Nos critiques théâtre de la semaine

« Les paravents », de Jean Genet, « Oui », de Thomas Bernhard : découvrez nos critiques théâtre de la semaine.
Les Paravents de Jean Genet.
Les "Paravents" de Jean Genet. (Crédits : LTD / Philippe Chancel)

Dramatique et poétique

« Les Paravents » de Jean Genet, Note : 4⭐/4

En un geste aussi audacieux qu'étrange, Arthur Nauzyciel installe l'action des Paravents sur un escalier monumental signé Riccardo Hernández. Un escalier blanc qui occupe tout l'espace du plateau de l'Odéon, en largeur et en hauteur, et qui varie selon les lumières. Les personnages apparaissent au sommet. Ils disparaîtront au même endroit quatre heures plus tard, sautant l'un après l'autre dans le vide, en silence. Morts et vifs se côtoient dans cette pièce que l'on ne peut mettre en scène sans pratiquer ellipses, coupes. Elle réunit une centaine de figures, sur fond d'intrusion coloniale dans un pays qui ne peut être que l'Algérie de la guerre. Dans la salle, peu se souviennent du scandale que provoqua en 1966 dans cette même salle la création par Roger Blin et la Compagnie Renaud-Barrault de cette œuvre unique. Plus d'une quinzaine d'interprètes se partagent les partitions. Seuls les acteurs du trio de la famille des Orties - la mère, Marie-Sophie Ferdane ; le fils Saïd, Aymen Bouchou ; Leïla, Hinda Abdelaoui - et de Kadidja, Bénicia Makengele, ne jouent qu'un personnage. Arthur Nauzyciel parvient magistralement à déployer la puissance épique, poétique des Paravents, sans amoindrir ce qu'il y a de politique dans l'œuvre. La distribution de grand talent, dans les costumes et maquillages de José Lévy, incarne le caractère carnavalesque féroce et le désir d'au-delà qui innervent toute l'œuvre.

Odéon-6e, à 19 h 30 du mardi au samedi, à 15 heures dimanche. Durée : 4 heures (2 h 30 - entracte - 1 h 15). Jusqu'au 19 juin. Tél. : 01 44 85 40 40. theatre-odeon.eu

Mélancolique

« Oui » de Thomas Bernhard, Note : 4⭐/4

Publié en France il y a près de quarante-cinq ans dans une traduction de Jean-Claude Hémery pour l'éditeur L'Arche, le récit de Thomas Bernhard Oui est moins connu que ses autres textes. Comme ils l'avaient fait pour Des arbres à abattre, Célie Pauthe, mise en scène, Claude Duparfait, jeu, en proposent une version scénique aussi simple apparemment que puissante et bouleversante. L'écrivain autrichien (1931-1989) utilisait l'expression « être vital » pour dire le besoin d'altérité, d'amitié, d'amour, de dialogue. Oui est un conte. Sur le plateau vaste et nu des Ateliers Berthier, Claude Duparfait, assis sur une chaise, un grand sac informe par terre, à côté, s'adresse à nous. Il raconte, musicalement accordé au personnage. L'homme vit, solitaire, dans une région retirée de Haute-Autriche. Un étrange homme d'affaires y a fait édifier une sinistre maison de béton. Il y a abandonné sa compagne. Le narrateur la nomme « la Persane ». Ensemble, ils vont se promener, inlassables, dans la forêt de mélèzes. Se taire, parler, se livrer, se comprendre. Lier des âmes. Un film occupe tout le mur du fond. On y découvre Mina Kavani, belle et ultrasensible, voix envoûtante. Elle disparaîtra comme elle est apparue, sans un mot. Et l'on a le cœur déchiré.

Ateliers Berthier de l'Odéon, à 20 heures du mardi au samedi, à 15 heures dimanche. Durée : 1 h 30. Jusqu'au 15 juin. Tél. : 01 44 85 40 40. theatre-odeon.eu

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