Qui est Alexeï Navalny, le principal opposant de Vladimir Poutine ?

[Portrait] Le leader de l'opposition russe Alexeï Navalny a été arrêté par les forces de l'ordre ce dimanche 26 mars. Des milliers de Russes avaient répondu à son appel pour manifester contre la corruption qui gangrène le pays. Navalny, qui doit être entendu par les juges ce lundi, pourrait écoper de 15 jours d'emprisonnement. Retour sur le parcours de ce militant qui ose défier le pouvoir autocratique du Kremlin.
Grégoire Normand
Alexeï Navalny quelques heures après son arrestation ce dimanche 26 mars lors de violentes manifestations contre la corruption en Russie.

L'opposition reste muselée au pays des tsars. Dans une ambiance très tendue, des milliers de Russes sont descendus dans la rue pour manifester contre les pratiques de corruption de l'oligarchie et contre l'enrichissement très controversé du Premier ministre Dmitri Medvedev, ce dimanche 26 mars. Seulement quelques heures après le début du rassemblement, Alexeï Navalny a été arrêté par les forces de sécurité. Ce qui a immédiatement provoqué la colère des manifestants. Navalny doit être présenté devant un juge ce lundi 27 mars pour "appel à un rassemblement illicite donnant lieu à des troubles à l'ordre public". Mais ce n'est pas la première fois que ce citoyen russe de 40 ans connaît des déboires avec le régime en place.

alexeï navalny

Alexeï Navalny interpellé par les forces de l'ordre ce dimanche 26 mars à Moscou. Crédits : Reuters/Maxim Shemetov.

Un juriste à la présidentielle

En décembre dernier Alexei Navalny a déclaré officiellement sa candidature à l'élection présidentielle de 2018 sur son compte Twitter.

 Il avait annoncé sur son site de campagne à cette occasion :

"Je nous exhorte tous à mettre en œuvre de véritables élections en 2018. Ce ne sera pas une tâche facile. En effet, il n'y a pas eu de véritables élections en Russie depuis 1996. Il faut faire du processus électoral, qui ne signifie plus rien depuis vingt ans, un véritable combat d'idées et de programmes."

Et depuis l'annonce officielle de sa candidature, ce juriste de formation a ouvert plusieurs QG de campagne dans des grandes villes russes attirant beaucoup de sympathisants mais également des provocations de la part des pro-Poutine comme le rapporte Courrier International.

Un contestataire tout terrain

Cette candidature à la présidentielle est l'aboutissement de plusieurs années de mobilisation sur le net et sur le terrain.  Avec une équipe de juristes, Alexeï Navalny s'est d'abord fait connaître en lançant il y a quelques années le site Rospil, spécialisé dans les enquêtes et la dénonciation de fraudes relatives aux marchés publics. Il avait également monté le projet Rosvibori qui permet aux citoyens d'exercer un contrôle lors des élections. Enfin, avec son fonds de lutte contre la corruption mis en place en 2012, il vise à dénoncer le "parti des escrocs et des voleurs" et ses représentants, à savoir le parti au pouvoir Russie Unie et le président Vladimir Poutine.

Cet activiste des réseaux sociaux s'est imposé comme une figure importante de l'opposition en 2011 lors de vastes manifestations contre les fraudes aux élections législatives. Des membres d'ONG et observateurs avaient remarqué des bourrages d'urnes dans les grandes villes où l'opposition ne dépassait pas 20%.

En 2013, il fait ses premières armes en politique en se présentant aux élections municipales à Moscou et crée la surprise en obtenant 27,2% des suffrages en arrivant second juste derrière le maire sortant et ancien chef de cabinet de Vladimir Poutine, Sergueï Sobianine.

Des positions nationalistes

Alexeï Navalny a été formé au début des années 90 à l'université de l'amitié des peuples. Il a ensuite rejoint le parti libéral d'oppostion Labloko. Mais il en a été exclu en 2007 pour ses prises de position nationalistes. Courrier international souligne également qu'il a parfois participé à des marches "aux relents racistes tels que la Marche Russe" en compagnie de xénophobes assumés. Il aurait depuis pris ses distances avec ces mouvements et aurait enlevé tous les passages à caractère nationaliste dans ses discours.

Accusé d'être un agent de la CIA

Il y a près d'un an, la chaîne d'Etat Russe Rossia 1 a diffusé un documentaire sur Alexeï Navalny le présentant comme un agent des renseignements travaillant pour la CIA. Les auteurs du documentaire s'appuient sur des dossiers obtenus par le service de renseignement britannique, le MI6. Les rapports accusent Navalny, le leader du Parti du progrès de participer à la "déstabilisation de l'ordre constitutionnel de la Fédération de Russie". Mais des fautes de grammaire anglaise grossières ont été repérées dans les documents par des internautes. Ce qui a a jeté le doute sur l'authenticité des pièces à charge rédigées par des Anglophones et présentées dans le documentaire.

Un habitué des procès

Alexeï Navalny doit régulièrement faire face à la justice de son pays. En 2014, il a été condamné à trois ans et demi de prison avec sursis en même temps que son frère Oleg pour avoir détourné "400.000 euros au détriment d'une filiale russe de la société française Yves Rocher" comme le souligne l'AFP. En février dernier, il est de nouveau condamné à cinq ans de prison avec sursis pour avoir détourné des fonds dans une affaire déjà jugée en 2013 et dont la décision avait été annulée. Pour son arrestation de dimanche dernier, il risque 15 jours de rétention administrative.

Une candidature compromise pour 2018 ?

La candidature de cet ancien étudiant de Yale pourrait connaître de grandes difficultés. Des politologues et journalistes ont déjà "enterré" la candidature du blogueur comme le chercheur Alexandre Morozov qui déclare que la situation politique est devenue très compliquée en Russie. S'il y a quelques années des opposants pouvaient prétendre à des postes à responsabilité, actuellement "le Kremlin ne répond plus que par des mesures policières, le dialogue politique est considéré comme inenvisageable". De son côté  Alexeï Navalny ne l'entend pas ainsi. Il a pour habitude de rejeter les décisions prises à l'issue de ces procès et a "assuré que rien ne viendrait enrayer sa motivation."

Son parcours en quelques dates

1976 : naissance près de Moscou ;

1998-2000 :il est diplômé de droit et de finances à Moscou ;

2011 : il l'un des leaders du mouvement de protestation contre les fraudes électorales lors des élections législatives. Il est arrêté et condamné à 15 jours de prison ;

2013 : il se présente à la mairie de Moscou et obtient 27% des voix ;

2017 : il se présente à l'élection présidentielle pour 2018.

Grégoire Normand
Commentaire 1
à écrit le 27/03/2017 à 19:02
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Une chose est sure ce n'est pas l'ami de Mme Le Pen qui préfère les fascistes à ceux qui dénoncent la corruption. En France la justice et les enquêteurs attendent Mme Le Pen qui elle aussi au pouvoir fera tirer un trait de crayon sur les enquêtes et ...

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