Si, en 2021, les défilés du 1er Mai, qui avait fait leur retour après une année d'interruption due au Covid, avaient été troublés par de nombreux incidents et affrontements (à Lyon et surtout à Paris), le cru 2022 devrait être bien moins agité malgré une forte mobilisation attendue. Selon Le Parisien, l'analyse des forces de l'ordre se résume ainsi: « Beaucoup de monde, mais moins d'incidents que l'année dernière. »
Ce 1er-Mai 2022, jour de la fête du Travail et de traditionnelle manifestation des syndicats - situé à un moment plutôt opportun, entre second et "troisième tour", comprendre avant les élections législatives - sera l'occasion pour les organisations représentatives de faire entendre a capella ou via mégaphone un certain nombre de revendications. Voici quelques grands thèmes sur lesquels les syndicats comptent mobiliser demain dimanche.
Dès le 25 avril, donc le lendemain de la victoire d'Emmanuel Macron à la présidentielle, la CGT proclame, dans un appel à gonfler les rangs de son cortège du 1er-mai, que le dossier de la réforme des retraites sera un enjeu crucial pour ce second quinquennat :
« La CGT saura rapidement rappeler au Président et à son nouveau gouvernement qu'il existe une opposition majoritaire à ses projets notamment d'allongement de l'âge de la retraite à 65 ans rejeté par près de 70% de la population. »
L'autre grand thème défendu sera les augmentations de salaires. La CGT s'inquiète des hausses de prix en France qui font craindre un risque élevé "de voir des pans entiers de la population tomber dans la pauvreté". La solution: la CGT demande « un smic à 2.000 euros et la revalorisation des autres salaires», rappelant au passage, que « en 2021, la rémunération moyenne des patrons du CAC 40 s'est élevée à 8,7 millions d'euros, presque le double par rapport à 2020, quand la crise sanitaire avait contraint les budgets».
Une comparaison qui ne soulève pas vraiment de contestation sachant que sur la question des salaires astronomiques de certains grands patrons avaient soulevé une réprobation jusqu'au plus haut sommet de l'État.
Mise en garde de Martinez (CGT) sur le pouvoir d'achat
Pour Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, le président de la République doit garder en tête qu'il a été élu sans réelle adhésion de la population, essentiellement afin de faire barrage à l'extrême-droite.
"Il est essentiel qu'il ne fasse pas semblant d'écouter mais qu'il réponde par des actes aux attentes des citoyens et au monde du travail", dit-il lors d'un entretien avec Reuters.
Sur la question du pouvoir d'achat, la solution doit venir de l'augmentation des salaires, dit le syndicaliste.
"On ne peut pas avoir applaudi les soignants, parler des premières et deuxièmes lignes et faire en sorte qu'ils se retrouvent deux ans après à une position comparable à celle qu'ils connaissaient avant la crise pandémique", dit celui qui appelle à une large mobilisation, non seulement le 1er-Mai, mais également dans les entreprises pour que s'ouvrent des négociations.
"S'il n'y a pas de pression sur le président de la République et le gouvernement celui-ci va considérer qu'il a les mains libres pour les réformes anti-sociales", prévient-il.
La CFDT appelle à associer le plus grand nombre aux décisions
Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, appelle de son côté le chef de l'Etat à organiser un "grand rendez-vous social" afin d'associer le plus grand nombre aux décisions.
« Monsieur le président, vous ne pourrez pas relever ces défis tout seul », déclare-t-il dans une tribune publiée mardi dans Le Monde. « Convoquez dès aujourd'hui une rencontre avec les partenaires sociaux et les grandes associations. Appelez-la comme vous voulez (conférence, Grenelle, convention...), mais lancez dès maintenant ce grand rendez-vous social pour changer de méthode et associer le plus grand nombre à la coconstruction des décisions. »
Force Ouvrière, le pouvoir d'achat en bandoulière
À Force ouvrière (FO), Yves Veyrier, le secrétaire général, évoque le momentum de ce 1er mai entre second et troisième tour, et se pose tout de go la question de l'intérêt de manifester alors que la nouvelle majorité n'est pas encore élue à l'Assemblée nationale:
« Beaucoup de journalistes nous interrogent : pourquoi manifester le 1er mai alors que nous sommes au lendemain de l'élection présidentielle, qu'un président vient d'être élu et que dans quelques semaines auront lieu des élections législatives qui détermineront ce que sera la majorité à l'Assemblée nationale, donc ce que sera éventuellement la politique conduite par le gouvernement qui en émanera ; pourquoi manifester maintenant ? »
Yves Veyrier répond bien entendu par l'attachement à ce moment traditionnel d'une "journée internationale de solidarité ouvrière entre les travailleurs du monde entier", notamment avec ceux d'Ukraine. Mais il en vient au coeur du problème selon lui:
« Il y a l'urgence. Aujourd'hui c'est le pouvoir d'achat."
Face à l'augmentation des prix, la solution à FO, c'est l'augmentation des salaires. Et rien d'autre, explique-t-il :
« Ce n'est pas les pansements la prime d'activité, la prime pouvoir d'achat sans cotisations sociales, sans fiscalité, ça n'est pas l'indemnité inflation, certes c'est toujours bon à prendre, mais la réponse pour Force ouvrière, c'est le salaire ! Pourquoi ? Parce que le salaire, c'est la rémunération du travail, c'est pour chacune et chacun d'entre nous, vivre dignement de son travail, ne pas avoir l'angoisse des fins de mois, ne pas avoir l'angoisse des loyers, ne pas avoir l'angoisse du financement des études de ses enfants et cela, nous le devons à tous les salariés à toutes les salariées de ce pays.»
(avec Reuters)