« Il ne faut pas faire miroiter aux gens un Grenelle des salaires comme en 1968 » (François Asselin, CPME)

ENTRETIEN- Pour le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), l'idée lancée par Emmanuel Macron d'organiser une grande conférence sociale est « une surprise ». François Asselin rappelle que les employeurs sont sensibles au pouvoir d'achat de leurs équipes.
Fanny Guinochet
François Asselin, président de la CPME
François Asselin, président de la CPME (Crédits : Reuters)

LA TRIBUNE- Emmanuel Macron a annoncé son intention d'organiser une grande conférence sociale. Etiez-vous prévenu ?

FRANÇOIS ASSELIN- Absolument pas. Comme les autres organisations, je l'ai appris ce matin. Mais il va falloir que l'on se mette d'accord. Car je rappelle qu'en juillet, dans le bureau de la Première ministre, les partenaires sociaux ont convenu d'un agenda social. Et cet agenda recouvre à bien des égards le sujet des salaires : l'emploi des seniors, les trajectoires professionnelles, le compte épargne temps universel etc.

Une conférence sociale ne sert à rien ?

Je crois qu'avec cette proposition, Emmanuel Macron cherche surtout à offrir une réponse politique à une partie de l'aile gauche de l'hémicycle. Une conférence, c'est un totem facile à saisir qui ne l'engage pas trop. Il ne faut pas faire miroiter aux gens un Grenelle des salaires comme en 1968. C'est hors sujet.

On vous sent agacé...

Disons que sur les salaires, ce n'est pas comme si les employeurs n'avaient rien fait cette année ! L'Insee, le ministère du Travail, différentes études montrent bien que dans le secteur marchand, les rémunérations ont suivi l'inflation sur les 12 derniers mois glissants. La hausse se situe entre 5 et 6 %, toutes branches confondues. Sur les salaires, les chefs d'entreprise font leur part. Par ailleurs, je rappelle que cet hiver, nous avons signé avec les syndicats un accord sur le partage de la valeur ajoutée qui marque de véritables avancées supra-salariales (en termes de primes, d'intéressement), notamment dans les petites entreprises. C'est un signe que le dialogue social est dynamique sur le sujet. Cet accord a d'ailleurs été repris dans une loi par le gouvernement.

Enfin, je rappelle que pour garder leurs collaborateurs et recruter, les employeurs sont obligés de s'aligner sur les prix du marché. Les patrons de PME et TPE connaissent les difficultés de leurs équipes à boucler les fins de mois. Ils savent qu'il n'est pas facile de vivre dans l'hexagone ou les territoires d'Outre-mer avec un SMIC...

Et pourtant, il y a encore de nombreuses branches avec des minima en dessous du SMIC ...

C'est vrai, et on ne peut que le regretter. Mais certaines branches professionnelles n'ont pas terminé une négociation qu'il faut en ouvrir une pour s'ajuster à une nouvelle augmentation du SMIC. Avec l'inflation, le SMIC n'a eu de cesse d'être revalorisé ces derniers mois. Syndicats comme directions d'entreprises ont dû mal à suivre le rythme. Je constate toutefois que des progrès ont été faits. Les employeurs sont volontaires. Les patrons des petites entreprises partagent le quotidien de leurs salariés, ils sont dans la réalité. Quand ils peuvent augmenter les salaires, ils le font.

En ce moment, la conjoncture se complique. Est-ce qu'ils le peuvent ?

Je confirme que l'on sent l'activité ralentir dans de nombreux secteurs. La sinistralité des entreprises augmente dans de nombreux secteurs : la restauration, l'hôtellerie, la construction... Il y a encore quelques mois, les TPE étaient les plus nombreuses à mettre la clef sous la porte. Aujourd'hui, on voit de plus en plus de PME faire part de grandes difficultés. Le moral des chefs d'entreprise a tendance à faiblir. L'inquiétude est plus forte. Il faut rembourser les prêts garantis par l'Etat du Covid, il y a toujours des tensions sur les prix de l'énergie, les prix des carburants ne baissent pas. L'an dernier, il y avait le bouclier sur l'énergie.  A quoi va ressembler l'hiver ? Alors que l'inflation reste élevée, les aides de l'Etat se réduisent, le gouvernement cherche à faire des économies...

Et dans le prochain budget, les entreprises risquent d'être mises à contribution...

Oui, je rappelle que la France fait partie des champions des prélèvements fiscaux et sociaux. Comme le Medef, nous sommes vent debout contre l'étalement de la baisse de la CVAE, la contribution sur la valeur ajoutée sur plusieurs années. Le chef de l'Etat s'était engagé à la supprimer dès 2024. Sur le principe, il ne tient pas parole.

Nous craignons de revenir à l'instabilité fiscale que nous avons connue. Or, les entreprises ont besoin de stabilité, de confiance. C'est indispensable pour investir sereinement. Nous sommes évidemment sensibles à ce que le gouvernement maîtrise ses dépenses. Mais nous attendons une vraie stratégie de réforme de l'action publique. Regardez cette semaine, l'Allemagne a annoncé 7 milliards d'euros par an d'allégements fiscaux sur les entreprises, notamment les plus petites, pour relancer son économie. C'est un vrai camouflet pour la France. Car, pendant ce temps, dans l'Hexagone, on assiste à des bricolages autour des impôts de production. Tout en nous promettant de nous aider à exporter. Ce n'est pas sérieux.

