Décarbonation de Fos-sur-Mer : environ 500 manifestants à Arles contre le projet d'une nouvelle autoroute électrique

Le gestionnaire du réseau de transport d'électricité RTE entend construire sur 65 kilomètres une nouvelle ligne électrique aérienne de 400.000 volts, reliant la commune de Jonquières-Saint-Vincent dans le Gard à la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer, dans les Bouches-du-Rhône. Entre zones naturelles et vastes exploitations agricoles, les enjeux d'acceptabilité s'annoncent immenses. Pourtant, cette nouvelle ossature électrique est indispensable pour la décarbonation de la région, affirme RTE.
(Crédits : Unsplash)

Xavier Piechaczyk, le président du gestionnaire du réseau de transport d'électricité RTE, avait commencé a préparé les esprits dès l'automne dernier devant les sénateurs. Si le développement des parcs éoliens et, dans une moindre mesure, des champs photovoltaïques, pose des questions d'acceptabilité, ce sera également le cas pour le développement de nouvelles autoroutes électriques, avait-il prévenu. Et, il ne s'était pas trompé.

Plusieurs centaines de personnes ont manifesté, ce dimanche, à Arles (Bouches-du-Rhône) contre un projet de ligne électrique aérienne à très haute tension destinée, selon ses promoteurs, à décarboner la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer, mais dont le tracé et les modalités suscitent l'opposition en Camargue et Provence. La manifestation, qui s'est déroulée dans le calme, a rassemblé 500 personnes, selon la police.

« Décarboner oui, saccager non » ou encore « Non au projet ligne THT » (très haute tension), pouvait-on lire sur les pancartes de manifestants réunis à Arles, au terme de plusieurs semaines d'une concertation préalable organisée par RTE.

Entre biodiversité et agriculture, des tracés qui dérangent

Cette nouvelle ligne électrique aérienne de 400.000 volts doit relier la commune de Jonquières-Saint-Vincent dans le Gard, au poste électrique de la Feuillade, situé dans la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer, dans les Bouches-du-Rhône, pour répondre à une très forte croissance des besoins électriques. Soit un tracé de 65 kilomètres de long.

« Nous sommes tout à fait favorables à la décarbonation de notre industrie. Nous ne sommes pas contre le projet, nous sommes simplement défavorables au trajet qui nous est proposé », a dit à l'AFP le maire d'Arles, Patrick De Carolis, présent à la manifestation.

Selon l'élu, des raisons économiques, agricoles, patrimoniales, mais aussi environnementales expliquent l'opposition au projet dont les différents tracés passent soit par le delta de Camargue, soit par des régions de Provence entre Gard et Bouches-du-Rhône.

« Nous bénéficions d'un territoire et d'une biodiversité assez remarquables », a-t-il souligné, espérant que des « solutions techniques » puissent être proposées « pour ne pas impacter notre paysage, qui est un des facteurs essentiels de notre économie ».

D'immenses pylônes « tous les 350 mètres »

Le projet « porte atteinte à la biodiversité en fragmentant des espaces naturels protégés qui servent aussi à la protection du climat, comme les marais du Vigueirat, des zones importantes pour les oiseaux, les prairies de la Crau », a pour sa part indiqué Laurent Tatin, biologiste de la conservation. Selon lui, il faut trouver « d'autres solutions que cette ligne aérienne pour ne pas nuire à la protection de la nature et de l'agriculture ».

Une pétition en ligne, lancée par l'association « Agir pour la Crau », réclame notamment de « relancer une concertation digne de ce nom » avec la saisie de la « Commission nationale du débat public » (CNDP). Dans ce texte, signé par plus de 23.000 personnes, l'impact visuel du projet est particulièrement décrié, avec un schéma représentant les pylônes de « la hauteur d'un immeuble de 20 étages », qui doivent être installés « tous les 350 mètres ». Et pour cause, même si RTE s'attache à enfouir de plus en plus de lignes électriques (comme le montre son bilan électrique 2022), la technologie souterraine reste exceptionnelle pour les lignes à 400.000 volts, dites de très haute tension.

Cette future autoroute électrique, dont la mise en service est prévue en 2028, doit permettre de répondre au boom de la demande électrique attendue dans la région PACA, passant de 6 gigawatts (GW) actuellement à 12 GW dans quelques années. Un doublement donc, qui correspond à une hausse équivalente, peu ou prou, à la puissance de cinq centrales nucléaires.

Une nouvelle ossature indispensable pour la décarbonation de la région ?

« L'ossature électrique de la région date des années 70. La région n'arrivera pas à faire sa décarbonation sans créer un nouveau réseau. L'objectif consiste donc à créer une nouvelle colonne vertébrale d'alimentation électrique, reliant la vallée du Rhône, où se situent plusieurs centrales nucléaires, à Fos-sur-Mer, pour permettre la décarbonation de toute la région PACA », expliquait, en novembre dernier, Gilles Odone, délégué territorial Méditerranée chez RTE.

Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, les usages doivent, en effet, s'électrifier à vitesse grand V, de la mobilité terrestre au chauffage, en passant par l'électrification des ports, mais aussi par la décarbonation des industriels. Or, la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer fait partie des quatre zones en tension identifiées par RTE. Les demandes de raccordement électriques y dépassent déjà les 5 GW.

Aux industriels déjà présents devant opérer leur transition, comme Arcelor Mittal, s'ajoutent de nouveaux entrants. C'est le cas de la start-up Carbon, qui prévoit de mettre en service une méga-usine de panneaux photovoltaïques dès 2025. La zone s'apprête également à accueillir de nombreux projets majeurs de production d'hydrogène comme GravitHY, H2V ou encore Hyvence.

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Commentaires 3
à écrit le 08/04/2024 à 16:00
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Dès que l’on veut faire quelque chose d’utile à l’intérêt du plus grand nombre, on en trouve toujours une poignée qui sont contre……

à écrit le 08/04/2024 à 7:45
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Oui finalement entre leur décarbonation et leur pollution de masse on voit pas trop la différence.

à écrit le 07/04/2024 à 20:13
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L'intérêt collectif prévaut sur l'intérêt particulier. Si les opposants gagnent, pas d'électricité, pas d'emplois..... Pourvu que ça dure !

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