Après son plan visant à réduire l'étroite dépendance de l'Europe au gaz russe, l'Agence internationale de l'énergie (AIE), chargée de conseiller les pays de l'OCDE en matière de politique énergétique, propose dix recommandations pour se passer du pétrole de la Russie, aujourd'hui le premier exportateur mondial.
En 2021, les pays européens de l'OCDE ont représenté 49% des exportations russes de brut et de produits raffinés. Les sanctions internationales contre Moscou ont provoqué une envolée des cours du baril qui ont frôlé les 140 dollars avant de refluer pour évoluer sous les 100 dollars ces derniers jours. Un plan qui n'est pas sans rappeler celui de la "chasse au gaspi" lancé par le gouvernement français dans les années 1970 pour réduire la facture énergétique.
Un effort focalisé sur les transports
Les recommandations de l'AIE visent avant tout l'économie d'énergie dans les transports, première utilisation des produits pétroliers, alors que se profile le pic de consommation que représente la saison estivale (juillet-août) où la circulation des véhicules est la plus importante.
Outre d'enrayer l'envolée des cours, ces mesures d'urgence permettront de réduire en quatre mois la demande mondiale de 2,7 millions de barils par jour (mbj) - l'équivalent de la demande totale des automobiles en Chine, selon l'AIE - qui devrait s'élever, selon les estimations de l'agence, à 99,7 mbj en 2022, soit 2,1 mbj de plus qu'en 2021.
Ces mesures vont aussi avoir un effet de levier pour accélérer la transition énergétique visant la décarbonation de l'économie, nécessaire pour lutter contre le réchauffement climatique, avec en ligne de mire l'objectif zéro carbone à l'horizon 2050.
L'un des intérêts des 10 recommandations est leur évaluation en terme de volume économisé :
- 1. Réduire les limites de vitesse sur les autoroutes d'au moins 10 km/h (économie : 290.000 barils par jour (b/j) pour les voitures, 140.000 b/j pour les camions) ;
- 2. Télétravail jusqu'à trois jours par semaine (- 500.000 b/j) ;
- 3. Dimanches sans voiture dans les villes (-380.000 b/ par dimanche) ;
- 4. Réduire le prix des transports publics et encourager la marche et le vélo pour les parcours courts (-330.000 b/j)
- 5. Circulation alternée des voitures privées dans les grandes villes (-210.000 b/j)
- 6. Favoriser le recours à l'autopartage (-470.000 b/j)
- 7. Promouvoir une conduite efficace pour les camions et la livraison de marchandises (-320.000 b/j)
- 8. Substituer autant que possible des trains à grande vitesse et de nuit aux voyages en avions (-40.000 b/j)
- 9. Évitez les voyages d'affaires en avion en utilisant d'autres options (-260.000 b/j)
- 10. Renforcer l'adoption de véhicules électriques et plus efficaces (-100.000 b/j)
Appliquer ces mesures, souligne l'agence, va entraîner des changements d'attitudes chez les consommateurs que chaque pays doit favoriser par une politique énergétique qui tienne compte des particularités du marché local des produits pétroliers.
Des plastiques plus durables
L'AIE insiste sur le fait que de telles démarches ne sont pas transitoires mais doivent devenir pérennes, appelant les gouvernements à faire preuve de volontarisme. Elles accompagnent une politique plus globale de lutte contre le réchauffement climatique avec l'évolution d'un parc d'automobiles à moteur thermique vers les modèles électriques, le développement d'innovations pour économiser l'énergie, l'investissement dans les alternatives au pétrole, ou encore le remplacement accéléré du chauffage au fuel par des pompes à chaleur. Enfin, la production et la consommation de plastiques - un débouché croissant pour le pétrole - doit être plus durable.