« Repasser le déficit sous les 3% du PIB en 2027 ». Emmanuel Macron en a fait une promesse lors de sa campagne présidentielle de 2022. Et un engagement martelé par sa Première ministre Elisabeth Borne depuis son arrivée à Matignon. Reste à savoir comment le gouvernement compte concrètement s'y prendre après deux ans d'emballement de la dette.
Bercy vient d'élaborer son Programme de Stabilité (PSTAB), une feuille de route adressée à la Commission européenne qui fixe la trajectoire budgétaire du quinquennat. Censé être présenté, puis débattu -mais pas voté- à l'Assemblée nationale le 2 août, le document, prévoit un retour du déficit public à 5% en 2022 et 2023 (puis 4,6% en 2024, 4% en 2025, 3,4% en 2026 et 2,9% en 2027). Hostile à des coupes drastiques dans le budget de la France, le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire défend une réduction de la dépense publique « progressive, raisonnable, sans austérité ». Sont ainsi prévues en moyenne chaque année une baisse du volume des dépenses de l'Etat et des collectivités locales respectivement de 0,4% et 0,5%, sans que le détail n'en soit précisé.
Tout miser sur la croissance
En revanche, le gouvernement acte l'augmentation des dépenses sociales, du fait notamment des plans de soutien à l'hôpital. Dans l'ensemble, le volume total de la dépense publique ne doit croître que de 0,6% sur les cinq années à venir. Il s'agit donc davantage d'une stabilisation du train de vie de l'Etat et des collectivités que de véritables économies. L'objectif est ambitieux si l'on songe que la progression des dépenses publiques a atteint 2% par an sur les vingt dernières années et 1,2% par an sur les dix dernières.
A défaut de sabrer dans la dépense publique, Bercy revendique de résorber le déficit grâce aux rentrées fiscales qu'offre la croissance. « Il faut que la croissance augmente plus vite que la dépense publique », assume Bruno Le Maire. Le ministère des Finances voit la croissance rester dans le vert à + 2,5% en 2022 (puis +1,4% en 2023, +1,6% en 2024, +1,7% en 2025, +1,7% en 2026 et +1,8% en 2027). L'inflation devrait même refluer d'après le document de 5,1% en 2022 à 3,3% en 2023 puis retomber en-dessous de 2% dès 2024. Bercy défend une projection « réaliste » qui tient compte du contexte économique « incertain, difficile ».
Le bémol de l'OFCE
L'exécutif parie sur les réformes économiques pour maintenir une croissance positive, via le projet de réforme du travail dès la rentrée, celle des retraites qui doit être effective à l'été 2023 ou encore la baisse définitive des impôts de production. Un paquet de réformes qui, selon Bercy, produira tous ses effets sur la croissance à partir de 2027, année de retour annoncé au plein-emploi (soit 5% de chômage). Ces ambitions réformatrices pourraient bien se heurter à l'hostilité des parlementaires avec qui la majorité relative à l'Assemblée sera contrainte de négocier.
Certains économistes mettent déjà en doute les prévisions de Bercy. L'OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) avance d'autres chiffres ce jeudi et dit s'attendre à un déficit de 5,5% fin 2022, contre 5% attendu par le ministère de l'Economie et des Finances. Les anticipations de l'OFCE divergent, à la baisse, de celles de Bercy sur la croissance avec +2,4% en 2022, +1% en 2023 (puis +1,6% en 2024 et +1,9% pour les trois dernières années du quinquennat). Ces différences d'appréciation de la future croissance confirment au moins une chose : l'incertitude demeure autour de la trajectoire budgétaire du pays.