
Indemnité inflation, chèque énergie, bouclier tarifaire... le gouvernement a multiplié les annonces ces dernières semaines pour faire face à la hausse du coût de la vie. À ces mesures temporaires, s'ajoutent des annonces plus pérennes comme la baisse de la taxe d'habitation pour les 20% des ménages les plus aisés, l'allocation aux adultes handicapées (AHH) ou le contrat d'engagement pour les jeunes. Au total, le coût budgétaire de l'ensemble de ces mesures est évalué à 7,4 milliards d'euros pour le budget 2022 selon une étude des économistes de l'Institut des politiques publiques (IPP) et du Cepremap (Centre pour la recherche économique et ses applications) dévoilée ce mardi 16 novembre. "La hausse moyenne du revenu disponible des ménages cache des disparités importantes" a déclaré l'économiste de l'IPP, Brice Fabre, lors d'un point presse.
Le pouvoir d'achat, question cruciale de la présidentielle
De son côté, le gouvernement a estimé cet arsenal de dispositifs à 6,93 milliards sachant qu'il existe encore un flou sur le revenu d'engagement des jeunes. Même si le coût de ce dernier est estimé à 550 millions d'euros, il pourrait varier en fonction des critères retenus. Ce qui explique une grande partie de la différence entre l'approche des économistes et celle de l'exécutif.
Dans leur dernière évaluation, les économistes ont ainsi évalué l'impact redistributif de ces mesures pérennes et temporaires sur les différentes catégories de population découpée en centiles. À cinq mois de l'élection présidentielle, la question du pouvoir d'achat devient particulièrement cruciale alors que les ménages vont devoir régler des factures d'énergie toujours plus importantes à l'approche de l'hiver.
Les mesures du budget 2022 bénéficient surtout aux plus riches
Le président Macron va avoir du mal à se défaire de son étiquette de "président des riches" qui lui colle à la peau depuis le début de son quinquennat. En dépit des toutes dernières annonces d'urgence pour lutter contre la flambée des prix, les grands gagnants de toutes ces décisions budgétaires devraient être les ménages situés au sommet de la pyramide. Dans leurs travaux, les économistes de l'IPP montrent que les plus importantes hausses de niveaux de vie en valeur absolue concernent avant tout les plus hauts centiles de niveaux de vie. À l'opposé, les ménages situés en bas de l'échelle enregistrent des gains biens inférieurs.
Dans une approche en pourcentage du niveau de vie, les gains apparaissent plus favorables pour les ménages les plus modestes. Cette différence n'est pas vraiment surprenante. Déjà, plusieurs économistes avaient rappelé à l'occasion de la publication du rapport économique, social et financier (RESF) annexé au budget 2022, que la présentation en valeur absolue ou en % pouvaient entraîner des différences importantes. Il reste que les dépenses contraintes liées aux factures d'énergie, aux abonnements ou aux transports pèsent généralement plus sur les ménages les plus modestes. Dans le contexte de flambée des prix, les familles situées en bas de l'échelle sont les plus exposées.
Des effets redistributifs au bas et au sommet de la pyramide
Au final, les effets redistributifs des mesures précitées se concentrent principalement sur le bas et sur le sommet de l'échelle sociale. Le premier centile de population bénéficie ainsi d'une hausse de 3% de son niveau de vie. Les gains ne cessent de décroître jusqu'au 70e centile avant d'augmenter à nouveau pour les trente derniers centiles. Cette évolution des gains pour les catégories modestes et classes moyennes s'explique principalement par le caractère forfaitaire de l'indemnité inflation de 100 euros.
Cette enveloppe cible la plupart des personnes gagnant moins de 2.000 euros par mois. Le gain de niveau de vie en pourcentage pour une personne au RSA sera plus important que pour un salarié proche de ce plafond de 2.000 euros. De l'autre côté du spectre, les gains redeviennent croissants à partir du dernier quartile en raison du dégrèvement de la taxe d'habitation pour les 20% des ménages restant. La taxe d'habitation pour ces catégories avaient déjà commencé à baisser en 2021 (-30%). Cette baisse doit se poursuivre en 2022 (-65%) avant l'exonération totale prévue en 2023.
Le 1% du sommet de la pyramide, grand gagnant du quinquennat Macron
Sans surprise, les grands gagnants du quinquennat Macron se situent au sommet de la pyramide. Les économistes expliquent que les 0,1% les plus riches ont vu leur niveau de vie bondir de 4,1% sur l'ensemble du quinquennat. Le Top 1% enregistre, quant à lui, une hausse de 2,8%. À l'opposé, les 5% les plus modestes ont vu leur niveau de vie reculer sur la période 2017-2022. "Il y a une hausse générale du niveau de vie sur quasiment l'ensemble de la population d'environ 1,5% durant le quinquennat. Sur les premiers centièmes, il y a des effets irréguliers. Pour le dernier centième qui correspond à la catégorie avec le niveau de vie le plus élevé, la hausse est d'environ 2,8%" a affirmé l'économiste de l'IPP Paul Dutronc-Postel.
Si une grande majorité des Français devrait enregistrer une hausse du niveau de vie durant le mandat de Macron, les inégalités pourraient se creuser entre le bas et le sommet de la distribution. Cet écart pourrait alimenter le sentiment d'injustice déjà bien ancré chez une partie de la population française.