C'est une vignette qui appartient déjà au quotidien des Français à Rouen, Paris, Reims, Strasbourg, Lyon, Saint-Etienne, Grenoble, Nice, Aix-Marseille, Montpellier et Toulouse. Un autocollant collé derrière le pare-brise baptisé Crit'Air (certificat qualité de l'air) qui va du vert ou noir, numéroté 1 à 5, selon l'âge et la pollution du véhicule. Un repère synonyme de zones à faibles émissions-mobilité (ZFE-m), ces espaces routiers visant à limiter la circulation des véhicules les plus polluants à l'intérieur des grandes villes.
Né dans la loi Royal de 2015 et rendu obligatoire par la loi d'orientation des mobilités de 2019, ce dispositif concerne désormais les agglomérations de plus de 150.000 habitants depuis la loi « Climat & Résilience » en 2021. Autrement dit, 33 regroupements de communes ont jusqu'au 1er janvier 2025 pour mettre en place une ZFE. Car le temps presse : rien qu'en 2021, les particules fines et les oxydes d'azote ont causé la mort de 47.000 Français selon les chiffres officiels de Santé publique France.
L'Assemblée conseille d'« accompagner les ménages et les professionnels dans cette transition »
Sauf que le déploiement des zones à faibles émissions-mobilité risque d'être synonymes de « bazar complet » et de « grogne terrible », ont alerté, mi-octobre, Gérard Leseul (PS, Seine-Maritime) et Bruno Millienne (MoDem, Yvelines) dans un rapport de l'Assemblée nationale. Reçus par le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires la semaine dernière, les députés lui ont conseillé d'« accompagner les ménages et les professionnels dans cette transition ».
Aussitôt dit, aussitôt fait. Avec ses collègues Clément Beaune des Transports et Agnès Firmin Le Bodo, ministre de l'Organisation territoriale et des Professions de santé, Christophe Béchu a fait venir, dans la matinée du 25 octobre au ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, les 44 agglomérations. D'autant que l'Etat a encore été condamné, le 17 octobre, par le Conseil d'Etat au nom de la lutte contre la pollution de l'air.
Des bonus, des prêts et des primes pour les particuliers
A l'issue de ce grand raout, Christophe Béchu et Clément Beaune ont fait savoir à la presse que ce comité ministériel sur les ZFE-m se réunirait dorénavant au moins deux fois par an. Sans attendre la prochaine réunion, les ministres ont longuement insisté sur l'accompagnement des ménages, confirmant l'annonce du président Macron du relèvement de 6.000 à 7.000 euros du bonus écologique à l'achat d'un véhicule moins polluant.
« Il y a une surreprésentation de ménages modestes dans les propriétaires de véhicules polluants », a justifié le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.
« Les ZFE sont une nécessité écologique et de santé publique mais n'ont pas vocation à devenir des zones à forte explosion sociale », a appuyé son collègue chargé des Transports.
De la même façon que la prime à la conversion grimpera désormais jusqu'à 5.000 euros maximum, à laquelle s'ajoute une surprime de 1.000 euros pour tous ceux qui habitent ou travaillent dans une zone à faibles émissions. A ces 13.000 euros, un prêt à taux zéro de 30.000 euros garanti par l'Etat pourra être souscrit dès le 1er janvier 2023.
Une politique de sanction dès le second semestre 2024
Parallèlement à toutes ces aides, une politique de sanction « par lecture des plaques d'immatriculation » sera mise en place au second semestre 2024, le temps que les appels d'offres soient lancés par les territoires. Et tant pis pour la métropole du Grand Paris qui souhaite bannir le diesel dès le 1er janvier 2024 en vue des Jeux Olympiques.
« Le produit de ces amendes [de 68 euros] sera intégralement conservé par les collectivités concernées », a promis le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. « Cela laisse un peu de temps pour aller vers une harmonisation européenne », a ajouté Christophe Béchu, interrogé par La Tribune sur le contrôle des véhicules étrangers qui peuvent circuler dans l'Hexagone.
Ce n'est pas tout. Avec son collègue Clément Beaune, il a annoncé le lancement de trois groupes de travail : un premier sur l'harmonisation des règles qui diffèrent d'une agglomération à l'autre, un second sur « l'acceptabilité sociale » et un troisième sur la possibilité de créer des ZFE portuaires. « La Rochelle et Marseille sont très moteurs », a poursuivi Christophe Béchu, sans mauvais jeu de mot.
Une enveloppe de 150 millions d'euros dans le budget 2023
En attendant leurs conclusions, les collectivités territoriales impliquées vont être accompagnées par l'Etat. Dans l'enveloppe de 2 milliards d'euros de « Fonds vert » du budget 2023, elles bénéficieront de 150 millions d'euros pour financer des études ou encore des panneaux de signalisation.
Ces dernières pourront également échanger avec un « monsieur ou madame ZFE » qui va être désigné comme interlocuteur unique interministériel, en lien avec les ministères de l'Intérieur, de la Santé et les entreprises. Un portrait-robot correspondant à celui de Christophe Castaner, ancien ministre de l'Intérieur et futur président - bénévole - du conseil de surveillance du Grand Port maritime de Marseille. Interpellé par La Tribune sur ce nom, le ministre des Transports Clément Beaune botte en touche et retourne à son bureau.
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