Fanny Guinochet
Commentaires 20
à écrit le 03/09/2023 à 21:29
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Entre parenthèses, quelles sont les raisons de l'Explosion de 1968?

à écrit le 02/09/2023 à 11:29
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"A noter que dans les acquis de mai 68 ,il y avait ,la révision des classifications professionnelles et leur simplification." On peut rappeler que dans la métallurgie , une convention collective nationale a été signée le 7 février 2022 par la fédé...

le 02/09/2023 à 14:30
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La nouvelle classification de la métallurgie s'inspire fortement de la classification ASCE des ingénieurs US. Il est assez intéressant de constater que même au pays de l'oncle Sam on a gardé la notion d'expérience, ce que n'a pas fait l'UIMM. Avec un...

à écrit le 01/09/2023 à 14:17
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Il n'a échappé à personne que nous ne sommes plus en 1968. Nous avions à cette époque très peu de pays développés et notre industrie pouvait avec très peu de concurrence accaparer des marchés, si bien que nous avions la maitrise de l'augmentation des...

le 01/09/2023 à 15:11
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la classe dite( moyenne ) aujourd'hui n est elle pas la victime de prédateurs en bande organisée. ,? nos voisins italiens du point de vue économique nous ont devancé

le 01/09/2023 à 16:10
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Merci pour cette récontextualisation. Cette conférence sociale est une idiotie totale. Il faudrait au contraire une conférence sur notre compétitivité prix et hors-prix.

à écrit le 01/09/2023 à 14:04
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Dans le monde seul les Français croient que le gouvernement peut augmenter les salaires. L'état n'a la main que sur le smic et sur le salaire des 6 Millions de fonctionnaires. Pour augmenter les fonctionnaires il faut augmenter les impôts car pour do...

le 01/09/2023 à 16:13
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Oui, le vrai combat politique à méner en France est celui de la réduction du role du gouvernement dans la réalité et dans les esprits.

à écrit le 01/09/2023 à 10:17
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Nous avons un président qui papillonne comme un super Premier Ministre et un haut fonctionnaire; le résultat de sa gestion à été un chapelet de crises. Il eut été bien inspiré d'avoir un Père Joseph pour "huiler" les Relations Extérieures et de laiss...

à écrit le 01/09/2023 à 9:35
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1968 il y a donc 55 ans... il serait temps que nous ayons des décideurs de notre temps.

à écrit le 01/09/2023 à 8:57
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Plus ils sont riches, et plus ils sont radins. On ne les refera pas. Mais si un jour ça pète, il faudra qu'ils ne s'en prennent qu'à eux-mêmes.

à écrit le 01/09/2023 à 6:47
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Bonjour, mr macron est ses grenel bidon... Pour taxer ils est bien la , mais pour augmenté les salaire ils repassera .. La réalités est que 75% de la population est au smic et que la vie est chzque jpur plus chère... Ensuite inutil de nous resse...

à écrit le 31/08/2023 à 22:18
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Européennes, coupe du monde de rugby, Jo 2024 les événements ne manquent pas pour se faire entendre et exprimer son ras le bol de la langue de bois, de l enfumage, et des mensonges de Borne- Lemaire-Macron !! ça sera la loose à Macron devant les au...

à écrit le 31/08/2023 à 22:13
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1 augmentation de 5 à 6% de salaire ? Il doit parler macro et pour sa caste !.. à eux - cadre sup et cadre dirigeant 7-10%, a nous- employe -maitrise- cadre 2-5% entre mi 2021- sortie du covid- et ce jour… le compte n y ait pas !! Je suis Un cadre ...

à écrit le 31/08/2023 à 22:13
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1 augmentation de 5 à 6% de salaire ? Il doit parler macro et pour sa caste !.. à eux - cadre sup et cadre dirigeant 7-10%, a nous- employe -maitrise- cadre 2-5% entre mi 2021- sortie du covid- et ce jour… le compte n y ait pas !! Je suis Un cadre ...

à écrit le 31/08/2023 à 21:25
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Notre président se révèle chaque jour plus incompétent qu'on le pensait la veille. Nous ne sommes plus en 1968, la mondialisation est passée par chez nous aussi, le pouvoir politique n'a plus aucun poids face à la réalité economique, et encore plus ...

le 01/09/2023 à 16:18
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Exact. Désespérant de voir ces petits chefs de cette petite psudo-République s'attribuer des pouvoirs qu'ils n'ont pas sauf par le biais de la prédation des forces productives. Cette incantation permanente est fatiguante sur les sujets économique co...

à écrit le 31/08/2023 à 19:41
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AUTOCRATIE: "Forme de gouvernement où le souverain exerce lui-même une autorité sans limites". La France ferait bien de commencer à balayer devant sa porte avant de vouloir donner des leçons de "démocratie" en Françafrique🤔

à écrit le 31/08/2023 à 18:58
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Le Président le roi de l'esbroufe qui l'écoute encore en France mais egalement à Bruxelles NY ou à Sanghai. Son quinquennat est fini le risque pour la France des actions qui seront néfastes pour notre pays. Son pouvoir se résume au 49.3 bel avenir. Q...

à écrit le 31/08/2023 à 18:46
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Comme si "une grande conférence sociale" allait faire quelque chose pour les petits salaires, alors que ce n'est que de l'enfumage pour gagner du temps et calmer les esprits !

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