2023, année de tous les dangers pour l'industrie française

Après une année marquée par la guerre en Ukraine et l'inflation, l'industrie tricolore entame 2023 dans un épais brouillard. Entre les menaces de coupure d'électricité, les prix élevés de l'énergie, l'accélération de la décarbonation, les industriels doivent faire face à d'immenses défis pour cette nouvelle année.
Grégoire Normand
Emmanuel Macron sur le site d'Alsachimie en janvier 2022.
Emmanuel Macron sur le site d'Alsachimie en janvier 2022. (Crédits : Reuters)

Le 17 janvier 2022, le président de la République Emmanuel Macron saluait en grande pompe « la décision historique » du géant allemand de la chimie BASF d'investir 300 millions d'euros pour faire du site de Chalampé dans le Bas-Rhin « le champion européen du nylon ». En pleine campagne présidentielle, le chef de l'Etat continuait de promouvoir les investissements étrangers en France. Et il déroulait le tapis rouge aux grands patrons à l'Elysée à l'occasion du sommet « Choose France » quelques jours plus tard.

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Un an après, la donne a complètement changé. La guerre en Ukraine a douché les espoirs d'une reprise économique solide partout sur le Vieux continent. En France, le gouvernement ne cesse de répéter que l'économie « résiste » et maintient une prévision de 1% de croissance du PIB dans le budget 2023. Pourtant, la plupart des clignotants sont au rouge en ce début d'année. L'Insee table sur une croissance de seulement 0,1% au premier trimestre 2023 après un premier recul en fin d'année 2022 (-0,2%) et les menaces de récession se propagent en Europe. Dans ce contexte troublé, l'industrie tricolore risque de payer un lourd tribut.

Le groupe agroalimentaire Cofigéo qui regroupe des marques emblématiques (William Saurin, Garbit, Panzani, Raynal et Roquelaure) a annoncé ce lundi 2 janvier la mise à l'arrêt de ses quatre principaux sites de production « pour faire face à la hausse spectaculaire des prix de l'énergie». Des centaines d'ouvriers et d'employés vont se retrouver au chômage partiel. Et l'hécatombe pourrait se poursuivre dans les mois à venir. L'année 2023 pourrait se transformer en catastrophe pour le « made in France » déjà affecté par les longues années de pandémie.

Des prix de l'énergie toujours élevés

Les prix du gaz et de l'électricité sur les marchés de gros ont considérablement chuté à la fin de l'année 2022. Après avoir atteint un pic à l'automne, les courbes de prix ont plongé. La douceur des températures de l'automne et du début de l'hiver ont fait chuter la consommation de gaz en Europe. « Les prix de l'énergie sont revenus à des prix plus raisonnables. Les importations de GNL ont permis de remplacer une partie du gaz russe », souligne François Geerolf, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) et enseignant à l'Université de Californie à Los Angeles (UCLA) interrogé par La Tribune.

« En revanche, les prix du gaz ont entraîné une perte d'attractivité du site Europe par rapport aux Etats-Unis et à la Chine », ajoute le chercheur. Plusieurs entreprises tricolores ont déjà annoncé leur volonté de délocaliser une partie de leur production si les prix de l'énergie restaient durablement élevés en Europe.

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En outre, les statisticiens de l'Insee estiment que les prix de l'électricité dans l'industrie vont être plus élevés cette année qu'en 2022. Les prix pourraient augmenter en moyenne de 90% en 2023 contre 40% en 2022. Beaucoup de contrats sont indexés sur les prix de marché ou vont être renouvelés d'ici la fin de cette année. Une grande partie des industriels (huit sur dix) interrogés dans les dernières enquêtes de conjoncture signalent que beaucoup de contrats pluriannuels à prix fixe ont été renouvelés à la fin de l'année 2022 ou doivent être renouvelés au cours de cette année.

« Dans l'industrie, 42 % des entreprises anticipent une augmentation de 100 % ou plus du prix auquel elles achèteront leur électricité en 2023 », soulignent les auteurs de la dernière note de conjoncture.

