Les nuages s'amoncellent aussi au-dessus de la démographie française. Après une année 2023 morose, les indicateurs de population passent au rouge les uns après les autres. La pandémie n'a certes pas fait autant de dégâts qu'entre 2020 et 2022. Mais les courbes dessinent des tendances particulièrement défavorables. Dans son étude démographique dévoilée ce mardi 16 janvier, l'Insee a dressé un bilan particulièrement alarmant. « La fécondité en France s'établit à 1,68 enfant par femme. En 2022, ce taux était à 1,8 enfant par femme. C'est le niveau le plus faible jamais enregistré depuis 1993 », a déclaré Sylvie Le Minez, responsable de l'unité des études démographiques et sociales de l'Insee, lors d'un point presse. « La fécondité baisse pour toutes les classes d'âge et même pour les trentenaires qui étaient moins concernées auparavant », ajoute la spécialiste. Au total, la France comptait 68,3 millions d'habitants en 2023 contre 68,1 millions en 2022. Il y a 40 ans, l'Hexagone avait recensé 55,5 millions d'habitants sur son territoire.
En chute libre, les naissances sous la barre des 700.000
En 2023, les statisticiens ont recensé 678.000 naissances, soit une baisse de 7% par rapport à 2022. L'Hexagone a recensé 48.000 naissances de moins en seulement une année. C'est une diminution « importante ».« Entre 2005 et 20215, la France comptait autour de 800.000 naissances. Elles ne cessent de diminuer depuis hormis le rebond de 2021 », indique Sylvie Le Minez. Sur une longue période, il s'agit du plus faible nombre de naissances depuis 1957 selon les fichiers fournis par l'institut de statistiques. Comment expliquer la chute des dernières années ? « La baisse de la fécondité pourrait renvoyer à un contexte économique moins favorable, l'inflation, la difficile conciliation vie familiale/vie professionnelle », a avancé Sylvie Le Minez.
Pressées par l'inflation, les familles avec enfants sont en première ligne face aux dépenses alimentaires. La semaine dernière, le Haut conseil à la famille a livré un rapport particulièrement préoccupant sur les répercussions de l'envolée des prix sur le budget des familles avec enfants. « Les privations ont augmenté pour les familles dans cette période d'inflation », a alerté l'économiste de l'OFCE Hélène Périvier, lors de la présentation du rapport.
Les décès baissent en 2023
L'année dernière, le nombre de décès a chuté de 6% pour s'établir à 631.000. C'est 44.000 de moins qu'en 2022. Il faut dire que les vagues de pandémie, les pics de chaleurs durant l'été et saison de grippes particulièrement violentes avaient provoqué des décès en nombre partout sur le territoire. A ces facteurs s'ajoutent l'inéluctable vieillissement de la population tricolore. « Avec l'arrivée des générations nombreuses du baby-boom à des âges de forte mortalité, le nombre de décès a tendance à augmenter plus vite sur les dix dernières années (+0,7 % par an en moyenne entre 2004 et 2014, puis +1,9 % entre 2014 et 2019) », soulignent les experts. Au final, l'espérance de vie regagne du terrain aussi bien chez les hommes (80 ans) que chez les femmes (85,7 ans). Une bonne nouvelle après quelques années de reculs particulièrement marqués.
Le solde naturel au plus bas depuis la Seconde guerre mondiale
Quant au solde naturel, c'est à dire la différence entre les naissances et les décès, il affiche un résultat positif en 2023 à 47.000. Mais c'est un plus bas depuis des décennies. « Depuis 2006, le solde naturel a tendance à baisser en raison d'une baisse des naissances et d'une hausse des décès. La génération du baby boom est arrivée à des niveaux d'âge élevé. C'est le solde naturel le plus faible depuis la Seconde Guerre mondiale », a résumé Sylvie Le Minez.
S'agissant du solde migratoire, c'est à dire la différence entre les arrivées et les départs de migrants, il s'établit à 183.000, soit un niveau relativement stable par rapport aux deux années précédentes et supérieur à 2019 (128.000). Reste à savoir si ce chiffre se maintiendra alors que le projet de loi sur l'immigration récemment voté à l'Assemblée nationale vise à serrer la vis sur les flux migratoires.