“Une grande partie des citoyens engagés veulent revoir le logiciel”, Philippe Zaouati

LE MONDE D'APRES. Philippe Zaouati est le directeur général de Mirova, filiale de Natixis IM spécialisée dans la finance durable, et cofondateur et président du think tank Osons le Progrès. Il a lancé l’initiative collaborative #ConstruisonsLeMondeDApres. Objectif : inviter les citoyens engagés à penser une nouvelle machine en prenant largement en compte les questions de transition écologique, des inégalités et de résilience. Interview.
Philippe Zaouati, directeur général de Mirova et cofondateur et président du think tank Osons le Progrès.
Philippe Zaouati, directeur général de Mirova et cofondateur et président du think tank Osons le Progrès. (Crédits : DR)

LA TRIBUNE - Comment est née cette initiative ?

PHILIPPE ZAOUATI - Osons le Progrès est un think tank né il y a un an environ et qui a mené des premières réflexions sur le féminisme et le girondisme. C'est un laboratoire d'idées progressistes. Nous estimons que les politiques publiques restent trop ancrées dans le pragmatisme sans intégrer suffisamment de réflexions sur le long terme. Dans le contexte actuel, je me suis dit qu'il fallait aller plus loin en s'interrogeant sur la construction du monde suivant la crise.

Aujourd'hui, qui retrouve-t-on derrière #ConstruisonsLeMondeDApres ?

En quelques jours, plus de 200 personnes ont rejoint la boucle de discussion lancée sur l'application Telegram. On y retrouve des chefs d'entreprise, des responsables de développement durable de certaines entreprises, des personnes du monde académique, mais aussi des politiques. Nous avons ainsi reçu le soutien de Brune Poirson [secrétaire d'Etat à la Transition écologique, ndlr].

Quel est l'objectif de cette initiative ?

L'idée est de montrer qu'une grande partie des citoyens engagés ont la conviction qu'il faut revoir le logiciel et de façon concrète. Il va falloir redémarrer vite, tout en changeant tout. Lorsque le rebond se présentera, notre grande crainte c'est qu'il se fasse dans le business as usual. Aujourd'hui, nous entendons beaucoup que "rien ne sera plus comme avant", mais la crédibilité de ces messages est discutable. Prenons l'exemple de 2008. Depuis cette crise, le secteur de la finance est beaucoup plus réglementé certes, mais nous n'avons pas changé fondamentalement le moteur ni le fonctionnement des marchés. Ce schéma risque de se répéter aujourd'hui car lorsque l'on souhaite redémarrer vite, le plus simple c'est d'utiliser la machine que l'on a sous la main.

Comment peut-on éviter d'utiliser "la même machine" ?

Il faut engager une réflexion très rapidement car si nous attendons le moment où l'on parlera de rebond il sera déjà trop tard. Il ne faut pas rester dans l'incantation et l'enjeu sera de traduire cette volonté en différents objets de politiques publiques pour que les politiques puissent s'en saisir. Il faut rendre notre réflexion suffisamment concrète en essayant de déterminer quelles sont les décisions principales à prendre.

Quels sont vos grands axes de réflexion ?

L'idée est de s'interroger sur le système que l'on veut repenser, en termes de gouvernance, de mode de production, et de modèles économique et social. Derrière tout ça, il s'agit de s'interroger sur notre modèle de valeurs. Les enjeux sur lesquels nous souhaitons travailler plus concrètement sont la transition écologique, le sujet des inégalités et la question de la résilience. Comment construit-on une société résiliente ? Il faut imaginer la résilience d'une société face à une très forte interdépendance. Ce qui implique beaucoup plus de gouvernance commune et de solidarité.

Selon vous, quel rôle devra jouer la finance dans ce monde d'après ?

