Commerce international : Donald Trump maintient une pression maximale sur Pékin

Les négociations commerciales entre les deux pays ne sont pas rompues. Toutefois, l'augmentation des taxes américaines, sur 200 milliards de dollars d'importations chinoises, est désormais entrée en vigueur. Les Etats-Unis menacent, par ailleurs, d'augmenter les droits de douane sur quasiment tout le reste des importations de Chine.
(Crédits : JONATHAN ERNST)

Donald Trump a maintenu une pression maximale sur la Chine, ordonnant vendredi soir à ses services de lancer la procédure en vue d'imposer des droits de douane sur la quasi totalité des importations de produits chinois. Pour autant les négociations commerciales vont se poursuivre, selon Pékin.

Depuis le début de la semaine, le président américain a oscillé entre signes d'apaisement et menaces envers le géant asiatique. Il n'a pas varié vendredi à l'issue d'une session express de négociations à Washington.

Après avoir assuré que les discussions sur le commerce avec Pékin avaient été "franches" et "constructives", il a mis à exécution la menace qu'il brandissait depuis plusieurs mois.

"Le président nous a ordonné de démarrer le processus d'augmentation des droits de douane sur quasiment tout le reste des importations de Chine, évalué à environ 300 milliards de dollars", a indiqué Robert Lighthizer, représentant américain au Commerce (USTR), dans un communiqué. La procédure doit démarrer lundi.

A présent, plus de 250 milliards de dollars d'importations en provenance du géant asiatique sont frappés par des tarifs douaniers punitifs. Et ces derniers sont passés vendredi de 10% à 25% pour 200 milliards de ces importations.

Poursuite des négociations

Le lancement de la procédure pour taxer les quelque 300 milliards d'importations restantes doit faire l'objet d'une notification publique. De plus, la décision d'y procéder ou non doit être précédée d'une période de consultations. La mesure ne serait donc probablement pas effective avant plusieurs mois.

Cette annonce est donc davantage une façon de ne pas desserrer l'étau sur Pékin. Mais elle pourrait aussi compromettre l'issue des négociations. Sur ce point, Donald Trump est resté vague vendredi, indiquant que les discussions allaient se poursuivre mais à une date indéterminée.

De son côté, le chef des négociateurs chinois Liu He a expliqué que les pourparlers commerciaux avec les Etats-Unis allaient se poursuivre à Pékin en dépit des obstacles. "Les négociations n'ont pas échoué, au contraire (les obstacles sont) un revirement normal dans les négociations (...) c'est inévitable" entre les deux pays, a indiqué M. Liu devant des médias chinois à l'issue des pourparlers.

Trois points de désaccord

Le négociateur, considéré comme un très proche du président Xi Jinping, a fait état de "trois points de désaccord" persistant entre les deux puissances.

"Si nous parvenons à un accord, les droits de douane punitifs devront être retirés", a-t-il prévenu. M. Liu a également souligné un différend sur le montant des importations de produits américains supplémentaires que Pékin s'est engagé à acheter pour réduire l'énorme déséquilibre commercial entre les deux pays.L'administration Trump avait déploré lundi que Pékin soit revenu sur ses engagements.

En troisième point de friction, le négociateur chinois a évoqué le texte final d'un éventuel accord."(Il) doit être équilibré", a prévenu Liu He.

Le milliardaire républicain a aussi entretenu le doute sur le devenir des droits de douane supplémentaires entrés en vigueur vendredi. Ceux-ci "pourraient être levés, ou pas", en fonction de l'avancée des "négociations futures", a-t-il simplement tweeté. Assurant que sa relation avec son homologue chinois Xi Jinping restait "très forte", le président américain n'a pas non plus indiqué s'il s'était entretenu avec lui.

Washington aurait donné à Pékin trois à quatre semaines pour parvenir à sceller un traité, faute de quoi les tarifs douaniers se propageront à l'ensemble des importations venant de Chine (539,5 milliards en 2018), avait affirmé plus tôt l'agence d'informations économiques Bloomberg, citant deux sources proches du dossier.

Les discussions de vendredi ont été particulièrement brèves. Le vice-Premier ministre chinois Liu He, qui dirigeait la délégation chinoise, a en effet quitté le lieu des négociations deux heures seulement après y être entré.