Face à ces envolées, le gouvernement a prévu des mesures plus ciblées que le bouclier tarifaire (amortisseur électricité, guichet d'aide pour le paiement des factures de gaz et d'électricité) mais beaucoup d'entreprises pourraient passer à côté de tous ces dispositifs. « Le gouvernement est dans le brouillard. La commission de régulation de l'énergie n'a pas accès à toutes les données sur les marchés de l'énergie. Beaucoup de données sont manquantes. On a des difficultés à mesurer l'ampleur du problème », ajoute l'économiste François Geerolf. « Ce qui rend l'action publique plus difficile ».

La décarbonation, une impérieuse nécessité

L'autre grand défi qui attend l'industrie française et européenne est la décarbonation. A l'automne dernier, Emmanuel Macron a réuni les patrons des 50 sites les plus polluants en France sous les dorures de l'Elysée en leur demandant de diviser par deux leurs émissions de CO2 d'ici 10 ans. Cet objectif doit passer par des contrats de réduction entre les entreprises et l'Etat.

Le chef de l'Etat s'est engagé à gonfler l'enveloppe des aides de 5 milliards d'euros si les entreprises remplissent leur mission. A l'échelle européenne, le plan « Fit for 55 » promu par la Commission européenne pousse les Etats à atteindre la neutralité carbone d'ici 2050 en réduisant drastiquement leurs émissions d'ici 2030.

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Malgré toutes ces bonnes intentions, les associations et organisations non gouvernementales ont pointé le manque de conditionnalité dans les aides publiques. « Cette annonce est encourageante mais reste malheureusement trop centrée sur les solutions technologiques et conditionnée au bon vouloir des industriels, auxquels aucune obligation n'est à ce jour imposée pour atteindre les objectifs fixés », avait expliqué Léa Mathieu Figueiredo, responsable Industrie Lourde au RAC (Réseau action climat) dans un communiqué. « En outre, la décarbonation est un sujet technique », explique François Geerolf. « L'Etat n'a pas toujours les compétences en interne pour évaluer les coûts de cette décarbonation ».

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Un plan France 2030 qui peine parfois à convaincre

La politique industrielle d'Emmanuel Macron pour ce second quinquennat repose notamment sur le plan France 2030. Présenté devant un parterre de ministres, de patrons et d'étudiants en octobre 2021 à l'Elysée, cette enveloppe dotée d'un premier montant de 34 milliards d'euros vise à réconcilier « la France des usines et la France des startup ».  Mais plus d'un an après sa présentation, ce plan peine toujours à convaincre malgré l'ajout de crédits substantiels (plus de 20 milliards d'euros).

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« Ce plan fait partie de la politique industrielle mais on est plus près du financement de la Recherche et développement que de la production. Les Etats-Unis ont mis l'accent sur la production. Il y a une vraie prise de conscience depuis la guerre en Ukraine dans les milieux politiques. En revanche, il y a un manque du côté des universitaires et des économistes parfois opposés à l'industrie. Les investissements dans l'industrie de l'énergie se font dans le temps long et ne doivent pas s'arrêter à la fin du quinquennat. Ce n'est pas évident pour le politique de retrouver ce sens du temps long », conclut l'économiste François Geerolf de l'université UCLA.

Grégoire Normand
Commentaires 4
à écrit le 03/01/2023 à 19:27
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Rien de mieux que d'e.....der les français pour ne pas s'.....rder ! Je prépare mon hélicoptère ! ;-)

à écrit le 03/01/2023 à 19:17
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Bonjour, ils faut dire que la classe laborieux est fort désappointé.... Ons se fait baisser pour les hausse de salaires ( sa ne suis pas l'inflation) Ons se fait baisser pour le chômage ( grosse cotisation) pour un minimum de chômage ( s'est simple...

le 04/01/2023 à 4:12
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Votre redaction est incomprehensible a lire.

le 04/01/2023 à 14:38
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Macron vient d'être réélu, avec une quasi majorité à l'assemblée, en majorité, le français n'agit pas, ne réfléchit pas, préfère la baballe et autres futilités.

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