Assurance-chômage : le système de bonus-malus fait à nouveau débat

Dans une note très éclairante, deux économistes de l'institut des politiques publiques (IPP) plaident pour un élargissement du système de bonus-malus appliqué à l'employeur à l'ensemble des secteurs pour lutter contre l'abus de contrats courts.
Grégoire Normand

L'agenda social pour la fin de l'année s'annonce chargé. Alors que la reprise de l'activité se déroule dans un contexte sanitaire dégradé, les plans de licenciement et les destructions de postes se multiplient. Après avoir mis une pause dans le calendrier des réformes, le gouvernement a convié les organisations syndicales et patronales ce mercredi 30 septembre pour entamer un nouveau cycle de discussions sur l'application de la réforme controversée de l'assurance-chômage mise sur pause avec la pandémie.

A cette occasion, les économistes de l'institut des politiques publiques ont planché sur les effets de la modulation des cotisations patronales dans le financement de l'assurance-chômage. Le système de bonus-malus, dans le viseur de certains employeurs, vise à appliquer un taux de cotisation réduit lorsque les effectifs sont stables et un taux plus élevé en cas de rotation élevée de la main d'oeuvre. Dans une note rendue publique ce mercredi, les auteurs, François Fontaine et Basile Vidalenc,  plaident pour un système de bonus-malus afin d'améliorer la stabilité du marché du travail. "Un système de bonus-malus permet de moduler les cotisations à l'assurance chômage des employeurs en fonction de l'équilibre entre leurs cotisations et les dépenses d'indemnisation qu'ils provoquent lorsqu'ils se séparent d'un salarié. Un tel système permet de stabiliser le marché du travail, à la fois en limitant les licenciements temporaires et en limitant les fluctuations de l'emploi en cas de choc agrégé".

Le système de bonus-malus ne pèse pas sur l'emploi

La multiplication des embauches en contrats courts (CDD) et la réduction de la durée des contrats en France ont alimenté les débats sur les conséquences d'un tel système sur le financement de l'assurance-chômage. Lors de la présentation de sa réforme à l'été 2019, le gouvernement avait annoncé sa volonté de lutter contre l'usage abusif des contrats courts en instaurant un système de bonus-malus. Cette mesure avait provoqué l'ire d'une partie du patronat qui a fortement recours aux emplois saisonniers, contrats courts et intérimaires.

En outre, certains employeurs contestaient un tel système en avançant qu'il pèserait sur l'embauche des salariés. En réalité, les économistes de l'IPP, en s'appuyant sur la littérature économique américaine, montrent que ce mécanisme a des répercussions positives sur l'emploi.

"Tout d'abord, en réponse à la crainte que le bonus-malus puisse peser sur l'emploi, les études existantes ont montré l'absence d'effets négatifs sur le niveau d'emploi, et cela pour toutes les qualifications. Aux États-Unis, l'effet serait même légèrement positif. La raison en est simple: le malus augmente le coût du travail dans certaines entreprises mais le bonus le réduit dans d'autres. Comme ces deux effets sont présents au sein de chaque secteur, la modulation va réallouer l'emploi entre secteurs mais aussi entre entreprises d'un même secteur et non peser sur le niveau global d'emploi."

Par ailleurs, il permet de préserver "une stabilité sur le marché du travail" et peut servir de "stabilisateur automatique" en cas de baisse de l'activité ou de crise comme à l'heure actuelle.

Des secteurs subventionnés par d'autres

L'une des critiques du système assurantiel dans sa forme actuelle régulièrement évoquée par les économistes est son mode de financement. Pendant longtemps, beaucoup de secteurs qui emploient très souvent des contrats courts mettent fin à des collaborations pour réembaucher les mêmes personnes par la suite. Outre les abus et la multiplication des contrats à outrance dans certains secteurs dénoncés par les syndicats, ce système fait financer des périodes d'intercontrat par la collectivité alors que l'objectif de ce système paritaire est de préserver la baisse des revenus en cas de rupture d'un contrat. Il en ressort un déséquilibre entre la balance des cotisations et celle des allocations pour chaque individu. Les chercheurs de l'IPP pointent des déséquilibres criants. Sur la période 2003-2012, "les secteurs dont la balance est négative sont ceux des arts et spectacles, de l'intérim, de l'hôtellerie-restauration, des "autres activités de service", ceux du secteur primaire (agriculture, pisciculture, pêche...), l'enseignement et l'immobilier".

