Retards de paiement : la flambée des prix a fait exploser les « tensions », selon la médiation inter-entreprises

L'éclatement du conflit en Ukraine et l'envolée des prix de l'énergie ont fait bondir les saisines du médiateur des entreprises à partir du second semestre 2022. Le niveau des demandes est supérieur de 10% à celui enregistré sur la même période un an plus tôt. Et cette tendance se poursuit au cours du premier trimestre 2023. Les pressions inflationnistes ont nourri la défiance entre les fournisseurs et les PME.
Grégoire Normand
Les services de la médiation intégrés à Bercy ont enregistré 3.600 sollicitations et demandes de médiation contre 4.300 un an plus tôt.
Les services de la médiation intégrés à Bercy ont enregistré 3.600 sollicitations et demandes de médiation contre 4.300 un an plus tôt. (Crédits : Reuters)

L'onde de choc de la guerre en Ukraine continue de se propager dans l'économie française. Un an jour pour jour après l'éclatement du conflit, les tensions sont loin d'être retombées. L'inflation continue d'accélérer en France au mois de février à 6,2%, contre 6% en janvier selon l'Insee. Les prix de l'alimentaire propulsent l'indice des prix à la consommation vers des sommets tandis que les prix dans l'énergie marquent le pas. La Banque de France table désormais sur une croissance du produit intérieur brut (PIB) atone de seulement 0,1% au premier trimestre 2023, après une fin d'année 2022 décevante.

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Dans ce contexte morose, le médiateur des entreprises a dressé un bilan préoccupant de son activité ce jeudi 9 mars. « Malheureusement, 2022 a été particulièrement difficile. On tient à sonner l'alerte. Il y a un retour de la défiance en raison de la flambée des prix dans de nombreux domaines. Le leitmotiv des profiteurs de crise [pour certains fournisseurs d'énergie notamment] a été exprimé. Or, cela crée de la défiance. Halte à la défiance et appelons au retour à la confiance », a déclaré Pierre Pelouzet lors d'un point presse donné à l'occasion de la présentation du bilan d'activité 2022.

Les retards de paiement peuvent être « mortels » pour certaines TPE et PME

La multiplication des crises ces dernières années (pandémie, guerre en Ukraine, crise de l'énergie) ont ravivé les tensions entre les donneurs d'ordre et les sous-traitants. Après une accalmie en 2021 liée au rebond post-Covid, les tensions sur les délais de paiement ont de nouveau ressurgi dans le contexte du conflit ukrainien, de la flambée des prix ou des difficultés d'approvisionnement en matières premières ou en composants électroniques. « La météo se rafraîchit. L'année 2020 était hors-norme. On n'est plus du tout à ce niveau-là. Il y a eu une vraie amélioration en 2021. Mais en 2022, il y a toujours des niveaux de tensions supérieurs à 2019 », a averti Pierre Pelouzet. « Ce n'est pas le moment pour les entreprises de payer en retard. Même si ça va mieux dans les prix de l'énergie et des matières premières, les retards de paiement peuvent être mortels pour les TPE et PME qui doivent passer le cap », a-t-il ajouté.

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Des saisines en baisse par rapport à 2021, toujours au dessus de la période pré-pandémie

Sur l'ensemble de l'année, les services de la médiation intégrés à Bercy ont enregistré 3.600 sollicitations et demandes de médiation contre 4.300 un an plus tôt. Mais la guerre en Ukraine a constitué un tournant. Après l'invasion de la Russie en territoire ukrainien, les équipes du ministère des Finances ont dû faire face à une avalanche d'appels. « En 2022, il y a eu rebond assez spectaculaire au second semestre », a souligné Pierre Pelouzet.  Au total, le médiateur a reçu 2.077 sollicitations en 2022 (réponses personnalisées aux demandes d'information). Il s'agit certes d'un niveau bien inférieur à 2021 (3.250) et 2020 (6.075) mais bien au-dessus de 2019 (1.000) ou 2018 (700).