Serrant les mains du représentant au Commerce (USTR) Robert Lighthizer et du secrétaire au Trésor Steven Mnuchin tout en saluant les journalistes, il est sorti tout sourire sans faire de commentaire.

Jouant la montre --"pas besoin de se précipiter"--, Donald Trump avait, lui, loué les bénéfices des mesures protectionnistes américaines: "Les droits de douane apporteront beaucoup plus de richesses à notre pays qu'un accord traditionnel, même exceptionnel".

Représailles chinoises à venir

L'augmentation des droits de douane supplémentaires, appliquée depuis vendredi, porte sur une myriade de marchandises (télévisions, ameublement, automobiles, etc).

Pékin "n'aura d'autre choix que de prendre de nécessaires mesures de représailles", a immédiatement averti le ministère chinois du Commerce.

"Dans une guerre commerciale, il n'y a que des perdants", a réagi Gregory Daco, économiste chez Oxford Economics, en écho à de nombreux économistes. Les consommateurs américains, friands des biens chinois, ne devraient pas être épargnés.

Le Fonds monétaire international (FMI) martèle depuis des mois qu'au-delà des frontières américaines et chinoises, l'onde de choc d'un conflit durable pourrait atteindre toute l'économie mondiale.

Mais l'administration Trump est restée sourde aux mises en garde, déterminée à refonder la relation commerciale entre les deux pays, qui se disputent ni plus ni moins la domination dans les technologies du futur.

Elle exige la réduction du colossal déficit commercial américain avec Pékin (378,73 milliards de dollars en 2018), des "changements structurels" comme la fin du transfert forcé des technologies, la protection de la propriété intellectuelle américaine ainsi que la fin des subventions chinoises aux entreprises d'Etat.

L'annonce du représentant au Commerce risque de susciter le courroux des agriculteurs fragilisés par la guerre des tarifs douaniers. Elle devrait aussi être fraichement accueillie sur les marchés financiers lundi. D'autant qu'à Pékin, le porte-parole du ministère chinois du Commerce Gao Feng a prévenu: "La Chine ne capitulera pas face à la pression".

Par Delphine Touitou et Jérôme Cartillier

Commentaires 7
à écrit le 12/05/2019 à 15:02
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Trump avec la Corée du Nord, il a mordu dans l''oreiller. Il n'a pas l'intention de recommencer avec les Chinois. Hi, hi, hi...................

à écrit le 11/05/2019 à 21:27
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Trump agit, c'est sûr, il faut lui reconnaitre ça. Par contre ce n'est pas un bon négociateur, il n'a rien obtenu de la Corée du nord , il n'a rien obtenu de la Chine et il se met en position de ne rien obtenir de l'UE. La première grosse erreur de...

à écrit le 11/05/2019 à 21:12
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Qui sont les perdants? Ce sont les entrepreneurs américains et canadiens qui ont trahi leur pays, en le quittant pour aller fabriquer leurs produits a tres bon marché, sur des travailleurs chinois exploités et salaires de misere, pour ensuite les imp...

le 12/05/2019 à 5:00
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Vous avez encore une image des travailleurs chinois très ancienne. L'idée selon laquelle les chinois travaillant pour un salaire de misère dans des conditions proches de l'esclavage est de moins en moins vraie car figurez vous que le salaire moyen da...

à écrit le 11/05/2019 à 12:40
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Si Macron pouvait s'en inspirer un minimum au lieu de baisser sans cesse son pantalon, ce qu'il a commencé à faire en renonçant à l'aéroport de Notre Dame des Landes qui restera le point de départ de sa fulgurante descente aux enfers. Tout comme ses ...

à écrit le 11/05/2019 à 10:50
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Marrant quand on écoute nos politiciens européens affolés hurler:"Il faut à tout prix éviter une guerre commerciale !" Alors qu'elle est là et d'une ampleur phénoménale depuis plus d'un an maintenant, si la bourse ne dévisse pas c'est que Trump est t...

à écrit le 11/05/2019 à 10:42
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Le protectionnisme, c'est très bien. Ça n'a rien d'une guerre, c'est totalement pacifique. C'est bon pour l'écologie, donc pour la planète aussi.

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