Budget : la Cour des comptes veut faire le grand ménage dans les niches fiscales

Le président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, déplore le manque de contrôle sur l'efficacité des niches fiscales en France. En pleine préparation pour le budget 2024, le gouvernement est à la recherche de 10 milliards d'euros d'économies pour l'année prochaine. Il a déjà prévu de s'attaquer à certaines niches fiscales sur le carburant des professionnels. Mais il risque de se heurter à un mur d'oppositions comme lors du premier quinquennat d'Emmanuel Macron.
Grégoire Normand
La Cour des comptes vient de dévoiler 9 notes thématiques. Elles visent  à présenter des éléments de doctrine, a expliqué Pierre Moscovici lors d'un point presse.
La Cour des comptes vient de dévoiler 9 notes thématiques. Elles "visent à présenter des éléments de doctrine", a expliqué Pierre Moscovici lors d'un point presse. (Crédits : Reuters)

Le gouvernement reste inflexible sur le financement de la transition. L'exécutif ne souhaite en aucun recourir à l'endettement ou à l'imposition pour injecter des milliards d'euros dans les investissements « verts ». Après la publication du rapport de l'économiste Jean Pisani-Ferry et de l'inspectrice des finances Selma Mahfouz, fin mai, le ministre des Comptes publics Gabriel Attal avait expliqué sur l'antenne de France Info que « s'endetter pour investir dans la transition était utile pour le pays, la planète, l'économie, les recettes fiscales [...]. Mais la priorité est le désendettement de notre pays». Au cours du premier semestre, l'exécutif a mené une revue des dépenses  pour tenter de trouver des économies. L'objectif est d'économiser entre 10 et 12 milliards d'euros par an.

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Pour tenter de redresser les finances publiques, la Cour des comptes recommande dans une note dévoilée ce jeudi 6 juillet de faire un grand ménage dans les niches fiscales. «Le montant des dépenses fiscales [des réductions d'impôts, ndlr] a augmenté de 16% en dix ans en euros constants. L'efficacité des dispositifs fiscaux n'est pas évaluée », a regretté le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici lors d'un point presse. Alors que Bercy procède aux derniers arbitrages avant la finalisation du projet de loi de finances (PLF2024) pour 2024, l'institution financière espère bien apporter sa pierre à l'édifice budgétaire.

Budget 2023 : 465 niches fiscales pour un montant colossal de 94 milliards d'euros

Au cours de leurs travaux, les magistrats ont identifié 465 niches fiscales dans le budget 2023 pour un montant colossal de 94 milliards d'euros, soit environ 3,6% du produit intérieur brut (PIB). En 2013, la valeur des niches fiscales s'élevait à 73 milliards d'euros. Une très vaste majorité (90%) de ce total se concentre sur trois impôts : la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés. Malgré les promesses nombreuses de raboter une partie de ces dispositifs, leur nombre n'a cessé de grimper.

Ils représentent en outre une perte substantielle de recettes publiques à un moment où la France s'est engagée à réduire son déficit et sa dette d'ici 2027. « Au vu de leur montant, les dépenses fiscales constituent un enjeu majeur pour le respect de la trajectoire des finances publiques », soulignent les fonctionnaires.

En Europe, la France tient une place « singulière ». Le poids des crédits d'impôt rapporté au PIB est trois fois supérieur à la moyenne du Vieux continent (0,9% contre 0,3%). Régulièrement, le crédit d'impôt pour la recherche (CIR) fait l'objet de débats enflammés au sein des économistes. Cet outil est parfois accusé de faciliter l'optimisation fiscale des entreprises. Mais les gouvernements successifs ont souvent fait marche arrière sur les tentatives de réforme de cette niche controversée.

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Des niches fiscales « brunes » dans le viseur de l'exécutif

Lors des assises des finances publiques fin juin, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a expliqué qu'il voulait s'attaquer aux avantages fiscaux dont bénéficient les professionnels du bâtiment, des travaux publics et les agriculteurs. Sur ces sujets explosifs, l'exécutif a promis une mise en œuvre « progressive d'ici 2030 ».

Déjà, lors du premier quinquennat Macron, le gouvernement avait déjà promis de revoir ces dépenses fiscales. Mais il s'était heurté à la fronde des secteurs du BTP et des travaux publics. Face aux craintes, Bruno Le Maire a promis « des mesures de compensation ».

