à un moment ou à un autre dans l'erreur avec toutes les conséquences désastreuses qui peuvent arriver. Il n'a pas tort Castorf, seulement dans son spectacle il y a ce wagon et pendant la seconde guerre mondiale, ce genre de transport était surtout rempli "d'étoiles". Et l'on rit jaune.

Autres spectacles très attendus dès ce soir, "Bleue, Saignante, A point" de l'iconoclaste argentin Rodrigo Garcia (jusqu'au 13 juillet). Et puis il y aura "L'Acte inconnu" de Valère Novarina dans la Cour d'Honneur (7-12 juillet), la soirée du 9 avec dans cette même cour la lecture de "Quartett" (Heiner Müller) par Jeanne Moreau et Sami Frey, "L'Echange" (Claudel) mis en scène par Julie Brochen (8-18 juillet), l'intégrales des "Ephémères" de Mnouchkine (14-25 juillet), "Dinozord..." de Faustin Linyekula (8-15 juillet), "Le silence des communistes" d'après trois auteurs italiens dans une mise en scène de Jean-Pierre Vincent (8-16 juillet), etc.


Programme détaillé sur www.festival-avignon.com. Tél. : 04 90 14 14 14.

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