« Les députés de la majorité peuvent ressentir une certaine confusion » (Eric Woerth)

Ex-LR, le député Renaissance de l'Oise, très écouté au sein de la macronie, estime que si son camp veut réussir, il a « évidemment besoin » des Républicains.
Ludovic Vigogne
Éric Woerth à l’Assemblée nationale.
Éric Woerth à l’Assemblée nationale. (Crédits : Gonzalo Fuentes)

LA TRIBUNE DIMANCHE - Le projet de loi sur l'immigration arrive en débat au Parlement la semaine prochaine. La majorité peut-elle se fracturer sur celui-ci ?

ERIC WOERTH- Je ne crois pas. Ce projet de loi est sur la table depuis de longs mois. Au sein de la majorité, chacun a pu s'exprimer et c'est naturel. Aujourd'hui plus personne ne remet en question la nécessité d'un texte d'une grande fermeté afin de mieux contrôler les flux migratoires et de lutter contre l'immigration irrégulière. C'est ce que souhaite la très grande majorité des Français. Il n'y a donc aucune raison que la majorité se fracture. Le débat sur l'article 3 n'a pour moi pas beaucoup de sens. Le seul critère qui doit nous guider, pour cet article comme pour le reste, c'est : est-ce utile ou pas, efficace ou pas ? La France a besoin d'un texte fort sur l'immigration. Point. Le gouvernement est en train de travailler très étroitement avec la majorité sénatoriale afin de trouver un compromis. Une fois celui-ci obtenu, il faudra cesser avec les états d'âme des uns et des autres, dans la majorité comme chez les députés LR.

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L'état de la majorité vous inquiète-t-il néanmoins ?

C'est vrai qu'il y a pas mal de députés de la majorité qui viennent moins à l'Assemblée nationale. C'est dû à plusieurs facteurs. Nous sommes dans une période d'incertitude profonde comme nous n'en avons pas vécu depuis très longtemps. Elle bouscule tous les grands sujets en même temps. C'est très rare. Habituellement, ils se traitaient les uns après les autres. Là, il faut à la fois se pencher sur l'école, la santé, la situation géopolitique, le changement climatique, le pouvoir d'achat... Et de plus, chacun de ces sujets est inflammable. Cela génère beaucoup d'inquiétude dans la population. Les députés en sont le reflet. C'est pourquoi ils essaient de passer plus de temps dans leur circonscription. Par ailleurs, l'emploi à répétition du 49-3 pour faire adopter les textes budgétaires démobilise aussi. Si les députés de la majorité ne remettent pas en question son utilisation, ils peuvent être frustrés par rapport au travail qu'ils ont mené, car très souvent leurs amendements sont écrasés par le 49-3. Enfin, ils peuvent ressentir une certaine confusion.

C'est-à-dire ?

Le fait que tous les sujets soient sur la table conjointement nécessite des réponses à court, moyen et long terme. Or ça peut faire apparaître des incohérences. Un exemple : on aide les Français à payer moins cher leur essence tout en annonçant en même temps qu'il faut accélérer la réduction des émissions de carbone. Cela peut logiquement décontenancer. Face à ce risque, le gouvernement n'a pas d'autre solution que de dire la vérité. Il doit ainsi dire que l'évolution de nos modes de vie, l'exigence de plus de qualité, la nécessité de plus de souveraineté... vont contribuer à faire que les prix continueront à augmenter. Et que la seule réponse, c'est l'augmentation des revenus et que ça passe notamment par la productivité du travail.

Que faudrait-il changer pour que cela soit plus clair ?

Le président, le gouvernement doivent encore plus expliquer que nous sommes, la France comme le monde, à un carrefour géopolitique, climatique, économique, qui va nécessiter de changer des paradigmes, mais que c'est pour que nos vies soient meilleures. Dans le discours qu'ils doivent tenir, il faut à la fois mettre de l'optimisme, doser le taux d'effort demandé aux Français, faire en sorte qu'il n'y ait pas d'incohérences malgré la complexité ainsi que la diversité des solutions et dire que l'efficacité sera là. Face à la tâche gigantesque qui nous attend, l'option d'une pause pour que chacun puisse souffler, comme certains le demandent, serait une erreur fondamentale. Au contraire, il faut accélérer.

Un changement de Premier ministre pourrait-il être une solution ?

C'est un choix du président de la République, mais j'ai toujours pensé que les solutions ne passaient pas nécessairement par des changements de personnes, ce serait trop simple. Le gouvernement est compétent, il est sur tous les ballons. Mais il doit expliquer où va le ballon et comment on va jouer. Aujourd'hui, il y a des ministres forts. Les Français le reconnaissent. À Élisabeth Borne d'être une cheffe d'orchestre même si, dans la Ve République, le président l'est aussi. Elle fait le job. Si le président décide de changer de Premier ministre, c'est sa décision.

Comment le président doit-il intégrer le fait de ne pas pouvoir se représenter en 2027 ?

Mais il ne faut pas qu'il l'intègre ! Cela ne doit pas l'arrêter et d'ailleurs ce n'est pas le cas, et c'est tant mieux. Le chef de l'État doit se sentir plus libre que jamais pour faire les transformations nécessaires pour le pays. Puisqu'il ne court aucun risque politique, il ne doit mettre sur la table que des textes forts. Depuis que je suis élu, j'ai toujours entendu parler de texte « équilibré ». Mais un texte doit avoir du caractère, une identité. La seule sortie, c'est la sortie par le haut. Elle est à portée de la main. Je ne suis pas défaitiste. Nous sommes en plein dans un chantier de construction. Il faut le poursuivre. La France est sur de bons rails. Même s'il va sans doute remonter un peu, le chômage a beaucoup baissé. Il n'y a jamais eu autant d'apprentis... Les Français doivent considérer que notre pays est aussi capable de réussir et ne part pas en vrille.

Faut-il discuter davantage avec Les Républicains ?

On discute déjà beaucoup avec eux. Il y a beaucoup de tête-à-tête informels entre députés LR et députés de la majorité, moi le premier. Oui, il faut multiplier les canaux de conversation. Si on veut réussir, on a évidemment besoin des Républicains. Même si LR a peu d'électeurs, c'est un grand parti. Mais il faudrait qu'il se ressaisisse. Moi, je l'ai quitté car il avait abandonné la plupart des fondamentaux qui nous réunissaient. Les Républicains doivent participer pleinement à la vie politique de notre pays sans faire planer sans arrêt des menaces et dépasser leur détestation du président de la République. Ce sont des sentiments personnels qui n'ont pas leur place dans le débat politique.

Un candidat commun pour la majorité et LR vous semble-t-il souhaitable en 2027 ?

Il pourrait bien sûr y en avoir un. Il n'y a aucune raison pour que ce ne soit pas le cas. Ce serait même hautement souhaitable.

Ludovic Vigogne
Commentaires 3
à écrit le 05/11/2023 à 11:51
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LOL !

le 06/11/2023 à 7:54
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traitre a leur valeurs démocratique incapables d'une vision d'avenir ils mange dans toute les gamelle élu avec l'argent d'un parti il change de boutique en cours de mandat les électeurs floue ,trompe. il est imposible de leurs faire confiance et...

à écrit le 05/11/2023 à 8:34
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Encore un qui paraissait relativement valable, et qui a trahi son camp. Comment lui faire confiance ?

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