Guerre en Ukraine : l'exigence de Poutine de facturer le gaz russe en roubles constitue une rupture de contrat pour les Européens

Après l'annonce ce mercredi par Vladimir Poutine que la Russie n'acceptera plus de paiements en dollars ou en euros pour les livraisons de gaz à aux entreprises européennes qui devront donc payer en roubles, l'Allemagne mais aussi des opérateurs européens comme le groupe autrichien OMV ou Engie ont expliqué qu'une facturation en roubles constituait une rupture de contrat.
(Crédits : Gary Cameron)

Les critiques européennes sont à la hauteur de la menace russe. Après l'annonce ce mercredi par Vladimir Poutine que la Russie n'acceptera plus de paiements en dollars ou en euros pour les livraisons de gaz à aux entreprises européennes qui devront donc payer en roubles, l'Allemagne, dépendante du gaz russe, mais aussi des opérateurs européens comme Engie ont rappelé qu'une facturation en roubles s'apparentait à une rupture contrat.

Cette exigence de Moscou "constitue une rupture de contrat", a en effet déclaré ce mercredi le ministre de l'Économie Robert Habeck lors d'une conférence de presse à Berlin.

"Nous allons maintenant discuter avec nos partenaires européens de la manière de répondre à cette demande", a-t-il ajouté,

Le gaz russe représente 40% des importations européennes

Le gaz russe représente 40% des importations de l'Union européenne mais cette part grimpe à 55% dans le cas de l'Allemagne Et malgré les sanctions, l'UE refuse d'imposer un embargo sur le gaz russe qui continue d'être acheté massivement, le temps de trouver d'autres sources d'approvisionnement. Selon le Centre for Research on Energy and Clean Air (Crea), les pays européens ont acheté pour plus de 10 milliards d'euros de gaz à la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine.

Interrogé mercredi sur France Info, Jean-Pierre Clamadieu a lui aussi mis en avant les clauses contractuelles de ses accords d'approvisionnement avec Gazprom.

"Nos contrats prévoient un paiement du gaz en euros, il n'y a pas de clause qui permette au vendeur de changer de devise, donc nous allons essayer de comprendre ce que veut dire cette position qui pour l'instant ne nous a pas été notifiée par notre contrepartie, qui est Gazprom", a-t-il expliqué, en avouant "ne pas savoir quel est le signal politique que voulait donner Vladimir Poutine, au-delà de la volonté de renforcer sa monnaie".

Même son de cloche du côté du groupe pétrolier et gazier autrichien OMV, détenu à 31,5% par l'État autrichien. Ce dernier, qui a récemment reconnu que les solutions de l'Autriche pour se passer du gaz russe étaient "très limitées", a carrément annoncé mercredi qu'il continuerait de régler à la Russie ses achats de gaz en euros. OMV continuera "bien sûr" à régler en euros, a déclaré son PDG, Alfred Stern, à la télévision autrichienne Puls 24.

"Nous n'avons pas d'autre base pour le contrat. Je serais dans l'incapacité de faire autrement", a-t-il ajouté. Tout en indiquant avoir lu les informations de presse sur la décision du président russe, Alfred Stern a affirmé que "personne [du côté russe] ne nous a appelés, nous avons les contrats existants et [payer en roubles] n'est pas ce qui y est prévu".

La décision d'arrêter d'acheter en Russie appartient aux gouvernements (Engie)

Difficile de voir comment cette situation va se dénouer, alors que Vladimir Poutine a donné une semaine aux autorités russes pour élaborer un nouveau système de paiement des livraisons de gaz en roubles. Les deux parties se tiennent par la barbichette. L'UE a besoin du gaz russe et la Russie a besoin d'argent. Or, si la pression est énorme pour cesser d'acheter du gaz russe, les entreprises européennes sont dans l'incapacité aujourd'hui de s'affranchir des approvisionnements russes. Moins dépendants, Washington a décidé d'interdire les importations d'hydrocarbures russes et le Royaume-Uni a annoncé l'arrêt de ses importations d'énergie russe d'ici fin 2022.

