Dette américaine : les Etats-Unis risquent le défaut de paiement dès début juin, avertit le Congrès

Le service du budget du Congrès aux Etats-Unis (CBO) a annoncé ce vendredi que le pays de la première puissance mondiale pourrait se retrouver en défaut de paiement dès le mois prochain. Les tensions sont telles entre républicains et démocrates qu'elles ont conduit à un report des discussions à la semaine prochaine.
A ce stade, accord n'a été trouvé entre démocrates et républicains pour relever le plafond de la dette aux Etats-Unis.
A ce stade, accord n'a été trouvé entre démocrates et républicains pour relever le plafond de la dette aux Etats-Unis. (Crédits : Reuters)

Les Etats-Unis vont-ils se retrouver en très mauvaise posture dès le mois prochain ? Le pays pourrait faire défaut à compter de début juin, si aucun accord n'est trouvé entre démocrates et républicains pour relever le plafond de la dette, a indiqué le service du budget du Congrès (CBO), ce vendredi 12 mai.

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Agence indépendante politiquement, le CBO est chargé de fournir au Congrès des analyses budgétaires et économiques. Il avait auparavant estimé que le défaut de paiement risquait de se produire entre juillet et septembre. L'annonce du CBO n'est pas une surprise. Le département au Trésor, lui-même, avait déjà évoqué la date du 1er juin pour un éventuel défaut de paiement de la première économie du monde, une situation inédite.

Une manœuvre législative indispensable

D'ici là, la Chambre des représentants, qui doit voter pour relever le montant maximal que les Etats-Unis sont autorisés à emprunter, ne sera en session que pendant huit jours. Et Joe Biden est censé s'absenter, dans moins d'une semaine, pour une tournée diplomatique de plusieurs jours en Asie. Il a toutefois indiqué qu'il y renoncerait si le blocage persistait. Et pour cause, cette manœuvre législative est indispensable. Elle doit permettre à la première économie mondiale de continuer à emprunter et à payer ses factures, ses fonctionnaires et ses créanciers.

Le FMI s'est inquiété jeudi des « graves répercussions » sur l'économie mondiale qu'aurait un défaut de paiement des Etats-Unis, sans accord. Le président Joe Biden, qui exclut pour le moment des coupes budgétaires, a accusé les républicains au Congrès de tenir l'économie en « otage ». Mercredi, il a reçu à la Maison Blanche les responsables des deux camps.

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L'ancien président républicain Donald Trump, candidat à l'élection de 2024, a exhorté mercredi les élus républicains à « provoquer un défaut de paiement », si les démocrates ne concèdent pas « des coupes massives ». Il a cependant estimé que le défaut serait probablement évité, prédisant que les démocrates allaient « céder » sur le dossier. Joe Biden quant à lui réclame un relèvement sans conditions du plafond d'endettement, en faisant valoir que pendant très longtemps, y compris sous la présidence de son prédécesseur, le Congrès avait voté en ce sens sans débat particulier.

Une réunion reportée « la semaine prochaine »

La ministre de l'Economie et des Finances de Joe Biden, la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, avait adressé une mise en garde. Elle a estimé que seul le fait de flirter avec le défaut de paiement, en poussant les négociations à leurs limites « peut entraîner des coûts économiques importants ».

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Quel sera l'agenda politique à venir ? Le calendrier s'est encore un peu plus compliqué. Une réunion prévue ce vendredi 12 mai sur la dette publique entre Joe Biden et le patron républicain de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, et d'autres dirigeants parlementaires, a été repoussée au « début de semaine prochaine », a déclaré jeudi un porte-parole de la Maison Blanche. Ce report est « positif », a assuré une source proche des discussions, « les équipes poursuivent leurs réunions et ce n'était pas le bon moment d'impliquer les dirigeants » au plus haut niveau.

« La Maison Blanche n'a pas annulé la réunion, nous avons tous décidé qu'il était dans notre intérêt de laisser nos équipes se réunir encore avant de nous retrouver », a déclaré Kevin McCarthy, lors d'une conférence de presse.

Joe Biden n'a « pas de plan », « apparemment il ne veut pas d'accord, il veut un défaut de paiement », a encore dit le ténor conservateur.

Le 14e amendement, la solution miracle ?

Parmi les solutions avancées pour sauver les Etats-Unis en l'absence d'accord, figure le recours au 14e amendement de la Constitution. Ce dernier, ajouté en 1868 à la Constitution américaine, après la guerre de Sécession, stipule que « la validité de la dette publique des Etats-Unis, autorisée par la loi, (...) ne doit pas être remise en question ». Autrement dit, les dépenses déjà votées doivent pouvoir être honorées.

Au sortir de la guerre civile, en effet, « les inquiétudes grandissaient (au sein des Etats du Nord, vainqueurs, ndlr) quant au fait que les législateurs du Sud réadmis au Congrès continueraient de détruire notre union fédérale, mais de l'intérieur, en répudiant la dette fédérale occasionnée par la guerre », explique à l'AFP Robert Hockett, professeur de droit à l'université Cornell. Le plafond de la dette est ensuite venu, en 1917, se superposer à ce texte.

En laissant entendre qu'il pourrait y avoir recours, « ce que dit Biden, c'est que si le Congrès ne vote pas pour relever le plafond de la dette, il peut de toute façon payer les obligations car c'est son devoir constitutionnel », souligne Mark Graber, professeur à la faculté de droit de l'université du Maryland. Pas de procédure particulière, puisque Joe Biden doit « demander à la secrétaire au Trésor, Janet Yellen, de simplement continuer à émettre cette dette si nécessaire pour payer les factures de la nation », indique Robert Hockett. Et donc faire comme si le plafond de la dette n'existait pas.

Des risques persistent

Mais à ce stade, le président a exclu d'y recourir à court terme, pour cause de complications juridiques, prévoyant plutôt de laisser passer la crise pour y réfléchir. Le principal obstacle serait un recours en justice intenté par l'opposition républicaine. Le professeur Robert Hockett pense qu'ils ne le feront pas. Cela les mettrait « dans une position très inconfortable parce qu'ils intenteraient des poursuites pour forcer le président à faire défaut sur la dette nationale », estime-t-il.

Pour Mark Gruber au contraire, aucun doute, « les républicains vont contre-attaquer en disant (que Joe Biden) ne comprend pas le 14e amendement qui se réfère à la dette uniquement, et qu'il peut donc pas rembourser la dette (déjà cumulée) sans engager de nouvelles dépenses », assure Mark Graber. Dans les deux cas, les risques existent, souligne Neil Buchanan, professeur de droit à l'Université de Floride.

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 14/05/2023 à 12:18
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Don't panic, c'est comme ça à chaque fois que la chambre n'est pas du même bord que le président et après négociations (comprendre "achats de voix contre service ou budget débloqué"), ça se règle tout seul dans les délais. C'est juste de la politiqu...

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