Grande-Bretagne : Boris Johnson annonce sa démission

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Boris johnson annonce sa demission[reuters.com]
(Crédits : Henry Nicholls)

par Kate Holton et Elizabeth Piper

LONDRES (Reuters) - Boris Johnson, lâché par des dizaines de membres de son gouvernement depuis deux jours dans le sillage d'une série de scandales, a annoncé sa démission jeudi tout en précisant qu'il resterait Premier ministre jusqu'à la désignation du nouveau chef du Parti conservateur britannique.

"Il est désormais clair que les parlementaires du Parti conservateur veulent un nouveau dirigeant pour le parti et donc un nouveau Premier ministre et (...) la procédure de désignation de ce nouveau dirigeant devrait démarrer dès maintenant", a-t-il déclaré lors d'une brève allocution devant le 10, Downing Street à Londres.

Nommé en juillet 2019 pour succéder à Theresa May à la direction du Parti conservateur, s'assurant ainsi sa nomination à la tête du gouvernement, Boris Johnson a ensuite triomphé dans les urnes, lors d'élections anticipées en décembre de la même année, mais il a été affaibli par une série de scandales ces derniers mois.

Le dernier en date, provoqué par la démission de l'élu conservateur Chris Pincher en raison d'accusations d'inconduite sexuelle, a poussé mardi soir les ministres des Finances et de la Santé, Rishi Sunak et Sajid Javid, à présenter leur démission.

Une cinquantaine de membres de l'exécutif britannique ont quitté leurs fonctions dans la foulée en mettant explicitement en cause le Premier ministre, désormais jugé inapte à gouverner le pays.

"Sa démission était inévitable", a déclaré le vice-président du Parti conservateur, Justin Tomlinson, sur Twitter. "En tant que parti, nous devons rapidement nous unir et nous concentrer sur ce qui compte. Les temps sont graves sur de nombreux fronts."

Les conservateurs vont désormais devoir élire un nouveau dirigeant, une procédure qui pourrait prendre environ deux mois mais bon nombre de responsables réclament un départ immédiat de Boris Johnson et son remplacement par son vice-Premier ministre, Dominic Raab.

MENSONGES

Le chef de file du Parti travailliste, principale formation d'opposition, Keir Starmer, a prévenu qu'il déposerait une motion de censure si les Tories ne remplaçaient pas immédiatement Boris Johnson.

"S'ils ne se débarrassent pas de lui, alors le Labour demandera un vote de défiance, dans l'intérêt général, parce qu'on ne peut pas continuer avec ce Premier ministre s'accrochant au pouvoir pendant des mois et des mois", a-t-il dit.

Cette crise politique survient alors que l'économie britannique est à la peine, les répercussions de l'offensive russe en Ukraine étant venues s'ajouter à l'impact toujours perceptible de la pandémie de COVID-19.

Boris Johnson a résisté jusqu'au bout mais la nouvelle avalanche de démissions jeudi matin - huit ministres ou secrétaires d'Etat, dont certains nommés il y a deux jours - a rendu sa position intenable et menaçait le gouvernement de paralysie.

Agé de 58 ans, Boris Johnson, ancien journaliste et maire de Londres, avait promis à son arrivée à Downing Street de mener à bien le Brexit, le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne dont il fut l'un des ardents défenseurs lors de la campagne référendaire de 2016.

Si son style fantasque n'a pas toujours fait l'unanimité dans les rangs conservateurs, beaucoup de Tories l'ont crédité d'avoir su élargir l'électorat du parti en conquérant en 2019 des bastions du Parti travailliste.

Mais les scandales de ces derniers mois, en particulier le "Partygate" - des fêtes clandestines organisées à Downing Street pendant les confinements du début de la pandémie de COVID-19 - ont peu à peu fragilisé sa position, fait chuter sa cote de popularité dans l'opinion et accentué la fronde au sein du Parti conservateur.

La dernière crise en date a éclaté avec la démission il y a une semaine de Chris Pincher, promu en février dernier au rang de chef adjoint chargé de la discipline parlementaire, accusé d'avoir fait des avances appuyées à des collègues hommes dans un club privé.

Le Premier ministre a présenté des excuses publiques lorsqu'il est apparu que Chris Pincher avait déjà été visé plusieurs fois pour des plaintes pour inconduite sexuelle avant sa promotion par Boris Johnson au poste de "deputy chief whip". Boris Johnson s'est défendu en disant avoir oublié ces incidents.

(Reportage Kate Holton et Elizabeth Piper, version française Myriam Rivet et Jean-Stéphane Brosse, édité par Bertrand Boucey)