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Pour sortir de cette dépendance, les pays européens, au premier chef l'Allemagne, démultiplie les efforts pour réduire rapidement sa dépendance à la Russie en démarchant d'autres fournisseurs. Berlin va notamment accélérer la construction de terminaux GNL en vue d'importer du gaz liquéfié. Un accord vient d'être signé avec le Qatar, important exportateur de GNL (gaz naturel liquéfié), pour une "fourniture de long terme".

En France, alors que la pression sur les entreprises françaises pour quitter la Russie a atteint son paroxysme hier avec l'appel au boycott de Renault partout dans le monde lancé par un membre du gouvernement ukrainien (avant l'annonce du constructeur automobile de la suspension de ses activités russes), Engie a expliqué que l'éventuelle décision de cesser d'acheter du gaz russe appartient aux gouvernements européens.

"Si nous décidions d'arrêter d'acheter du gaz russe, ça suppose immédiatement des décisions des pouvoirs publics pour faire face à une forme de pénurie", a expliqué Jean-Pierre Clamadieu, sur Franceinfo.

"Et du coup nous sommes vraiment convaincus que c'est une décision qui doit être prise par la puissance publique et probablement par l'Europe, parce que c'est elle qui a la capacité à prendre de telles décisions et à l'accompagner des mesures qui seraient nécessaires", a-t-il ajouté. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a demandé mercredi aux entreprises françaises de cesser de soutenir "la machine de guerre" russe.

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"Nous sommes face à une décision qui ne peut être qu'une décision de gouvernement et quelle que soit la décision prise par les gouvernements, nous la respecterons, bien sûr", a insisté Pierre Clamadieu.

Selon lui, l'Europe pourrait remplacer facilement la moitié de ses importations de gaz russes. Pour compenser l'autre moitié, il faudrait "des efforts de réduction de consommation relativement importants".

Sans gaz russe, une partie de l'économie européenne s'effondre (TotalEnergies)

Hier sur RTL, le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, expliquait lui aussi l'impossibilité de se passer du gaz russe, sans lequel une partie de l'économie européenne "s'arrêterait".

"Je sais remplacer ce pétrole et ce diesel" russes mais "le gaz, je ne sais pas le faire. Si je décide d'arrêter d'importer du gaz russe, je ne sais pas le remplacer, je n'en ai pas de disponible. J'ai des contrats de 25 ans et je ne sais pas sortir de ces contrats", a-t-il déclaré

Concernant l'annonce de retrait de Russie de certains groupes anglo-saxons, "personne n'est parti, mes concurrents continuent de prendre le gaz russe parce qu'on a des contrats long terme et qu'on ne sait pas les arrêter, sauf si les gouvernements décident de sanctions qui font qu'on peut utiliser la force majeure. Si j'arrête le gaz russe, je paie des milliards immédiatement aux Russes", a affirmé le PDG.

"Sans gaz russe, on arrête une partie de l'économie européenne" et, à ce stade, les gouvernements européens n'ont pas décidé de sanctionner le gaz russe, rappelle-t-il en ajoutant: "si nous arrêtons le gaz russe, nous savons que l'hiver 2023, nous avons un problème, en janvier 2023 il faudra rationner l'utilisation du gaz, pas pour les particuliers mais sans doute pour les industriels en Europe".

Quitter totalement la Russie? "Je ne vais pas le faire, on a investi dans des usines pour presque 13 milliards de dollars, ce n'est pas un problème d'argent, ces usines vont continuer à tourner que je m'en aille ou non. Me retirer c'est donner ces 13 milliards à des Russes, pour zéro car personne ne peut les acheter. Vous voulez que j'abandonne des actifs en Russie pour enrichir des Russes qu'on a mis sous sanction ?" a-t-il lancé.

Lire aussi 5 mn"Monsieur Jadot passe son temps à dire du mal de mon entreprise. Ce que j'observe c'est que ça le fait baisser dans les sondages" (PDG de TotalEnergies)

Commentaires 34
à écrit le 25/03/2022 à 16:39
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Ce monsieur Jadot, quelle nullité ! ! !