Aujourd'hui, la finance est au cœur du système et joue un rôle transverse, comme la politique, car elle touche par définition tous les sujets économiques, mais aussi l'ensemble des citoyens à travers l'épargne. Elle peut donc constituer un canal de transmission très important de cette nouvelle mission. Cela implique toutefois une transformation beaucoup plus profonde du système financier que ce qui a été fait après la crise de 2008. Il faut aller un cran plus loin. Aujourd'hui, nous voyons les marchés financiers s'écrouler. Est-ce que le fonctionnement des marchés apporte quelque chose à la crise ? Est-ce un thermomètre qui fonctionne bien ? Nous pouvons en douter. De même, lorsque l'Autorité des marchés financiers (AMF) interdit la vente à découvert pendant la crise, nous pouvons nous demander pourquoi les interdire uniquement en période de crise.

Comment allez-vous structurer votre démarche ?

Nous allons être soutenus par un important cabinet de conseil qui va nous aider à créer une plateforme dédiée. L'idée est de reprendre en quelque sorte le modèle de la Convention citoyenne pour le climat, en partant d'un grand forum. Puis de hiérarchiser les sujets, de décider ensemble ceux que nous retenons et d'organiser des groupes de travail. C'est une réflexion que nous démarrons maintenant, mais qui doit s'étaler dans les trois à six mois qui viennent avec comme finalité la publication d'un rapport.

Commentaires 10
à écrit le 25/03/2020 à 16:45
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L'économie c'est la guerre par d'autres moyens et vous êtes des bisounours ! Des télés-teubet announanisés!

à écrit le 25/03/2020 à 16:11
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pour revoir un logiciel, faut savoir programmer c'est pas donne a tout le monde le francais il veut tout revoir pour ce qui lui rapporte qqch sans rien foutre, par contre revoir le logiciel la ou il perd, c'est hors de question la solidarite ca va...

à écrit le 25/03/2020 à 13:59
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Bon, pour avoir le know how, l'idée est d'abord d'avoir a changer ceux qui ont été formaté a la gestion administrative devant la question du développement. (Ce qui est le cas ce casi toutes les élites françaises d'aujourd'hui. Ce format est nuisib...

à écrit le 25/03/2020 à 12:52
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Encore un de ces fouilleurs de m.... qui tentent de profiter de la situation pour faire passer leurs idées très dangereuses de multiplication des contraintes et de nivellement par le bas. No pasaran!

à écrit le 25/03/2020 à 12:43
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"petit manuel de progressisme à l'usage des élites et des biens-nantis" bof cela fait des années que l'on entend la même rengaine et qu'on lit les mêmes papiers qui appellent à des changements sans apporter la moindre idée (ce papier totalement est ...

à écrit le 25/03/2020 à 12:19
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Pas la peine de se fatiguer à palabrer, sans une révolution ou mieux une guerre cela restera "business as usual" et encore, pas sûr qu'ensuite on ne recommence pas dans le "business as usual". La vraie solution est dans la fin du pétrole, ce qui n'e...

le 25/03/2020 à 12:37
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Mais oui garcon la fin du pétrole. Avant de propager des bétises tu relira l'Ile mystérieuse. Pour exactement les même causes on annoncait la fin du charbon. Depuis celui ci se porte mieux que Jamais et si nous faisions un vrai effort sur le nucléa...

à écrit le 25/03/2020 à 11:10
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Je serai bref : un virus parti d'une province de Chine, qui a tardé à déclarer le problème à L'OMS, et qui se propage à vitesse grand V, en Chine et dans d'autres pays grace/à cause de la mondialisation....faut-il remettre en cause tous les paradi...

le 25/03/2020 à 12:23
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@titou 2020 Le progrès économique s'est fait sur l'abondance du pétrole. Ceci aura une fin, qu'il vaudrait mieux anticiper.

à écrit le 25/03/2020 à 11:04
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tiens, tiens, voila la finance et les représentants des grandes entreprises au gouvernement au chevet du monde en récupérant tous ce que les affreux gauchistes, anarchistes, écolos, zadistes disent depuis des lustres, il y a peu de temps nous avons e...

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