Malgré tous les plans du gouvernement, l'industrie française sera toujours à la traîne en Europe en 2030

Les plans France relance, France 2030 et la dynamique des relocalisations qui les accompagneraient représenteraient 98 milliards d'euros d'investissements supplémentaires et 68 milliards d'euros de valeur ajoutée annuelle et additionnelle en 2030, selon une récente évaluation du cabinet PwC. En dépit de cet effet levier, le poids de l'industrie dans l'économie française resterait encore loin de celui de nos voisins de la zone euro.
Grégoire Normand
Emmanuel Macron mise sur son plan France 2030 pour accélérer la réindustrialisation de l'économie tricolore.
Emmanuel Macron mise sur son plan France 2030 pour accélérer la réindustrialisation de l'économie tricolore. (Crédits : Reuters)

La SAM dans l'Aveyron, Ford à Blanquefort, près de Bordeaux..., la liste des fermetures d'usines a continué de se remplir lors du précédent quinquennat Macron. Les deux longues années de pandémie ont plongé l'industrie tricolore déjà affaiblie dans une profonde léthargie. Après de multiples confinements et des pagailles en chaîne dans les grands ports de commerce de la planète, l'industrie a payé un lourd tribut dans cette profonde crise. L'éclatement du conflit en Ukraine et la politique zéro-covid menée en Chine ont une nouvelle fois porté un coup dur au "Made in France", même si l'industrie tricolore a retrouvé des couleurs en 2021 puisque, selon l'observatoire Trendeo de l'emploi et de l'investissement, les créations d'usines ont fortement augmenté en 2021 en France, avec un solde positif de 120 usines nouvelles (176 créations et 56 fermetures).

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Face à toutes ces crises, le gouvernement a, en effet, multiplié les plans ces dernières années pour tenter de limiter le marasme et réindustrialiser l'économie tricolore lourdement affectée par des décennies de délocalisations. Entre le plan de relance, le plan France 2030 et le plan de résilience annoncé au printemps, l'exécutif espère amorcer "la reconquête industrielle" comme il l'a annoncé à plusieurs reprises. Il n'empêche. Malgré tous ces discours et ces plans, la "remontada" industrielle pourrait prendre des décennies.

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2 points de PIB en plus d'ici 2030, la France toujours à la traîne de l'Europe

Après des années de délocalisation, la part de l'industrie manufacturière dans le produit intérieur brut (PIB) hexagonal a dégringolé pour atteindre environ 10%, soit l'un des niveaux les plus bas en Europe. Selon une évaluation du cabinet de conseil et d'audit PwC France (PricewaterhouseCoopers) dévoilée ce jeudi 12 mai, l'industrie regagnerait 2 points dans le PIB tricolore d'ici à 2030, pour atteindre 12%.

À titre de comparaison, la moyenne en Europe est de 16%. En Allemagne, cette part s'élève à  21% pour l'industrie manufacturière, 19,7% en Italie ou encore 16% en Espagne. "La France est l'un des pays les plus désindustrialisés d'Europe. Seuls le Luxembourg, Chypre ou Malte nous suivent. Je pense que nous n'avons pas conscience de la situation de notre industrie. Quantitativement, la France part de tellement bas que même avec un  effort très conséquent, cela ne permet pas de rattraper notre retard par rapport à la moyenne européenne", explique à La Tribune Olivier Lluansi, associé chez PwC et ancien conseiller industrie à l'Elysée.

Près de 100 milliards d'euros d'investissement d'ici à 2030

Les effets des différents plans et des relocalisations sur l'investissement sont malgré tout relativement importants. Selon les calculs du cabinet de conseil, les 98 milliards d'euros d'investissement public et privé pourraient générer 68 milliards d'euros de valeur ajoutée annuelle. "Ces chiffres sont inédits depuis 40 ans. C'est un effort qui n'a pas été fait depuis très longtemps", souligne l'expert en industrie. Le multiplicateur budgétaire retenu dans le scénario de référence est que un euro d'argent public investi engendrerait 2,5 euros d'investissement privé.

Certaines grandes filières seront les grandes bénéficiaires de ces différents plans. "Il s'agit des composants électroniques et la production de produits pharmaceutiques, les véhicules électriques, le recyclage du plastique et des matériaux de construction notamment via la décarbonation de ces industries", complète Olivier Lluansi, ancien délégué aux Territoires d'industrie lancée par l'ancien Premier ministre Edouard Philippe sous la coupole du Grand Palais en novembre 2018.

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431.000 emplois créés d'ici à 2030

Sur le front de l'emploi, tous ces investissements pourraient également annoncer de bonnes nouvelles dans les prochaines années. "Tous ces plans permettraient de générer 431.000 emplois directs et indirects à l'horizon 2030. Ce sont des hypothèses conservatrices", explique Olivier Lluansi.

Mais là encore, ces créations seraient loin de compenser les centaines de milliers de postes détruits depuis les différents chocs pétroliers des années 70, une époque où le poids de l'industrie représentait près de 22% de l'économie. "Entre 1974 et 2018 les branches industrielles ont perdu près de la moitié de leurs effectifs (2,5 millions d'emplois), l'industrie ne représentant plus aujourd'hui que 10,3 % du total des emplois", expliquait le dernier rapport de la commission d'enquête parlementaire sur la désindustrialisation.

La réindustrialisation, le défi du prochain quinquennat

Lors de la présentation de son programme présidentiel à Aubervilliers au début du printemps, Emmanuel Macron a mis l'accent sur la nécessité de réindustrialiser la France. Cette politique devrait passer principalement par l'amplification de la baisse des impôts de production et par le plan France 2030 présenté en grande pompe à l'Elysée à l'automne 2021 devant un parterre de ministres, chefs d'entreprise, économistes et étudiants.