Un système de modulation généralisé à tous les secteurs

Pour tenter de mettre en place un système plus équilibré, les deux auteurs plaident pour la mise en oeuvre d'une modulation de la cotisation des employeurs qui "doit être généralisée à tous les secteurs et à toutes les entreprises" et pas seulement aux 7 actuellement concernés. La réforme de l'assurance-chômage promue par le gouvernement prévoir un volet sur cette modulation des taux. "Cette avancée mérite d'être préservée" résument-ils. Les chercheurs avancent néanmoins que l'exécutif devrait appliquer "une variable prenant en compte directement les dépenses et cotisations de chaque entreprise" pour mettre en oeuvre cette modulation plutôt que de s'appuyer sur le taux de séparation.

Grégoire Normand
Commentaires 12
à écrit le 30/09/2020 à 15:55
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Si l'objectif général est légitime son application sans exceptions serait catastrophiques dans certains secteurs. Dans le spectacle vivant par exemple où les compagnies ne vivent elles mêmes que par intermittence (sans jeu de mots...), comment voulez...

le 30/09/2020 à 16:41
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Quel rapport avec le malus/bonus de Pôle emploi ? Cordialement

le 30/09/2020 à 17:36
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Le choix des CDD continuelles ( abus ) par des employeurs tous secteurs confondus Vient de leur trait de caractère «  être un avare et accroc au fric «  tout pour eux et rien pour les autres ( une maladie )

le 30/09/2020 à 21:45
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Il y a visiblement des "lecteurs" qui ne comprennent rien à ce qu'ils lisent....

le 01/10/2020 à 1:07
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Les chaines de TV, publiques comme privées, font un usage immodéré d'intermittents du spectacle, y compris pour des postes stables reconduits plusieurs années d'affilée, y compris pour des postes (secrétaires, standardistes, électriciens etc) qui n'o...

le 01/10/2020 à 12:44
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Totalement d'accord mais moi je parlais des compagnies de spectacle vivants. Ce bonus malus a existé il y a quelques années, il s'était traduit par une augmentation du taux de cotisation au chômage, y compris pour ce type d' "entreprises" qui n'ont é...

à écrit le 30/09/2020 à 15:16
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Une bonne moitié des effectifs de pôle emploi sont inutiles (nuisibles?)

à écrit le 30/09/2020 à 12:41
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De ce que je peux savoir, si l'on part du principe de constater , allez, d'ici la fin de la semaine prochaine, nous pourrions avoir une perspective sur la question ! Allez, exemple: comptez le nombre de serruriers dans le centre de paris depuis s...

à écrit le 30/09/2020 à 11:32
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Difficile de débattre quand les populations ne savent pas ce qu’est le pôle emploi actuel! Harcèlement.. malgré que les chômeurs préviennent d’un CDD en cours . Pas des pressions pour les RSA mais des pressions uniquement pour les personnes qui per...

à écrit le 30/09/2020 à 11:32
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Difficile de débattre quand les populations ne savent pas ce qu’est le pôle emploi actuel! Harcèlement.. malgré que les chômeurs préviennent d’un CDD en cours . Pas des pressions pour les RSA mais des pressions uniquement pour les personnes qui per...

à écrit le 30/09/2020 à 11:23
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En 3 ans les macronistes ont aggravé la vie quotidienne des populations ordinaires . Un exemple concret : En province , les assurances immobilières ont pris une part de marche juteuse en proposant aux propriétaires angoissés une assurance impayés :...

le 30/09/2020 à 15:52
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