à écrit le 25/03/2022 à 5:25
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Comme si les embargos, les saisies, les blocages et autres "sanctions" contre la Russie, ses entreprises et ses citoyens étaient conformes au droit des contrats ! C'est la guerre, comme l'avaient toujours souhaité les Etats-Unis et leur instrument mi...

le 25/03/2022 à 8:19
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Qui a agressé un pays tiers? c'est bien la russie, qui fait la guerre? c'est bien la russie. Personne n'a agressé la russie en premier ressort La bise à ton chef !

à écrit le 25/03/2022 à 2:57
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C’est tout de même surprenant de lire des commentaires prenant la défense du gouvernement de Poutine, justifiant d’une manière ou d’une autre son agression en Ukraine, exaltant les capacités de la Russie, enfonçant et accusant les démocraties occiden...

à écrit le 25/03/2022 à 1:50
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Encore une intox de Poutine, il annonce, il annonce mais pas de courrier officiel de Gazprom... La Russie ne peut pas se passer de son plus gros client: l'Europe. A tous ceux qui disent que la Russie a le droit de rétorquer aux sanctions Européenne...

le 25/03/2022 à 11:01
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Personne ne fera confiance, mais les marchands (du temple) y seront toujours prêts.

à écrit le 24/03/2022 à 22:23
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Mr Pouyanné est un homme très avisé et qui réfléchit en évitant l'immédiateté émotionnelle, mauvaise conseillère. Ce faisant il est constructif et j'approuve.

à écrit le 24/03/2022 à 15:14
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Une telle rupture de contrat peut-elle valoir à la russie une exclusion de l'OMC ???

le 24/03/2022 à 18:06
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Cela ne risquerait pas de durer longtemps croyez-moi. Dès que les russes couperont les robinets tout ce petit monde acceptera les conditions de la Russie et feront pression pour que la marionnette ukrainienne arrête son cirque.

le 24/03/2022 à 19:30
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Et les sanctions occidentales, elles sont conformes à l'OMC? Et le gel des avoirs, et la confiscation des réserves en devises?? C'est l'occident qui se montre un partenaire non-fiable et non l'inverse.

à écrit le 24/03/2022 à 13:38
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Il y a rupture de contrat par les Russes, dont acte. Et? On convoque Poutine au tribunal du commerce? Pour entamer une procédure qui va durer 10 ans (Poutine sera mort de vieillesses avant la fin) . Le contrat est à la poubelle et c'est celui qui a ...

le 24/03/2022 à 17:52
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alors a chaque changement de non d'une societe tous les clients doivent obtenir une reduction pour changement de contrat

à écrit le 24/03/2022 à 13:31
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et oui c'est clair, il n'est plus vendeur pour l'Europe

à écrit le 24/03/2022 à 11:57
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De toute facon il n'y a aucune raison de se gener avec les russes,leur signature ne vaut pas un clou !

à écrit le 24/03/2022 à 10:47
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On va acheter des radiateurs électriques pour remplacer la chaudière gaz un an ou deux [en ayant résilié l'abonnement, c'est pas négligeable comme dépense fixe], le temps d'approvisionner assez de gaz. Les installations industrielles ne se "transform...

le 24/03/2022 à 11:04
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En savoie il y avait la tradition des lits-clos. La couche a 20°, on chauffe un peu la salle de bain le matin et le reste du logement en hors gel l'hiver. Cool, ça va être chouette et économique le nouveau monde.

à écrit le 24/03/2022 à 10:28
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Je ne comprend pas pk les russe ne coupe pas les robinets avec tout les sanctions qu on lui as imposer il devrais le faire .et on va voir l Europe si elle est capables d’être indépendante. Suivre les américains qui sont eux autosuffisants pour eux es...

le 24/03/2022 à 12:51
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L'Etat russe tire l'essentiel de ses recettes de l'export de matières premières, en premier lieu les hydrocarbures. L'argent est le nerf de la guerre. Déjà à ressources constantes leur armée piétine avec des problèmes d'approvisionnement ubuesques qu...

à écrit le 24/03/2022 à 10:06
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En guerre c'est la force qui fait la loi... Nos autorités devaient bien s'attendre à des mesures de rétorsion après tout gouverner c'est prévoir..

