Mer Rouge : les États-Unis affirment avoir saisi des pièces détachées de missiles iraniens destinés aux rebelles Houthis

L’armée américaine a saisi il y a quelques jours, sur un bateau en mer d’Arabie, des pièces de missiles de fabrication iranienne à destination des rebelles houthis. Il s’agit de la première saisie de ce type depuis le début des attaques de Houthis contre des navires commerciaux. Une preuve que l’Iran agit dans l’ombre, contrairement à ce qu’il assure depuis des semaines.
Depuis la fin de l’année 2023, les rebelles Houthis ont lancé une vingtaine d’attaques contre des navires marchands en mer Rouge (photo d'illustration).
Depuis la fin de l’année 2023, les rebelles Houthis ont lancé une vingtaine d’attaques contre des navires marchands en mer Rouge (photo d'illustration). (Crédits : Reuters)

[Article publié le mardi 16 janvier à 14h19, mis à jour à 16h00] C'est une saisie qui remonte au 11 janvier mais que les États-Unis n'ont révélé que ce mardi. Dans un communiqué, l'état-major de l'armée américaine indique avoir saisi des « armes avancées létales fournies par l'Iran aux Houthis » comprenant des « composants de missiles balistiques et de missiles de croisière ». Les pièces de missiles ont été saisies à bord d'un boutre, un voilier traditionnel arabe, manœuvré par un équipage de 14 personnes. L'embarcation a été jugée dangereuse et a été coulée, a fait savoir l'état-major de l'armée américaine.

« Il s'agit de la première saisie » de ce type « depuis le début des attaques des Houthis contre des navires marchands en novembre 2023 », est-il indiqué.

Les Houthis sont un groupe militaire, formé dans les années 1990, qui exerce actuellement un contrôle de facto sur une partie du Yémen. Soutenus par l'Iran, ils font partie de ce qu'ils qualifient d' « axe de la résistance » contre Israël, avec des groupes comme le Hamas palestinien ou le Hezbollah libanais. Depuis fin 2023, en représailles à la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza, ils ont lancé une vingtaine d'attaques contre des navires marchands autour du détroit de Bab-el-Mandeb, un point de passage stratégique qui relie la mer Rouge à l'océan Indien et par lequel transite 12% du commerce mondial. En riposte, les États-Unis ont créé une coalition d'une dizaine de pays afin de ramener la sécurité dans la zone. Washington et Londres ont alors ciblé vendredi et samedi dernier plus de 30 sites militaires tenus par la milice. Laquelle a répliqué ce lundi en tirant un missile contre un cargo américain, sans faire de blessés ni de dégâts majeurs.

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L'Iran agit bien dans l'ombre...

Si le conflit est franchement ouvert avec les Houthis, rien ne prouvait jusqu'à présent que l'Iran soutenait activement les Houthis, comme l'affirmaient néanmoins des responsables américains ou israéliens. Depuis le début du conflit à Gaza, l'Iran insiste en effet sur le fait que les acteurs de « l'axe de la résistance » agissent indépendamment de lui. Cette saisie montre finalement le contraire.

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Rien d'étonnant cependant à ce que l'Iran fasse profil bas. Téhéran « est conscient du fait qu'une intervention directe présenterait le risque de plonger la région dans une confrontation globale », souligne Tohid Asadi, professeur de relations internationales à l'Université de Téhéran.

Pour son collègue universitaire Fayyaz Zahed, « ni l'Iran, ni les États-Unis, ni les autres puissances ne sont intéressées par un conflit direct. Mais chacun d'eux joue ses propres cartes ». « L'une des caractéristiques » de la politique de l'ayatollah Ali Khamenei, le guide suprême au pouvoir depuis près de 35 ans, « est d'éviter la guerre tout en s'efforçant de maintenir l'autorité des forces militaires et de sécurité de l'Iran », précise cet expert.

Reste que, pour Ali Vaez, chercheur spécialiste de l'Iran au centre de réflexion Crisis Group, « nous sommes déjà dans une guerre régionale », estime-t-il. Et d'ajouter : « Les événements des dernières 24 heures démontrent clairement qu'elle a commencé, même si elle mijote pour l'instant à petit feu ».

 ... mais aussi ouvertement

La tension monte encore d'un cran au Moyen-Orient. L'Iran a envoyé des missiles en Irak et en Syrie dans la nuit de lundi à mardi, tout en se gardant de viser des intérêts américains. Ces attaques étaient attendues puisque Téhéran avait juré de riposter après un attentat suicide meurtrier début janvier sur son sol et les liquidations récentes de plusieurs commandants des Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de la République islamique, et de chefs de formations alliées de Téhéran dans sa lutte contre Israël.

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Des missiles balistiques ont ainsi été envoyés sur des bâtiments dans la périphérie d'Erbil, capitale du Kurdistan autonome du nord de l'Irak. Ils ont détruit « un quartier général d'espionnage » attribué à Israël et ciblé « un rassemblement de groupes terroristes anti-iraniens », selon l'agence de presse officielle Irna. Ces frappes ont tué quatre civils selon des sources kurdes.

En Syrie, les missiles iraniens ont visé des « lieux de rassemblement des commandants et des principaux éléments liés aux récentes opérations terroristes, en particulier l'État islamique » (EI), selon le site internet des Gardiens, Sepah News. L'agence Irna a souligné que les missiles avaient parcouru « plus de 1.200 km » entre leur point de tir, dans le sud-ouest de l'Iran, et la zone ciblée en Syrie, soit « l'opération de missiles la plus ambitieuse menée jusqu'à présent par l'Iran ». Il s'agit d' « un message clair adressé au régime sioniste » sur la capacité de l'Iran à pouvoir frapper Israël, selon l'agence.

Un vraquier grec touché par un missile au large du Yémen

Nouvelle attaque de navire au large du Yémen ce mardi. Cette fois, c'est un vraquier - un bateau transportant des produits en vrac - grec qui a été touché par un missile, selon la société privée de risques maritimes Ambrey. Au moment où il a été touché, le navire battant pavillon maltais « traversait le sud de la mer Rouge en direction du nord » vers le canal de Suez, a affirmé Ambrey en précisant qu'il avait poursuivi sa route. Ce vraquier navire et d'autres appartenant à la même flotte faisaient escale en Israël depuis le 7 octobre. De son côté, l'agence de sécurité maritime britannique, UKMTO, a signalé un « incident » au nord-ouest de la ville yéménite de Saleef, sans fournir de détails.

On ne sait pas pour le moment qui est à l'origine de ce tir de missile. Ce lundi, une attaque similaire contre un navire américain avait en tout cas été revendiquée par les Houthis.

Suite à la répétition des attaques des rebelles yéménites en mer Rouge, il est recommandé aux navires marchands d'arrêter leur signal AIS (Automatic identification system), qui permet leur localisation en temps réel, à l'approche du détroit de Bab-el-Mandeb, ou à défaut, d'émettre le minimum d'informations possible. Les grandes compagnies maritimes préfèrent d'ailleurs réorienter leurs navires vers la pointe Sud de l'Afrique, malgré les coûts de carburant plus élevés et des voyages beaucoup plus longs.

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 17/01/2024 à 9:11
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Bravo à leurs services de renseignements.

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