Mieux cibler les aides aux entreprises pour éviter « la captation »

Parmi les autres leviers potentiels d'économies abordés dans les notes de la Cour figurent les aides aux entreprises. En additionnant les mesures d'urgence pour faire face au Covid et les mesures du plan de résilience mises en place au printemps 2021, le coût total est estimé à 94 milliards d'euros. Et il grimpe à plus de 260 milliards d'euros en prenant en compte les prêts garantis par l'Etat (PGE) et les reports de cotisation. « Ces mesures se sont révélées efficaces mais les contrôles a priori ont été très limités. Certaines aides ont été octroyées sans vérification », a déclaré Pierre Moscovici lors de la réunion avec les journalistes.

Face aux risques de fraudes, la juridiction propose « de consacrer le caractère temporaire des dispositifs d'urgence comme les PGE ». La Cour « recommande de mieux cibler les aides pour limiter les risques de captation et de saupoudrage ». Il faut également « des contrôles plus efficaces » a conclu Pierre Moscovici. Reste à savoir si l'ancien ministre des Finances sous François Hollande sera entendu par le gouvernement lors des prochaines crises.

Grégoire Normand
Commentaires 13
à écrit le 08/07/2023 à 7:58
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C´est en général qu´il faut arrêter la gabegie, et il y a des moyens hyper simple, comme la suppression du pass-culture (soit habituer les jeunes à recevoir de l´argent qu´ils ne réclament pas, et qui ne sert à rien). Il y a aussi les envois papier l...

à écrit le 07/07/2023 à 13:06
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Raboter les niches fiscales pour trouver quelques dizaines de milliards. Soit. Mais cela va mécaniquement faire monter le taux de prélèvements obligatoires, pour lequel nous sommes déjà les champions d'Europe et de l'OCDE. Ce qui est inacceptable. Ma...

le 07/07/2023 à 18:37
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Oui, c'est exactement ça. Ils arrivent à parler de dépense fiscale comme si c'était un cadeau généreux de l'état ...alors que c'est une attenuation ponctuelle de prédation.

à écrit le 07/07/2023 à 12:47
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Tiens donc ! Haro sur les niches fiscales quand on ne sait pas gérer son argent ! La gabegie au sommet de l'Etat et, le pire, ça continue !

à écrit le 07/07/2023 à 11:01
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On peut évoquer la "niche Copé ", qui défiscalise partiellement sous certaines conditions les bénéfices réalisés par une entreprise lorsqu’elle revend les parts qu’elle détenait dans une autre. Lorsqu’elle a été créée, sous Nicolas Sarkozy, son coût...

à écrit le 07/07/2023 à 10:38
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Diminuer les dépenses fiscales et autres? Que fait notre grand argentier? Ce n'est pas le travail de la Cour des Comptes, présidée, "comme il se doit" par un énarque, ancien ministre xdes finances.

à écrit le 07/07/2023 à 8:59
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Retenons qu'aucun investissement vert ne sera fait par l'impôt ou l'emprunt. Donc peu sera fait. Conséquences, une aggravation du climat: sécheresse, pénurie d'eau, de neige, inondations , tempêtes selon les saisons. Perso, face au changement clima...

le 07/07/2023 à 9:50
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L'existence du réchauffement climatique a été mis en évidence par un scientifique il y a déjà 100 ans, et pourtant les grands pollueurs n'ont pas changé leur dogme éconocide. Quoi que l'on fasse aujourd'hui, le réchauffement est effectivement inéluct...

à écrit le 07/07/2023 à 7:52
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La cours des comptes n'a aucun pouvoir, on le voit avec pôle emplie qu'elle étrille depuis des années et qui n'a pas changé et avec bien d'autres aberrations qu'elle soulève mais qui ne sont suivis d'aucun effet.

à écrit le 07/07/2023 à 6:52
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Extraordinaire !!! Certains devraient aller prendre un cours de comptabilité 1ere année! On apprend les différents comptes! Une charge et un non produit, c'est pas la même chose! Les seules économies que ka France sait faire, c'est augmenter les impô...

à écrit le 07/07/2023 à 2:47
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Moscovici le disciple de Dsk. Ben voyons. Bla bla bla ! On va prendre aux riches, lol, depuis le temps les riches n'auraient plus rien ! Hé mec, tu te trompes relis ton papyrus, tu parles de la classe moyenne là ! . Pharaon a dit : Pour construire ...

le 07/07/2023 à 14:27
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On est riche avec 4000€ de revenus par mois pour un foyer, on peut donc vous prélever 3000€. :-) Vous ne voyez que les ultra-riches. Il y en a peu, c'est pas normal dans un grand pays, manque de vocations, de talents, d'envie de le devenir ? "tu par...

le 07/07/2023 à 17:03
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L'Observatoire des inégalités part du niveau de vie médian qui est de 1.836 euros par mois. La moitié des Français vivent avec moins, l’autre moitié avec plus. L’observatoire multiplie ce niveau de vie médian par deux. Selon lui, un Français seul est...

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