à écrit le 24/03/2022 à 9:46
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Le problème est simple : ou bien les Européens acceptent ou bien ils n'ont plus de gaz et auront froid et arrêteront leurs usines. Les Chinois achèteront eux. L'Eurpope n' a plus de colonies avec des matières premières et une main d'oeuvre gratuites...

le 24/03/2022 à 10:43
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Les chinois achèteront, c'est sûr mais ont aussi un contrat récent sur 20 ans avec les USA (! ennemi mais fournisseur de gaz, pragmatisme oblige), des fois que la Russie coupe un jour le gaz. :-) Il reste à construire les pipelines Russie / Chine (la...

à écrit le 24/03/2022 à 9:35
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Ou est le problème ? La guerre économique enclenché par Paris , et autres vassaux de Washington a , en effet, "quelques effets secondaires".. c'est encore le peuple qui paiera l'addition.

à écrit le 24/03/2022 à 9:10
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L'hiver prochain, déjà.. c'est loin. Si on a froid, on mettra un pull et une couverture en plus. On réduira la température de départ de l'eau chaude et on passera le balai plutôt que l'aspirateur etc... Ça ne fera d'ailleurs de mal à personne de s'ha...

le 24/03/2022 à 10:44
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@Valbel Valbel l'adepte de la décroissance et de la misère partagée par tous. On va réaliser vos vieux rêves écolo-marxistes, vous allez être content.Quelle descente dans les oubliettes de l'Histoire, c'est assez édifiant de lire des bétises pareill...

le 24/03/2022 à 13:10
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@ réponse de Alo2 Ce n'est pas revenir en arrière que d'économiser l'énergie, surtout l'énergie produite avec des combustibles fossiles. Vivre, ce n'est pas consommer à tort et à travers. Il y a 40 ans j'installais déjà dans mon chalet ma première...

à écrit le 24/03/2022 à 9:08
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L'Europe n'a qu'à lui contre-proposer de le payer en monnaie de singe ou en billets de Monopoly ? Puisqu'on peut changer les règles du jeu comme on veut en cours de partie, ça doit être valable dans les 2 sens...

le 24/03/2022 à 9:48
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Oui, mais alors les Russes mettront du vent dans les pipe line !!!!

à écrit le 24/03/2022 à 9:05
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L'UE vient découvrir que "ses" sanctions lui reviennent en pleine figure. Cela s'appelle "l'effet boomerang" Merci Joseph Robinet Biden! Ah! Ah! Ah!

à écrit le 24/03/2022 à 8:32
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Rupture de contrat : voilà un argument qui va conduire la Russie à fermer le robinet. La croisade des enfants ne nous a rien appris et on la recommence innocemment...

à écrit le 24/03/2022 à 7:41
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D'ici une quinzaine de jours les allemands vont se dire que finalement, la dépendance au gaz russe c'était pas si mal que ça, voire même une très bonne chose. Ah ah ah.

à écrit le 24/03/2022 à 7:35
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Les bases d’une économie nationale consistent à s’assurer de l’alimentation de sa population, et de l’énergie. Le russes sont indépendants sur ces deux secteurs clefs. dès lors, les politiques de sanctions sont et seront inefficaces, et vont se retou...

le 24/03/2022 à 8:55
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Il faut pas exagerer. deja les russes sont certes independant pour l energie et la nourriture mais c est tout (et encore, une fois leur tracteurs HS, ils vont faire comment ? idem avec les chambres froides, les camions, les ordinateurs ... tout est i...

à écrit le 24/03/2022 à 7:33
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Le vladimir il était presque sympa a continuer de livrer avec tout ce qu'on lui a fait. Bloquer les avoirs de la bc russe et bloquer swift c'est presque un acte de guerre, vous vous souvenez du nono qui s'était fait recadrer par un ministre russe sur...

le 24/03/2022 à 18:06
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"Le vladimir il était presque sympa a continuer de livrer avec tout ce qu'on lui a fait. " Quand les nazis sont entré en Russie pendant deux semaines les livraisons de minerais ont continué d'entrer en Allemagne par le train qui pourtant allaient ...

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