S'agissant des médiations, elles ont reculé passant de 2.025 en 2021 à 1.600 en 2022 mais demeurent à un degré bien supérieur à la période précédant la crise sanitaire (autour de 1.300). Là encore, Bercy a enregistré un bond impressionnant (+33%) de demandes de médiation entre le second semestre 2021 (751) et le second semestre 2022 (996).

La hausse des prix envenime les relations dans le bâtiment ou la grande distribution

Sans surprise, la plupart des sollicitations et une grande partie des médiations ont concerné des problématiques liées à l'envolée des prix dans de nombreux domaines. « Pourquoi ces tensions ? C'est d'abord lié à l'énergie. Dès avril 2022, on a mis en place un comité de crise. Dans le BTP, on a ressenti très tôt des tensions, des producteurs jusqu'au bâtisseurs. Dans la grande distribution, on a également ressenti des tensions. Nous avons fait des médiations au moment des négociations commerciales », a exposé Pierre Pelouzet.

Peu après le début de la guerre en Ukraine, les services de médiation avaient reçu des représentants du patronat du bâtiment et des PME lors de réunion de crises. Beaucoup redoutaient des conséquences en cascade sur les grands groupes tricolores implantés en Ukraine ou en Russie. Un an après, les difficultés d'approvisionnement se sont en partie apaisées.  Mais certains secteurs dépendants de l'étranger restent plongés dans un épais brouillard.

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Grégoire Normand
Commentaires 9
à écrit le 11/03/2023 à 9:18
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Le prix de la planche a billet de bruxelles. Inflation et l'energie encherie. Cocktail ideal pour une implosion. Bienvenu en France. 2024 va etre un festival.

à écrit le 10/03/2023 à 17:37
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la MEGA flambée des prix n'a aucune justification réelle, nous sommes plongés dans une abîme économique et sociale, l'hyper inflation réelle est de plus de 45 %, + 60 % sur l'alimentation animale [réduction des contenus dans les emballages de 20 % i...

à écrit le 10/03/2023 à 11:47
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Il est bon de savoir que les grandes entreprises font partie des mauvais payeurs alors qu'elles sont en bonne santé comme vient de le démontrer la publication de leurs résultats .Vous pouvez rajouter la grande distribution qui ne respecte pas les d...

à écrit le 09/03/2023 à 19:03
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Quel est retard "final" des paiements, ne serait ce pas la banque qui exploite la monnaie ?

à écrit le 09/03/2023 à 18:48
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"L'onde de choc de la guerre en Ukraine continue de se propager " ... Elle a bon dos la guerre un Ukraine ! L'inflation a commencé AVANT cette guerre, la BCE a surproduit de la planche a billet, quand une monnaie se dévalorise par rapport aux autre...

à écrit le 09/03/2023 à 18:34
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ça va être le final en septembre et octobre avec ça farandole de foncier et d’impôt que les gens ne pourront ou ne voudront plus payer .

le 10/03/2023 à 6:33
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Le paiement des taxes foncières lourdement réévaluées par l’ augmentation pour 2023 et 2024 sur les bases et en plus des communes qui ont augmenté leur taux sous couvert de ne pas vouloir réduire leur domaine d’intervention contraire à leur politique...

à écrit le 09/03/2023 à 18:05
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le covid ukrainien, encore lui!!!!!!! bon sinon y a toujours eu des pbs, y en a un peu plus, ok; le gros pb c'est que les boites francaises sont sous capitalisees ( et peu rentables, l'un allant avec l'autre!) alors forcement, quand c'est deja tendu ...

le 09/03/2023 à 22:42
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On pourrait mette une taxe e sur les produits importes qui ne respectent pas le droit du travail international ( travail forcé, des enfants…) ou usages des pesticides cancérigènes interdits en Europe : Chine Brésil ( atracine ds les cultures de soj...

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