Millésime décevant pour les soldes d’hiver : le prêt-à-porter s’enfonce dans la crise

Alors que les premiers chiffres du bilan des soldes d’hiver qui se terminent ce mardi 6 février tombent, une mauvaise dynamique semble se dessiner. Selon l’Alliance du commerce, le chiffre d’affaires des commerces de prêt-à-porter a fortement baissé par rapport à l’année passée, après une année 2023 difficile.
Maxime Heuze
Les commerces de prêt-à-porter enregistrent un chiffre d'affaires en baisse de 6% par rapport aux soldes d'hiver 2023.

La fin des soldes d'hiver ce mardi sonne l'heure du bilan pour les commerçants de prêt-à-porter. Déjà, l'Alliance du Commerce, qui représente 761 enseignes, a compilé les données des trois premières semaines de soldes avec Retail Int. La saison n'a pas été bonne... Loin de là.

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Sur cette période, le représentant des commerces de prêt-à-porter enregistre un chiffre d'affaires en baisse de 6% par rapport aux trois premières semaines des soldes d'hiver 2023, dans tout l'Hexagone. « Nous avons constaté une dégradation de l'activité au fil des semaines avec surtout une baisse de trafic en magasin de 7% par rapport à l'année dernière », affirme à La Tribune, Yohann Petiot, président de l'Alliance du commerce, qui intègre une soixantaine de grandes enseignes (Jules, Monoprix, Levi's, Promod...).

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 Le prêt-à-porter milieu de gamme, en pleine crise

Une mauvaise nouvelle pour le prêt-à-porter milieu de gamme, en pleine crise depuis plus d'un an avec la réduction de voilure de nombreuses enseignes comme Camaïeu, Kookaï, Naf Naf, Gap France, Burton of London, Minelli, Pimkie... placées en redressement judiciaire ou même parfois liquidées. Ce segment de marché, à qui profitaient les soldes, séduit bien moins, concurrencé par des acteurs discount à prix cassés toute l'année et la seconde main, un marché en pleine croissance.

Pour la Fédération nationale de l'habillement (FNH) qui représente environ 35.000 boutiques de prêt-à-porter indépendantes, le réchauffement climatique et la douceur des températures en janvier ont plombé l'attrait des Français pour les vêtements d'hiver. Le chiffre d'affaires a baissé au cours des deux premières semaines. « La météo et le climat social ont probablement joué sur la venue des clients », avance-t-il. Autre élément d'explication, le trop grand nombre de promotions. « Avec le Black Friday, les pré-soldes, les ventes privées et autres, la clientèle est gavée de faux prix et n'achète plus pendant les soldes et encore moins aux vrais prix », fait valoir Patrick Aboukrat, président régional de la FNH Île-de-France. Cette tendance touche l'ensemble des segments, la mode femme, homme et enfant, fait remarquer à l'AFP Pierre Talamon, président de la FNH.

De son côté, l'Alliance du Commerce estime que les magasins du Nord et de l'Est de la France ont fait les frais d'une deuxième semaine des soldes compliquée avec de la neige tandis que le Sud et l'Ouest ont vu leur activité décliner lors de la troisième semaine, au moment où ont débuté les manifestations des agriculteurs qui ont bloqué la circulation routière, « ce qui a peut-être influencé les clients », reconnaît Yohann Petiot. Mais ces phénomènes conjoncturels qui se répètent néanmoins depuis 2019 (crise des gilets jaunes en 2019 puis la pandémie de Covid venant perturber en 2020 les soldes d'été et en 2021 ceux d'hiver), n'expliquent pas tout.

« Il n'y a pas de report de consommation sur le e-commerce, il y a donc un vrai sujet de baisse du pouvoir d'achat », rappelle le représentant de l'Alliance du Commerce.

De nombreux professionnels du secteur invoquent également un problème de calendrier, les soldes étant trop avancés dans l'année. Les commerçants ont à peine « le temps de vendre les vêtements (de saison) » qu'il faut déjà « les brader », a expliqué à l'AFP Jean-Guilhem Darré, délégué général du SDI.


La SDI et la FNH demandent au gouvernement de repousser les dates des soldes, tandis que l'Alliance du Commerce prône le statu quo sur la question.

La continuité d'une année 2023 morose

La baisse de la consommation n'est en effet pas nouvelle. Déjà pendant les fêtes, les consommateurs ont manqué à l'appel. Ayant vu leurs budgets fondre suite à l'inflation, les Français ont moins acheté pendant cette période, avec un panier moyen inférieur de 0,6% par rapport à l'année dernière, entraînant une baisse du chiffre d'affaires 2,6% sur un an des magasins en décembre, toujours selon l'Alliance du Commerce. Contre toute attente, cette perte n'a pas été rattrapée pendant ces soldes. « Nous aurions pu penser que les consommateurs allaient profiter de cette période pour faire leurs achats tout en économisant un peu, mais ça n'a finalement pas été le cas », avoue Yohann Petiot.

Les commerçants ne voient donc toujours pas la fin des temps difficiles. Quatre ans après la crise du Covid-19 qui a chamboulé l'activité des magasins contraints de fermer leurs portes pendant de longs mois, le marché du prêt-à-porter n'a toujours pas retrouvé son niveau d'avant la crise sanitaire et enregistre une perte de 9% depuis 2019. L'année dernière, marquée par une forte inflation, le marché de l'habillement a perdu 3,5% de sa valeur selon l'Alliance du Commerce à cause d'une baisse moyenne de 0,6% du chiffre d'affaires des magasins et de faillites de plusieurs enseignes ayant conduit à la suppression de 4.000 emplois dans le secteur.

