Et si Martine Vassal avait eu raison avant l'heure ? Le 4 février dernier, la présidente (ex-LR) de la métropole d'Aix-Marseille et du conseil départemental des Bouches-du-Rhône annonçait à La Tribune Dimanche qu'elle ne mettrait pas en application l'extension de la zone à faibles émissions (ZFE) de la cité phocéenne au 1er janvier 2025. « Là où il n'y a pas de dépassement, il n'y a pas d'obligation punitive. Là où il y en a, vous avez l'obligation de trouver les voies et les moyens pour l'atteindre » avait alors réagi sur LCI, Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.
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Dès juillet 2023, ce dernier avait en effet redessiné la carte des ZFE, confirmant Lyon, Marseille, Paris, Rouen et Strasbourg comme des « Territoires effectifs » car ces cinq métropoles dépassent de manière régulière les seuils réglementaires de dioxyde d'azote. À savoir 40 microgrammes par mètre cube sur trois années au moins sur les cinq dernières années.
Outre Marseille, le maire de Rouen avait également plaidé pour une annulation de l'interdiction des Crit'Air 3 en 2025. Le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires vient de leur donner raison. À l'issue d'un comité interministériel organisé à l'hôtel de Roquelaure ce 19 mars, il vient d'annoncer la sortie du calendrier obligatoire de mise en place des ZFE de Marseille, Rouen et Strasbourg. Ces métropoles ne sont plus en dépassement régulier des normes de qualité de l'air et basculent ainsi en « Territoires de vigilance » aux yeux du ministère.
Lyon et Paris, seules villes à devoir appliquer la réglementation
Cette nouvelle catégorie les place avec les dix autres agglomérations de plus de 150.000 habitants où les ZFE existent déjà. Elles ont toutes mis en place ou prévu des restrictions prévues par la loi et n'ont plus l'obligation de renforcer l'arsenal. Quant aux trente autres qui n'ont pas encore mis en place de règles, la seule obligation prévue par la loi au 1er janvier prochain est la restriction de circulation des voitures immatriculées avant le 31 décembre 1996, c'est-à-dire 3% des véhicules en circulation à date.
En réalité, seules Lyon et Paris dépassent désormais systématiquement les seuils réglementaires depuis 2023. Les voitures de catégories Crit'Air 3, soit les diesel de plus de 14 ans ou les voitures à essence de plus de 19 ans, ne pourront plus entrer dans les deux métropoles à partir du 1er janvier 2025. Au total, 1,55 million de personnes possèdent un véhicule Crit'Air 3, 4 ou 5, dont 1,3 million à Paris.
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Ces deux villes pourront mettre en place des radars pour pénaliser les réfractaires dès le début de l'année 2026. Ces derniers vont en effet entrer en cours d'homologation et de commandes dès avril cette année. Encore faut-il que les élus locaux lancent les appels d'offres, sachant que le temps presse. À l'époque, les deux représentants du gouvernement Borne avaient en effet communiqué sur la mise en place, au second semestre 2024, d'une politique de sanction « par lecture des plaques d'immatriculation ». Sauf qu'à date, pas une collectivité territoriale n'a communiqué sur un quelconque mécanisme de radar.
Une nouvelle campagne pour faciliter l'acceptation des ZFE
Pour limiter les protestations des automobilistes pénalisés, Christophe Béchu a annoncé le lancement d'une nouvelle vague de financement en 2024 pour « faciliter la mise en œuvre opérationnelle et l'acceptabilité sociale des zones de restriction de circulation », mais l'exécutif ne précise pas le montant de l'enveloppe allouée. Pour rappel, en 2023, 218 projets ont été soutenus localement moyennant l'attribution de 127 millions d'euros de subventions. Et ce, alors qu'à l'origine les élus auraient dû bénéficier de 150 millions pour financer des études ou encore des panneaux de signalisation.
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Ce n'est pas tout : le ministère de la Transition écologique promet également de reconduire la campagne de communication nationale « à l'automne prochain », de développer « dans les prochains mois » de nouveaux services sur son site Internet dédié mieuxrespirerenville.gouv.fr ou encore de mettre à disposition des collectivités « des feuillets de pratiques pour l'élaboration des arrêtés d'une ZFE et pour l'association des acteurs économiques ». Reste à savoir de quoi il s'agit concrètement.
Nouveau seuil limite de dioxyde d'azote en 2030
Le ministre a précisé que les métropoles restaient en « Territoires de vigilance » car de nouvelles restrictions pourraient bien s'appliquer dans les années à venir. En effet, le Parlement et le Conseil européen ont établi en février dernier de nouvelles normes de qualité de l'air pour 2030, plus proches des lignes directrices de l'OMS, à savoir un abaissement du seuil de dioxyde d'azote de 40 µg/m³ à 20 µg/m³. Christophe Béchu se dit confiant quant à l'abaissement des émissions dans les métropoles françaises, rappelant la mise en place de dispositifs gouvernementaux comme le leasing social qui favorise la location de véhicules électriques neufs pour les ménages moins aisés.
Le ministre s'engage également à mettre en œuvre le plan de déploiement du rétrofit, dévoilé en avril dernier, et à rétrocéder le produit des amendes des contrôles automatisés aux territoires concernés. À savoir 68 euros, l'engagement ayant déjà été pris par le même ministre et son ex-collègue Clément Beaune en octobre... 2022.