Jugée "arbitraire", la détention de Carlos Ghosn devrait être indemnisée, selon des experts de l'ONU

Les experts de l'organisation, - qui ont travaillé sur des éléments fournis par une "source" dont le nom n'est pas donné -, soulignent que leur avis ne porte pas sur les accusations portées à l'encontre de M. Ghosn au Japon, mais sur les conditions dans lesquelles la procédure a été menée.
(Crédits : Mohamed Azakir)

La "privation de liberté" de l'ancien magnat de l'automobile Carlos Ghosn au Japon était "arbitraire", assure le Groupe de travail de l'ONU sur la détention arbitraire, qui demande que l'ancien patron de Renault et Nissan soit indemnisé.

C'est un tableau accablant que dressent ces experts indépendants, qui dépendent du Conseil des droits de l'Homme mais ne s'expriment pas au nom des Nations unies.

Le gouvernement japonais a jugé cet avis "totalement inacceptable" et souligné qu'il "n'est "pas juridiquement contraignant".

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Dans leur avis posté le 20 novembre, mais diffusé seulement lundi dans les médias, les experts concluent que "le processus d'arrestation et de détention de M. Ghosn à quatre reprises était fondamentalement inéquitable, car il l'a empêché de retrouver sa liberté et de bénéficier des autres droits à un procès équitable, notamment celui de communiquer librement avec un avocat".

Et d'ajouter: les "violations du droit à un procès équitable étaient d'une telle gravité qu'elles ont conféré à la détention de M. Ghosn un caractère arbitraire".

En outre, soulignent-ils, "M. Ghosn a été détenu dans des conditions de nature à le contraindre à faire des déclarations le mettant en cause, ceci en violation de son droit à la présomption d'innocence".

Les experts de l'ONU soulignent que leur avis ne porte pas sur les accusations portées à l'encontre de M. Ghosn au Japon, mais sur les conditions dans lesquelles la procédure a été menée.

A cet égard, le Groupe de travail de l'ONU est d'avis que "la privation de liberté de Carlos Ghosn du 19 novembre 2018 au 5 mars 2019 et du 4 au 25 avril 2019, en violation des articles 9, 10 et 11 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et des articles 9, 10 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, était arbitraire".

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"Un droit exécutoire à une indemnisation"

Il note notamment que les conditions de mise en liberté sous caution imposées à M. Ghosn "semblent avoir été exceptionnellement strictes, en particulier l'interdiction, pendant la deuxième période de mise en liberté sous caution, de tout contact avec son épouse, autrement que par l'intermédiaire de ses avocats, sans autorisation préalable du tribunal et pour une durée indéterminée".

"Compte tenu de toutes les circonstances de l'affaire, la réparation appropriée serait d'accorder à M. Ghosn un droit exécutoire à une indemnisation et à d'autres réparations, conformément au droit international", considère-t-il.

Pour les avocats de M. Ghosn, François Zimeray et Jessica Finelle, cet avis "est une décision courageuse qui constitue un tournant décisif".

Le Groupe de travail exhorte le gouvernement japonais à garantir "une enquête complète et indépendante sur les circonstances entourant la détention arbitraire de M. Ghosn, et à prendre des mesures appropriées contre les responsables de la violation de ses droits".

Les experts, qui ont travaillé sur des éléments fournis par une "source" dont le nom n'est pas donné, demandent à cette dernière et au gouvernement japonais de leur fournir des informations sur les mesures prises, notamment en matière de réparation, dans un délai de six mois.

L'ex-patron du numéro un mondial de l'automobile Renault-Nissan-Mitsubishi Motors avait été arrêté le 19 novembre 2018 à son atterrissage à Tokyo, soupçonné d'avoir omis de déclarer une grande partie de ses revenus aux autorités boursières entre 2010 et 2015.

Le 5 mars 2019, un juge japonais acceptait sa libération sous caution, avec interdiction de quitter le Japon, mais quelques semaines après, le 4 avril, il était de nouveau arrêté, accusé d'avoir utilisé 5 millions de dollars pour son bénéfice personnel avant d'être libéré sous caution le 25 avril.

Carlos Ghosn, qui nie ces accusations, était arrivé le 30 décembre à Beyrouth au terme d'une fuite rocambolesque du Japon.

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Commentaires 2
à écrit le 24/11/2020 à 13:10
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C'est bien l'ONU s'est penché sur le cas Carlos Goshn. Et sur le cas des gilets jaunes ca monte aussi á l'ONU?

à écrit le 24/11/2020 à 10:48
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Ce Groupe de Travail de l'ONU a pris une excellente décision. La justice japonaise est du type antédiluvien (dans sa tombe, C. Beccaria doit souffrir) SI monsieur C. Ghosn avait été de nationalité américaine, cela ne serait pas passé de cette faço...

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