Clint Eastwood crée l'émotion chez les festivaliers

Avec "L'échange", tiré d'un fait divers réel dans le Los Angeles des années 30, le réalisateur américain habitué de la Croisette conte l'histoire d'une mère luttant seule pour retrouver son fils kidnappé. Reconstitution soignée, mise en scène impeccable, police corrompue, serial killer psychotique, interprète de choix en la personne d'Angelina Jolie, très investie dans son rôle... tous les ingrédients d'un film à palme sont réunis!

Clint Eastwood est sans doute le réalisateur américain favori du Festival de Cannes. Depuis 1985, où il était accueilli pour la première fois avec "Pale Rider", il est presque à coup sûr sélectionné en compétition. On ne l'avait pas vu sur la Croisette depuis 2003 où il a présenté "Mystic River", avec Sean Penn, président du jury cette année. Mais le réalisateur de "Sur la route de Madison" n'a jamais rien ramené de ses voyages à Cannes.

Se pourrait-il qu'à 78 ans il remporte enfin la palme de reconnaissance qui lui fait défaut après deux oscars (pour "Impitoyable" en 1993 et pour "Million dollars baby", en 2004)? Ce n'est pas impossible, comme ce fut le cas récemment pour Roman Polanski et pour Ken Loach. Même si les mauvaises langues signalent que la présidence du jury tenue par Sean Penn, lauréat de l'oscar pour son rôle dans "Mystic River", créerait une confusion d'intérêts regrettable.

Quoiqu'il en soit, "L'échange" remplit très exactement le cahier des charges des films sélectionnés en compétition officielle au Festival de Cannes, selon la Bible établie par Gilles Jacob, son président: "film d'auteur grand public". Capable en effet d'émouvoir tous les publics, le film mène en outre plusieurs combats (d'époque et contemporains): contre la corruption de la police, contre les internements abusifs, pour la dignité des femmes, pour la mobilisation de la population contre les pouvoirs arbitraires des flics, des psychiatres, des élus, bref de toutes les autorités non soumises à un contre-pouvoir.

Inspirée d'un fait divers atroce, l'histoire se situe dans le Los Angeles des années 30 reconstituées avec le soin et les moyens d'un grand studio d'Hollywood, en l'occurrence Universal. Eastwood, qui produit aussi le film, n'a négligé aucun détail pour donner à cette affaire de mère accablée par le rapt de son garçon un maximum de crédibilité. Cette crédibilité doit aussi beaucoup à Angelina Jolie, elle-même mère, qui malgré un état de grossesse avancée, n'a pas hésité à remplir son devoir médiatique devant les paparazzi déchainés sur la Croisette.

La trentaine modeste mais élégante, Mrs Collins est la vaillante chef d'un standard téléphonique, montée sur patins à roulettes, élevant seule un garçon d'une dizaine d'années.

Cette mère est un jour confrontée au pire des cauchemars: son garçon a disparu. Malgré les recherches touts azimuts, l'enfant reste introuvable. Au grand désespoir de sa mère qui n'a que ce seul bien. Or voici que, cinq mois plus tard, un garçonnet qui se prétend le disparu est exhibé devant la presse convoquée en nombre par des flics pas peu fiers d'eux-mêmes. Les autorités exultent, il y a là matière à redorer le blason de la police terni par de sales affaires de violences et de corruption.

Mais il y a un accroc de taille à ce scénario monté de toutes pièces: la mère ne reconnait pas son petit. Et s'obstine dans son refus. Epaulée par des témoins et un pasteur inflexible dans sa croisade contre les abus des forces supposées de l'ordre, elle va s'engager dans une bataille éprouvante, une descente aux enfers humains qui va tenir le spectateur en haleine pendant les 2h20 de projection. Et si le happy end ne peut-être à la clé d'une histoire aussi terrible, au moins le film laisse-t-il la satisfaction du devoir accompli.

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