Génération 'no futur'

Amis décomposés, famille mal composée. L'argent est le sésame de l'existence dans "Main dans la main", pièce de la jeune Suédoise Sofia Fredén. Au Théâtre Ouvert à Paris, l'adaptation française par l'également jeune metteur en scène Edouard Signolet est une vraie découverte et une réelle réussite.

Au sol, dessinée, une carte qui n'a rien du tendre. Plutôt un jeu de piste pour dire ici une rue ou une place, là une chambre ou une autre pièce d'appartement. Et à jardin et cour, des hors pistes où deux personnages tout de noir vêtus font office de diseurs de didascalies, ces commentateurs de situations théâtrales.

Ils sont (presque) tous jeunes les nombreux personnages inventés par Sofia Fredén dans sa pièce titrée en français "Main dans la main" ('Hand i hand' en suédois). Les Nina, Allan, Aron, Petter, Nadia, ont entre 20 et 30 ans. Seul Gary, le père de Nina, a la cinquantaine. Citadins, ils sont en plein dans notre société de l'argent roi. Tout s'achète, même les sentiments. Un monde dur, cynique, où les concessions se marchandent. C'est la règle du plus fort quand la question centrale reste 'être ou ne pas être exclu'.

Exemple: Allan explique à Nina qu'il quitte, "il faudra payer pour dormir dans son [de Sony, NDLR] placard et je serai obligé de faire la vaisselle [...] pour avoir le droit de regarder sa télé". Bien plus tard, Nina répliquera à Aron: "On ne donne rien à personne! Tout se paie et il n'y a pas de limite à ce que ça peut coûter...".

Le style de l'auteure, c'est avant tout la phrase coup de poing, rapide, haché menu. La mise en scène d'Edouard Signolet profite totalement de cette proposition pour zapper (verbe pris dans son sens initial de passer rapidement d'une scène à une autre) sans qu'on en perde le fil pour autant. Le jeu des comédiens apporte un côté BD au spectacle. Cette équipe possède beaucoup de talent. Elle peut surprendre mais n'agace jamais. Sans user d'artifices, ce théâtre n'est pas seulement pour les "d'jeunes". Il met dans le mille les mécanismes de nos sociétés en mal de crédit, en mal d'un autre futur.

Jusqu'au 9 février au Théâtre Ouvert (Cité Véron, 75018 Paris). Tél: 01 42 55 55 50.

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