"Pour réussir cette réindustrialisation, il faut travailler sur les nouveaux défis technologiques et en même temps travailler avec les territoires. Cette réindustrialisation des territoires peut passer par la production des jeans de Mulliez ou encore des laves-vaisselles de Daan Tech. Ce second levier n'est pas assez développé dans les politiques publiques. Dans le plan France 2030, une approche territoriale serait utile par exemple", souligne Olivier Lluansi.

A la veille de la nomination d'un nouveau gouvernement, Emmanuel Macron sait qu'il devra prendre ce dossier à bras le corps s'il ne veut pas se retrouver rapidement en difficulté.

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Grégoire Normand
Commentaires 18
à écrit le 13/05/2022 à 10:27
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Tous nos problèmes viennent de notre culture latine et catholique prompt à dénigrer les audaces de sa jalousie pour la réussite et le mal que constitue l’argent , de notre marxisme inconscient alimenter par notre histoire révolutionnaire ou la riches...

à écrit le 12/05/2022 à 23:28
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La solution, c'est avoir des idées et l'argent pour les réaliser; les idées, je crois que nous les avons; c'est le bouillonnement latin; mais ne crions pas haro sur les dividendes; c'est la poule aux oeufs d'or, car, pour la majorité, ils ne servent ...

à écrit le 12/05/2022 à 22:48
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41ans de désindustrialisation ( 1976-2017 ) aggravée par la C.G.T Extrème-Gauche destructrice et saboteuse. La reconstruction ne débute que depuis juillet 2017 : 15 ans seront encore nécessaires.

à écrit le 12/05/2022 à 15:03
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C'est marrant, lorsque le FN insistait en 1980 pour développer au maximum le tissu industriel afin de créer de l'emploi et de garantir notre souveraineté, les opposants les traitaient de tous les mots. Aujourd'hui qu'il nous reste les yeux pour pleur...

le 12/05/2022 à 19:10
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C'est vrai que le programme des Lepen fait rêver: la ruine assurée. Et en quelques mois seulement (maxi-efficacité assurée)!

à écrit le 12/05/2022 à 12:51
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réponse aux commentaires précédents: on marche sur la tête!! 1/on n' a plus un état fort car surendetté donc qui n a plus les moyens de ses ambitions, le 2éme budget de l état c ' est le remboursement de la dette cumulée depuis 40 ans merci aux géné...

à écrit le 12/05/2022 à 11:11
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Je me rappelle, âgé de 76 ans, qu'en 1977 GISCARD considérait après les chocs pétroliers de 1973 que la France deviendrait un pur pays du savoir et que par conséquent il n'y avait plus à privilégier l'industrie: nous n'avions pas de pétrole mais des ...

le 12/05/2022 à 12:00
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le resultat c'est combien d'evasion de devises et de sans emploi et tout cela bon nombre de politicien non pas encore compris idem pour bon nombre d'annaliste financier et autre technocrate sans oublier les verts

à écrit le 12/05/2022 à 9:51
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Les décideurs publics français n'ont toujours pas compris que c'est l'excès de réglementation, de compliance, de reporting, de taxation, de lois restrictives, ... qui étouffe l'économie française.

le 12/05/2022 à 10:47
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Il faudrait peut-être aussi de la main d'oeuvre qualifiée. La désindustrialisation à orienté les étudiants vers des métiers de services. Nous avons perdu beaucoup de compétences technique que la main d'oeuvre étrangère sous qualifiée ne peut suppléer...

à écrit le 12/05/2022 à 9:18
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J'ai lu quelque part qu'il n'y avait pas d'industries sans un état fort (au moins un peu), pour la France elle a tout bradée, actuellement elle n'a aucune politique industrielle ni politique tout court, c'est le néant.. Pire, on s'interroge sur la pl...

le 12/05/2022 à 10:01
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Un etat fort n a rien a voir avec une industrie forte. la RFA ou la suisse ont des industrie forte et un etat faible (ce sont des etas federaux). a l inverse la russie de poutine a un etat fort et une industrie en lambeaux

le 12/05/2022 à 11:56
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si vous avez un état faible qui se mêle de rien et une industrie forte ça marche . si vous avez un état fort et une industrie faible ça peut marcher si l'état soutient ces industries. Si vous avez un erat fort qui soutient ses industries et une i...

à écrit le 12/05/2022 à 8:42
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C'est pas en copiant les autres que nous prendront de l'avance, comme dans le passé!

à écrit le 12/05/2022 à 7:26
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On nous aurait menti ? Les medias décrivent la France comme une puissance économique incontournable sur la scène internationale ,en réalité notre tissu industriel est en déclin. Nous allons payer très très cher notre manque de vision industrielle ...

le 12/05/2022 à 8:56
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@charlieOleg L'obstination écologique ! Si nous ne faisons rien, ce sont les générations futures qui paieront la facture. Il est d'ailleurs malheureusement sans doute déjà trop tard pour inverser la tendance.

le 12/05/2022 à 9:25
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Il n'est pas en déclin. Il a été en déclin depuis plus de 40 ans. Maintenant il est quasi-inexistant et l'économie française n'est basé que sur de la consommation basée sur la dette et donc va vers uns situation comparable à celle de la Grèce en 2010...

le 12/05/2022 à 9:48
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@Valbel89. Il faut de l'écologie OUI ,mais raisonnablement ,nous ne représentons même pas 1% des émissions , et les Chinois ,les US ils produisent et nous on s’appauvrit ? Les boomers nous laissent un pays dévasté et c'est à nous les jeunes actif...

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