La faiblesse de la reprise chinoise plombe le prix du cuivre, au plus bas depuis presque 6 mois

Depuis la mi-janvier, le prix du métal rouge s'est déprécié de 14%, évoluant autour de 8.000 dollars la tonne, principalement plombé par la demande de la Chine, premier consommateur mondial, et une progression de la production. Mais si de nouvelles capacités sont prévues dans les prochaines années, reste à savoir si elles seront suffisantes pour faire face aux besoins liés à la transition énergétique et à éviter une flambée des prix.
Robert Jules
Stock de cuivre au Chili.
Stock de cuivre au Chili. (Crédits : Reuters)

Les prix du cuivre, considéré comme un indicateur avancé de conjoncture, sont au plus bas depuis novembre 2022. Sur le London Metal Exchange (LME), le premier marché des métaux, il s'échangeait à 8.094 dollars la tonne lundi pour une livraison à trois mois. Depuis son plus haut de l'année, atteint le 18 janvier, à 9.436 dollars la tonne, il s'est déprécié de plus de 14%. Sur un an, le recul s'affiche à 15%.

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cours du cuivre

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Il n'est pas le seul métal non ferreux à être orienté à la baisse puisque l'indice des métaux du LME accuse une baisse de 7% sur un mois et de plus de 20% sur un an.

Pourtant, certains facteurs sont haussiers pour le métal rouge. La demande mondiale de cuivre raffiné devrait augmenter de 1,4% en 2023 et de 2,8% en 2024, selon les projections du dernier rapport du Groupe international d'études sur le cuivre (ICSG). Le monde devrait consommer cette année 26,43 millions de tonnes de cuivre. « La réouverture de la Chine après la fin de sa politique zéro-Covid, une reprise dans le reste du monde après la demande contrainte de 2022 et l'amélioration de la croissance économique en 2024 devraient soutenir la croissance de la demande en 2023 et 2024 », explique l'ICSG.

Contraction de l'indice de la production manufacturière

Or, la République populaire n'est pas au rendez-vous, du moins pas encore. « Les données économiques orientées à la baisse ont surpris, suscitant des inquiétudes sur la demande de matières premières de la deuxième économie mondiale », commente Benjamin Hoff, analyste chez Société Générale. Consommant à elle seule près de 54% du cuivre mondial, l'évolution de ses besoins est scrutée. Cette année, ils devraient augmenter de 1,2% en 2023 puis de 2,6% en 2024. Certains spécialistes estiment même que la demande sous-jacente réelle se situerait entre 2,5% et 2,9% pour les deux années.

Si ces prévisions se confirment, cela signifiera que la demande chinoise devra bondir au deuxième semestre. Car aujourd'hui, la reprise économique est davantage portée par les services que la production de biens manufacturés. L'indice PMI Caixin manufacturier s'est affiché à 49,5 en avril, passant sous le seuil de 50, auquel il se situait en mars, signifiant une contraction. Selon l'administration générale des Douanes, les importations de cuivre ont chuté en avril de 12,5 % sur un an. Le métal rouge ne fait que refléter la tendance générale des échanges commerciaux, l'ensemble des importations ayant baissé de 7,9 % en avril, après un recul de 1,4% en mars. Les exportations marquent également le pas, après le bond de 14,8 % en mars, le rythme s'est ralenti à 8,5 % en avril. En outre, « les indicateurs dans la construction immobilière (secteur fortement consommateur de cuivre) sont en baisse en avril, malgré un premier trimestre prometteur », note Benjamin Hoff. En résumé, la machine à produire chinoise n'a pas encore enclenché la vitesse supérieure.

Hausse de la production recyclée

Ce moindre appétit participe du rééquilibrage du marché. La production de cuivre raffiné devrait augmenter de 2,6% en 2023 et de 4,4% en 2024, selon ICSG, malgré des perturbations et des périodes de maintenance plus longues dans certaines raffineries au Chili, en Indonésie et aux Etats-Unis. Quant à la production secondaire de métal rouge issue du recyclage, elle est attendue en hausse en 2023 et 2024 grâce au développement de nouvelles capacités. Conséquence, le déficit de 431.000 tonnes en 2022 devrait tomber à 114.000 tonnes cette année avant que le marché devienne excédentaire en 2024, de 298.000 tonnes, indique l'ICSG.

Du côté de l'activité minière, la progression des extractions ont été révisées à la baisse de 5% (estimé en octobre) à 3%, à 22,58 millions de tonnes, « principalement en raison de problèmes géotechniques et opérationnels, de pannes d'équipements, de conditions météorologiques défavorables, de glissements de terrain, de changements de stratégies des entreprises dans certains pays et des protestations des populations locales au Pérou », énumère l'ICSG. Le montant consacré au secteur à l'échelle mondiale a augmenté de 21% en 2022 pour atteindre 2,79 milliards de dollars, au plus haut depuis 10 ans, indiquaient les experts de S&P Global Market Intelligence, dans leur rapport « Exploration Trends 2023 ».

La production minière mondiale devrait d'ailleurs bénéficier du lancement de nouvelles capacités en République démocratique du Congo (mines de Kamoa Kalula et Tenke Fungurume), au Pérou (Quellaveco et Torromocho), au Chili (Quebrada Blanca QB2), ainsi que du retour progressif d'une production mise à l'arrêt dans certains pays à cause de la pandémie du Covid-19. Néanmoins, le rythme de cette production minière devrait ralentir en 2024, à 2,5%, la plupart des projets prévus n'entrant en production qu'au cours du deuxième semestre.

« Une urgence planétaire »

Surtout, ces prévisions à court terme ne reflètent pas les besoins à moyen et long terme ni les prix futurs du métal rouge. « S'il est un produit qui devrait nous agiter dans les années à venir, ce sera le cuivre », a averti dans un entretien à l'AFP Philippe Chalmin, coordinateur du CyclOpe, rapport annuel sur les marchés mondiaux des matières premières, à l'occasion de la parution de la 37e édition. Selon les projections de Standard & Poor's Global Market, la production de cuivre devra passer de 25 millions de tonnes en 2021 à 49 millions de tonnes en 2035, soit le double, pour faire face aux besoins de réseaux, de panneaux solaires, d'éoliennes, de voitures électriques. « On a l'impression que finalement les crises sont passées, alors que nous voyons une aggravation des situations climatiques, que la transition énergétique est de plus en plus une urgence planétaire et que celle-ci a été dessinée, je pense particulièrement au cas européen, sans véritablement se préoccuper de l'approvisionnement nécessaire en matières premières », alerte Philippe Chalmin. Une perspective que partagent les analystes de Goldman Sachs qui voient le prix du cuivre atteindre 15.000 dollars la tonne, en 2025, soit une appréciation de... 80% par rapport aux prix actuels, et largement au-dessus des plus de 10.700 euros atteint quelques jours après l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe.

Robert Jules
Commentaires 3
à écrit le 24/05/2023 à 11:22
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Je vous recommande la lecture de "Oxymore" le troisième récit de Jean Tuan (C.L.C. Éditions). L’auteur bon connaisseur de la Chine (le pays de son père) utilise le genre du roman policier pour distraire les lecteurs tout en leur faisant approcher cer...

à écrit le 24/05/2023 à 6:49
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Bonjour personnellement je crois que le cours de certaine matiers première sont trops élevés.. Bien sur cela ne regarde que moi... Pour la chine les chose ne sont pas claire... ralentissement du fait du covid ou du fait du ralentissement des...

à écrit le 23/05/2023 à 20:43
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!!!!Ce n'est pas ce qu'on nous annonçait il y a quelques semaines. Ça va donc très mal en Chine.

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