L'incertitude demeure pour 2024

Après plusieurs années moroses, le prêt-à-porter peut-il espérer souffler en 2024 ? C'est peu probable selon les représentants du secteur.

« Nous espérons que la situation va se redresser mais nous n'avons pas de signe macroéconomique qui permette d'anticiper une meilleure année pour les commerçants » s'inquiète Yohann Petiot.

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Mais l'espoir demeure cependant grâce à un événement qui pourrait doper les ventes cet été : les Jeux olympiques. Avec 15,8 millions de visiteurs, Paris et l'Hexagone devraient profiter d'une forte pression acheteuse entre les mois de juillet et d'août. Rien que sur le Grand Paris, l'alliance s'attend à une hausse de 33% de touristes sur la période, une manne de nouveaux clients potentiels pour les commerces.

Pour autant, rien n'est certain. « Les visiteurs seront surtout des touristes nationaux qui ont moins pouvoir d'achat et nous craignons qu'ils aient dépensé tout leur budget dans leur logement et leurs billets pour les jeux », confie Yohann Petiot. Réponse dans quelques mois.

Maxime Heuze
Commentaires 17
à écrit le 06/02/2024 à 18:52
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Préparons nous à entendre que le mauvais bilan des soldes est à mettre sur le compte de la Russie, les chalands préférant épargner en vue d'une invasion prochaine ou imminente :-( Rien à voir avec un quelconque appauvrissement de la population et la...

à écrit le 06/02/2024 à 16:01
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Très bien, les gens commencent à moins gaspiller. Quand on voit les coupes des pantalons, un coup slim, puis retour aux années 90, puis larges... En fait chaque année ils voudraient qu'on rachètent tout. Vous changez vos meubles tous les ans ?

à écrit le 06/02/2024 à 14:07
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Pour acheter du MADE IN PRC au prix du luxe? Franchement....quand on regarde les étiquettes et le prix initial..... quand on peut solder à -75% c'est tout de même bizarre, non? Un jeans vendu toute l'année à 100€ se vend lors des soldes à moins de 50...

à écrit le 06/02/2024 à 13:37
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Les gens n'ont rien acheté lors du black vendredi ? Souvent, ceux qui ont des projets d'achats concentrent ça sur les périodes de promotions, et en janvier n'ont plus rien à acheter, ayant rempli leur garde-robe. L'habillement pollue à la production...

à écrit le 06/02/2024 à 11:56
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Aujourd'hui le seconde main est très tendance il y a même un site dédié pour les transactions bien connu des adeptes toujours plus nombreux

le 06/02/2024 à 16:53
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Oui, comme il fut tendance en 2006 d'initier un mouvement "le Colibri" (Pierre Rabhi) visant à privilégier les "circuits courts" (entre-autres) dans l'alimentation et l'écologie. Tout comme Dennis Meadows fédérera un mouvement - y a 50 ans - autour d...

à écrit le 06/02/2024 à 10:44
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Pourquoi toujours acheter des vêtements chaque année. Alors que ces derniers sont fabriqués à bas coûts en Chine et vendu un prix exorbitant en France. Ah oui, pour verser un maximum de dividendes aux actionnaires !!!!

à écrit le 06/02/2024 à 9:52
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De toute façon la part du made in France dans le prêt-à-porter c'est quoi? 2%? 5%? Donc, comme nous sommes nuls dans la production, il nous reste que la baisse de la consommation pour améliorer la balance commerciale...et ce n'est pas une si mauvais...

à écrit le 06/02/2024 à 9:42
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J'anticipe l'augmentation des prélèvements , il va bien falloir payer les nouveaux salaires des sénateurs et des députés.

à écrit le 06/02/2024 à 9:06
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Pas fait les soldes car mes impôts et taxes surtout la taxe foncière ont beaucoup augmenté alors que mes revenus ont stagné. Il a fallu faire un choix comme le gouvernement m'interdit de ne pas payer mes impôts alors j'ai sacrifié les soldes. Trop d...

à écrit le 06/02/2024 à 9:03
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Ben alors, ils sont où les ménages opportunistes ayant retrouvé le moral via leur comportement de consommation? Le mur des réalités ne ment jamais face à la propagande😜

le 06/02/2024 à 12:15
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"leur comportement de consommation " a changé mais ils consomment toujours autant mais différemment "alliance du commerce" ne prend en compte les ventes sur internet qui font chaque année de +20 ou 25% et vous rajoutez à cela le seconde main qui car...

le 06/02/2024 à 14:40
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@Idx. Les comportements de consommation ont évolué depuis l'ère du commerce en ligne (internet) mais qui ne date d'hier, loin s'en faut. Certes, les confinements Covid ont renforcé encore la tendance vers ce type de commerce tout en orientant récemme...

à écrit le 06/02/2024 à 8:57
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plutot une bonne nouvelle: moins de cochonneries made in china se retrouverons dans les poubelles dans quelques mois. Apres c est dommage pour les vendeuses de ces magasins qui vendent des habits 20 fois plus cher que ce qui a ete paye au bengladesh ...

le 06/02/2024 à 10:16
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Le btp recrute? Vous avez suivi un peu les infos économiques?

le 06/02/2024 à 10:16
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Le btp recrute? Vous avez suivi un peu les infos économiques?

le 06/02/2024 à 10:40
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@cd : c'est plutôt les chaînes proposant du moyen de gamme semi durable qui souffrent, les jeunes d'aujourd'hui étant accros à "l'ultra fast fashion", du très bas de gamme vendu à des prix si bas que renouveler sa garde robe de la semaine coûte moins...

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